Le médiateur de l’ONU et de la Ligue arabe pour la Syrie a lancé mardi un cri d’alarme sur la situation dans le pays, évoquant un niveau d’horreur sans précédent, avant d'exhorter le Conseil de sécurité à agir d'urgence.
Vingt-deux mois après le début de la crise en Syrie, le pays est en train de se "détruire petit à petit". C'est ce qu’a affirmé, mardi, le médiateur international de l’ONU et de la Ligue arabe, Lakhdar Brahimi, avant d’exhorter le Conseil de sécurité à agir d’urgence.
"Le Conseil ne peut se contenter de dire : 'Nous sommes divisés, donc attendons des jours meilleurs', ils [les membres du Conseil] doivent se saisir de ce problème maintenant", a-t-il déclaré à la presse après avoir rendu compte au Conseil de sa mission. "Si on exerce un peu plus de pression [sur les protagonistes du conflit], il y aura peut-être un peu plus de progrès", a-t-il estimé.
En cause, notamment, selon le diplomate : l'ambigüité contenue dans la déclaration de Genève sur le sort à réserver au président Bachar al-Assad dans une transition politique. Selon lui, le gouvernement de transition prévu par la déclaration de Genève "doit avoir les pleins pouvoirs exécutifs, c'est-à-dire que tous les pouvoirs de l'État doivent aller à ce gouvernement", ce qui écarterait de fait le président Assad.
"Je ne suis pas un lâcheur"
Critiqué notamment par le chef de la Ligue arabe, qui avait déclaré lundi 21 janvier que la mission du médiateur n'avait apporté "aucune lueur d'espoir", Lakhdar Brahimi a reconnu qu'il "n'avait pas fait beaucoup de progrès" mais a rejeté l'idée de renoncer à sa mission. "Je ne suis pas un lâcheur", a-t-il affirmé, prévenant cependant: "Dès que je me sentirai totalement inutile, je ne resterai pas une minute de plus" à ce poste.
Devant le Conseil, M. Brahimi a peint un tableau très noir du conflit en Syrie, selon des diplomates présents, déclarant qu'il avait atteint "des niveaux d'horreur sans précédent" et était en train de "briser" le pays.
Le médiateur a aussi constaté qu'il n'y avait "pas de progrès" dans les efforts de paix menés en Syrie. "Je suis désolé d'avoir à me répéter comme un disque rayé", a-t-il dit.
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Carnage à Alep
La déclaration de l’émissaire international intervient après la découverte d’un nouveau carnage à Alep, où près de 80 corps de jeunes gens exécutés ont été retrouvés mardi.
A l'école Yarmouk, où s'entassent les cadavres, un rebelle de l'Armée syrienne libre (ASL), Abou Seif, a affirmé que 78 corps avaient été récupérés dans la rivière Qouweiq et qu'il en restait encore une trentaine que l'ASL ne peut pas récupérer en raison des tireurs embusqués du régime.
"Nous ne savons pas qui ils sont car ils n'ont pas de pièces d'identité", a déclaré un volontaire en aidant à mettre un corps dans un camion. Dans le véhicule, un correspondant de l'AFP a pu compter quinze cadavres.
L'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH), qui s'appuie sur des militants et des médecins, a fait état de "65 cadavres non identifiés retrouvés à Boustane al-Kasr", quartier tenu par les rebelles.
"Âgés d'une vingtaine d'années, ils ont été exécutés d'une balle dans la tête. Vêtus en civil, la majorité ont les mains liées derrière le dos", a-t-il ajouté.
M. Brahimi a suggéré une enquête internationale sur ce nouveau massacre, soulignant que les deux camps avaient commis "des crimes également atroces".
FRANCE 24 avec dépêches