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Nicolas Maduro, le nouveau visage du chavisme vénézuélien

Le vice-président du Venezuela et ministre des Affaires étrangères, Nicolas Maduro, ancien chauffeur de bus et proche fidèle de Chavez, a été désigné fin 2012 par le président, alors gravement malade, comme son dauphin. Portrait.

À première vue, son nom n’évoque rien. Nicolas Maduro, vice-président du Venezuela, carrure de joueur de base-ball et moustache garnie, est pourtant le nouveau visage du chavisme vénézuélien. C’est lui qui a annoncé le décès d'Hugo Chavez dans la soirée de mardi : "Nous avons reçu l'information la plus dure et la plus tragique que nous pouvions annoncer à notre peuple. À 16h25 [21h55, heure de Paris], aujourd'hui 5 mars, est mort notre commandant président Hugo Chavez Frias".

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Le vice-président, Nicolas Maduro, annonce la mort de Chavez
Nicolas Maduro, le nouveau visage du chavisme vénézuélien

À 58 ans, Maduro va prendre la tête du parti socialiste au pouvoir et devra s’atteler à la difficile tâche de rallier le soutien du pays. Selon la Constitution, une élection présidentielle anticipée doit se tenir dans les 30 jours suivant le décès du président.

Maduro, le successeur désigné

Chavez en avait lui-même fait son successeur officiel depuis décembre 2012, alors qu’il était déjà gravement malade d’un cancer et s’apprêtait à se rendre à Cuba pour y subir une quatrième opération.

Depuis, comme si trop faible pour assumer les responsabilités du pays, il s’apprêtait déjà à renoncer à son poste, le chef de la révolution bolivarienne exposait à l'envi son dauphin sous le feu médiatique. C'est Maduro que l'on a vu au chevet du président malade à La Havane, lui seul encore qui donnait des nouvelles de l'état de santé de Chavez en conférence de presse, tout en laissant planer le doute sur une éventuelle rémission miracle du président. "Nous vous attendrons, nous, les enfants qui vous avons juré loyauté même au-delà de la vie. Vous devez revenir !", avait-il lancé à Hugo Chavez, le 11 décembre, à la télévision nationale.

Dernière preuve de leur complicité, le leader chaviste avait prévenu, samedi 8 décembre, lors d'une allocution, que s’il lui arrivait quelque chose, son peuple devrait faire confiance à son poulain. "C’est un jeune révolutionnaire à part entière", avait-t-il récemment dit de Maduro, "avec sa main ferme, avec sa vision, avec son cœur d’homme du peuple, avec son talent avec les gens, avec la reconnaissance internationale qu’il s’est acquise, c’est l’un des jeunes dirigeants ayant les meilleures capacités" pour diriger le Venezuela.

Maduro, le vieux compagnon d'armes

Les destins des deux hommes se sont croisés en 1998, lors de la première campagne électorale de Chavez. Nicolas Maduro est alors l'un de ses assistants. Quand, en décembre de la même année, El Comandante remporte l’élection présidentielle, c’est avec Maduro qu’il se rend au Conseil national électoral [qui proclame les résultats]. C’est dire la complicité qui règne déjà entre les deux hommes.

En quelques années, il monte dans l’ascenseur politique. En 1999, il obtient son premier mandat de député, en 2005, il devient brièvement président de l’Assemblée nationale, en 2006, cet ancien chauffeur de bus accède au poste de ministre des Affaires étrangères. Déjà, le ton et le style du chef de la diplomatie vénézuélienne ressemblaient à ceux de Chavez. "Maduro va jusqu’à traiter le sous-secrétaire d’État américain de ‘petit fonctionnaire’ ayant un ‘casier judiciaire'", raconte le journaliste vénézuélien César Bati dans "Courrier international".

De sa vie privée, on ne connaît pas grand-chose si ce n'est qu'il a épousé Cilia Flores, procureure de la République et chaviste dans l'âme, qui défendit Chavez après son arrestation pour son coup d'État manqué, en 1992.

Comme Chavez, cet ancien leader syndical adopte la rhétorique "anti-impérialiste" et encourage les pays du tiers-monde à résister à l’influence des États-Unis et de l’Europe. Il se bat aussi pour renforcer la coopération régionale entre les États d’Amérique latine et apporte son soutien à des régimes controversés comme en Iran, en Libye ou en Syrie.

Maduro, l'adepte de Sai Baba et du Yi Jing

Mais en dépit de son caractère trempé, certains analystes voient en lui un homme modéré et conciliant. Selon "Courrier international", Maduro serait un admirateur du gourou indien Sai Baba, décédé en 2011, et un adepte du Yi-Jing [traité chinois de cosmogonie du premier millénaire avant J.-C.]. D’où cette propension au dialogue et à l’écoute ? "Il n’est pas bruyant verbalement. Il semble être quelqu’un de disposé au dialogue", estime le politologue Ricardo Sucre, "et puis, il est le choix des Castro [Fidel et Raul], grands alliés du président vénézuélien".

Reste à savoir comment évoluera Maduro sur ce nouvel échiquier politique vénézuélien. Car s’il était le choix du président, il n’est en revanche pas le seul à convoiter la magistrature suprême. D’autres personnalités au sein de son propre camp, le PSUV [Parti socialiste unifié du Venezuela] telles que Diosdado Cabello, le président du Congrès, et José Vicente Rangel, le ministre de la Défense, s’intéressent aussi au palais de Miraflores - bien qu’il se soient rangés, pour l’heure, derrière le choix de Chavez.

Surtout, Maduro aura fort à faire face à Henrique Capriles, le leader de l’opposition, qui avait enregistré un score non négligeable lors de la dernière présidentielle. Cette nouvelle élection pourrait être l’occasion rêvée pour Capriles de transformer, enfin, l’essai.