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Les rebelles prennent le camp de Yarmouk, Ahmed Jibril en fuite

Le grand camp de réfugiés palestiniens de Yarmouk, non loin du centre-ville de Damas, semble désormais aux mains des rebelles syriens. La presse proche du régime annonce, de son côté, l'imminence d'une contre-attaque.

Les mauvaises nouvelles s’accumulent pour le président syrien Bachar al-Assad. La chute, même partielle, du grand camp de réfugiés palestiniens de Yarmouk, au sud de la capitale, est un nouveau coup dur pour son régime. Après environ deux semaines de combats, le Front populaire pour la libération de la Palestine-Commandement général (FPLP-CG), un groupuscule armé et financé par Damas, a perdu, selon plusieurs sources, le contrôle du camp. Ce dernier, qui compte habituellement 150 000 habitants, est situé sur la ligne de confrontation entre les forces du régime et les rebelles.

Damas prépare la contre-attaque
"L’Armée syrienne libre (ASL) contrôle la totalité du camp, y compris les locaux du FPLP-CG situé dans la rue numéro 30", affirme Mahmoud Nassar, porte-parole du comité de coordination du camp de Yarmouk, contacté par téléphone par l’antenne arabe de FRANCE 24. Toutefois, d’autres sources citées par les agences de presse internationales affirment que quelques poches échappent encore au contrôle de l’ASL.
La déroute des combattants du FPLP-CG, en charge depuis plusieurs décennies de la sécurité de ce faubourg défavorisé de la capitale, a poussé Damas à préparer une contre-attaque. Le quotidien Al-Watan, proche du pouvoir, affirme que "l'armée se prépar[e] à une opération militaire dans le camp". L'aviation syrienne a mené, mardi, de nouveaux raids aériens sur Yarmouk, selon l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH), une ONG proche de l'opposition. Un premier bombardement aérien, le 16 décembre, avait fait huit morts dans le camp.

"Le succès des forces rebelles, composées de militaires de carrière ayant fait défection, n’est pas étonnant, car les hommes de Jibril [chef du FLP-CG], du moins ceux qui n’ont pas encore fait défection, ne sont pas des soldats mais plutôt des combattants légèrement entraînés", confie à FRANCE 24, sous le sceau de l’anonymat, un ancien officier des services de renseignements syriens, réfugié à Paris. Et d’ajouter : "Le régime ne peut se permettre de leur laisser le contrôle du camp, les rebelles doivent s’attendre à une réponse".

Ahmed Jibril, la "créature des Assad"
Reste que le sort du chef incontesté du FPLP-CG demeure incertain. Ahmed Jibril aurait quitté le camp le 15 décembre pour se réfugier avec son fils à Tartous, une ville côtière dominée par les Alaouites, la communauté religieuse du président Bachar al-Assad, selon l’agence Reuters, citant des sources palestiniennes et de sources proches des rebelles.
"Il faut rester extrêmement prudent avec ce type d’information, même si elle paraît crédible puisque Tartous est un fief du régime, bien protégé, proche du Liban et relativement calme par rapport au reste du pays", explique à FRANCE 24 Ignace Leverrier, ancien diplomate en poste à Damas et auteur du blog très documenté "Un œil sur la Syrie", hébergé sur le site du journal Le Monde. Le FPLP-CG, qui refuse toute solution négociée avec Israël et qui est considéré comme une organisation terroriste par Washington, possède deux bases paramilitaires dans l’est du pays du Cèdre.
Selon cet expert de la Syrie, en engageant le combat contre les rebelles, le dirigeant palestinien âgé de 84 ans, "qui n’a jamais rien fait pour la cause palestinienne et qui n’a aucune crédibilité aux yeux de ses semblables, surtout à Yarmouk", n’a fait que confirmer "qu’il est une créature des Assad et que ses combattants ne sont que des agents palestiniens aux ordres de Damas".
Tandis que les islamistes du Hamas, au pouvoir dans la bande de Gaza, ont pris leurs distances avec Damas qui accueillait pourtant son chef exilé, Khaled Mechaal, jusqu’en janvier dernier, le FPLP-CG est resté fidèle au président Bachar al-Assad. "J’ai discuté de la question avec les frères [le pouvoir syrien, NDLR], avec Hassan Nasrallah [le secrétaire général du Hezbollah] et avec les frères en Iran, et en cas d’attaque étrangère, nous ferons partie de cette bataille", avait notamment déclaré en juillet dernier Ahmed Jibril.
Une position devenue intenable tant les observateurs faisaient état d’une division au sein du camp de Yarmouk entre partisans et détracteurs du FPLP-CG depuis plusieurs mois. Fin octobre, des rebelles syriens avaient annoncé la formation d'une brigade de Palestiniens dans le camp de Yarmouk dont l'objectif était de lutter contre ceux qui combattent aux côtés du président syrien Bachar al-Assad. En clair : d’engager le combat contre le FPLP-CG, accusé de harceler les habitants du camp et de s'en prendre aux combattants de l’ASL.
Photo principale : des combattants de l'ASL paradent dans le camp de Yarmouk (vidéo postée le 17 décembre 2012).