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Beckham au PSG : "Une réponse au Qatargate"

Pour le journaliste Arnaud Hermant, auteur d'une enquête sur le PSG, l'arrivée de Beckham est bien plus qu'un choix sportif et marketing. Ce recrutement redore l'image du Qatar après les accusations de corruption pour décrocher le Mondial-2022.

En apprenant jeudi 31 janvier l’arrivée de David Beckham au Paris Saint-Germain, Arnaud Hermant n’a pas été surpris. Ce journaliste de la rédaction du "Parisien" suit depuis plus de dix ans l’équipe de la capitale. Des sources internes lui avaient déjà appris qu’une star était attendue cette semaine au Parc des Princes. "Nous n’avions juste pas encore de garanties qu’il s’agissait de Beckham", explique le reporter qui vient de publier "Le PSG, le Qatar et l’argent"*, une enquête co-écrite avec Gilles Verdez, chroniqueur à RFI.

Arnaud Hermant a en revanche été plus étonné par le timing de cette annonce et l’accélération des événements. Pour lui, le recrutement du "Spice Boy" n’est certainement pas dû au hasard. Il intervient quelques jours après les révélations de "France Football" qui accuse le Qatar d’avoir acheté le Mondial-2022.

"Je n’exclu pas que ce soit une réponse au Qatargate. C’est une bonne manière de restaurer l’image du pays en attirant le joueur le plus connu au monde. C’est un footballeur très sympathique. Un gars simple et abordable. Ils prennent un mec qui a une image positive", estime ainsi Arnaud Hermant.

La géopolitique du ballon rond

Pour le journaliste, ce transfert hors norme de l’ancien milieu de terrain de Manchester United permet également au PSG d’entrer dans une nouvelle dimension et de développer sa marque au niveau mondial : "Zlatan est une vraie star, mais pas du niveau de Beckham. Ce dernier a un palmarès plus important et surtout un côté pop-star anglaise. Il forme un couple très glamour avec Victoria. Le PSG bascule dans un autre monde".

Arnaud Hermant a décrypté cette stratégie dans son dernier livre. Pour ce spécialiste, la révolution du club parisien dépasse la simple sphère du sport. En misant sur le football à travers le PSG et la Coupe du monde 2022, le petit émirat s’inscrit avant tout dans une "une géopolitique du ballon rond".

"C’est une 'soft diplomatie'. Les Qataris cherchent à faire en sorte qu'on soit bienveillant envers eux à travers le sport. Ils veulent s’acheter une image car ils ont la hantise de subir ce qu’à vécu le Koweït, explique Arnaud Hermant. Ils cherchent à s’attacher la protection des grandes puissances au cas où il serait envahi, notamment par l’Iran, surtout qu’ils n’ont pas d’armée."

Pas le droit à l’erreur

Fabuleusement riche, le Qatar utilise donc son argent pour se protéger. L’émirat suit le slogan de sa chaîne Al-Jazeera : "We Have No Limits" (Nous n'avons pas de limites). En quelques mois, le président qatari du PSG, Nasser al-Khelaïfi, a fait venir à coup de millions d’euros quelques-uns des meilleurs joueurs au monde : Zlatan Ibrahimovic, Thiago Silva, Lucas Moura et finalement David Beckham.

"La saison dernière, c’est la première fois au PSG, qu’il y avait plus de cinq joueurs à plus de 300 000 euros bruts mensuels. C’était du jamais vu. Il y a déjà eu des gros salaires, mais pas dans ces proportions", note le journaliste.

Mais cet investissement a intérêt à être rentable. Les responsables du club de la capitale ont encore en travers de la gorge la débâcle du championnat 2011-2012 : "Ils ont été battus par le petit club de Montpellier que personne n’attendait et ils ont terminé deuxième. On s’est moqué d’eux !".

Si avec son effectif de "méga vedettes" le Paris Saint-Germain ne décroche pas le titre de champion de France, le Qatar risque de voir rouge. "Cela valserait à la direction sportive. Carlo Ancelotti et Leonardo devraient faire leurs valises. Il y a énormément d’argent en jeu. Les Qataris sont là pour gagner !". Premier du classement, à égalité de points avec l’Olympique Lyonnais, le PSG a cinq mois pour éviter l’humiliation.

* Gilles Verdez et Arnaud Hermant, "Le PSG, le Qatar et l'argent : l'enquête interdite" (Editions du moment).