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Free : après la guerre des prix, la guerre des emplois

Un rapport commandé par Free affirme que son irruption dans le monde des forfaits mobiles est bénéfique pour l’emploi en France. Le document ne remet pas pour autant en cause les critiques sur l’impact social négatif dans les télécoms.

L’empire Free contre-attaque. Xavier Niel, PDG d’Iliad - la maison mère de l’opérateur internet et téléphonique - ne compte plus laisser dire impunément que son arrivée sur le marché des forfaits mobiles est néfaste pour l’emploi en France. Pour tordre le cou à ce discours, relayé y compris dans les plus hautes sphères de l’État, Free a commandé un rapport sur “l’impact macroéconomique de l’attribution de la quatrième licence mobile" à Free en 2010.

Le résultat de cette étude, publiée lundi 19 novembre par le site du quotidien économique "Les Échos", a dû combler de bonheur Xavier Niel : l’irruption de Free dans le monde très fermé des Orange, SFR et autre Bouygues serait en fait une aubaine pour l’emploi. À court terme, le forfait low-cost introduit par le trublion du mobile en janvier 2012 devrait créer entre 16 000 et 30 000 postes selon les deux économistes responsables de ces recherches. À plus long terme, le jackpot pour l’emploi dépasserait, d’après eux, largement les 30 000.

Pour donner à ce travail tout le vernis de respectabilité possible, Free a mandaté pour l’écrire un membre du Conseil d’analyse économique et professeur à HEC, David Thesmar, et un économiste de l’École d’économie de Toulouse, Augustin Landier.

Ces deux membres de la jeune garde du mouvement libéral français semblent même s’étonner que la question de l’impact sur l’emploi de Free Mobile fasse débat. Pour eux, l’équation est claire : la pression vers le bas sur les prix des forfaits exercée par l’opérateur à bas coût permettrait aux consommateurs d’économiser plus de 1,7 milliard d’euros par an. Une manne financière qui servirait à faire d’autres dépenses nourrissant ainsi l’économie française et créant donc indirectement plus d’emplois que Free n’en détruit. Du travail en plus qui ne se trouverait pas forcément dans le secteur des télécoms.

Jeu de massacre social

Ce rapport ne conteste pas que l’arrivée de Free a entraîné des turbulences sociales chez SFR, Bouygues & Co. C’est le principal reproche fait à l’opérateur à bas coût. "Casser les prix peut sembler de bonne guerre, mais cela a eu pour conséquence deux plans sociaux annoncés chez SFR et Bouygues, des destructions d’emplois dans la sous-traitance, la précarisation des travailleurs chez Free, les délocalisations accélérées dans les centres d’appels, l’aggravation des difficultés d’Alcatel”, a ainsi affirmé Arnaud Montebourg, ministre du Redressement productif, la semaine dernière dans une interview accordée à l’hebdomadaire "L’Usine nouvelle".

L’ampleur de ce jeu de massacre social dans les télécoms fait en revanche débat. Les autres opérateurs téléphoniques, l’Arcep (Autorité de régulation des communications électroniques et des postes) ou encore certains économistes comme Bruno Deffains, professeur d’économie à l’université Panthéon-Assas, ne sont pas d’accord sur les chiffres. Les estimations varient entre 10 000 à 55 000 emplois menacés par l’arrivée de Free dans l’univers mobile.

Reste que cette polémique sur l’emploi créé ou détruit par Free montre combien un an après son arrivée sur le marché, l’opérateur continue à être au centre du débat. Normal : lors de la présentation, le 14 novembre, de ses résultats financiers pour le troisième trimestre 2012, Iliad a annoncé qu’il avait gagné 805 000 nouveaux abonnés mobiles et comptait désormais 4,4 millions de clients Free Mobile. L’opérateur a ainsi doublé son parc en six mois. Un succès qui doit énerver la concurrence où la progression des abonnements est bien plus faible (entre 11 000 en plus pour Bouygues et 320 000 pour Orange).