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La Cour de cassation a annulé le non-lieu prononcé au profit de deux policiers poursuivis pour la mort de Zyed Benna et Bouna Traoré, en 2005 à Clichy-sous-Bois. Un drame qui avait déclenché une vague de violences dans les banlieues françaises.

La Cour de cassation a annulé mercredi le non-lieu qui avait été prononcé en avril 2011 en faveur de deux policiers poursuivis pour la mort de Zyed et Bouna à Clichy-sous-Bois, deux adolescents dont le tragique accident avait déclenché les émeutes en banlieue parisienne en 2005.

Cette décision ouvre la voie à un nouveau procès, relançant donc le dossier sept ans quasiment jour pour jour après la mort de Zyed Benna, 17 ans, et Bouna Traoré, 15 ans, dans le transformateur électrique où ils s’étaient réfugiés, le 27 octobre 2005.
Leur mort avait été le détonateur de trois semaines de violences urbaines qui s'étaient étendues à l'ensemble des banlieues françaises. Près de 300 bâtiments et 10 000 véhicules avaient été incendiés, et 130 policiers et émeutiers blessés. Un événement inédit en France.
Un non-lieu qui ne répond pas à l’argumentation des parties civiles
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Jean-Pierre Mignard, avocat de Zyed et Bouna
Mort de Zyed et Bouna : annulation du non-lieu en faveur des policiers

Suivant les réquisitions du parquet général qui estimait que les deux policiers n'avaient pas eu connaissance de la réalité du danger, la cour d'appel de Paris avait prononcé un non-lieu en avril 2011.

Mais la Cour de cassation, plus haute juridiction française, a estimé que la cour d'appel de Paris n'a pas répondu à l'argumentation des parties civiles selon laquelle les policiers n'avaient aucune certitude que les jeunes ne se trouvaient pas sur le site EDF.
Une phrase, prononcée par l'un des policiers lors des échanges radio le soir des faits, s'est notamment retrouvée au cœur des débats lors de l'audience du 3 octobre dernier : "S'ils rentrent sur le site EDF, je ne donne pas cher de leur peau."
L'avocat général s'était prononcé pour la confirmation du non-lieu, estimant que les fonctionnaires avaient "bien connaissance d'un danger, mais pas d'un péril imminent" et que l'on ne peut pas renvoyer les policiers devant le tribunal correctionnel sur "des suppositions aussi vagues et des hypothèses".
Pour l'avocat des familles devant la Cour de cassation, Me Patrice Spinosi, "la seule logique" des fonctionnaires était en revanche d'appréhender les fugitifs à qui aucune infraction n'était reprochée. Selon lui, "à aucun moment (...) les forces de police n'ont cherché à avertir les enfants du risque".
Une décision qui "redonne confiance en la justice"
Renvoyée devant la cour d’appel de Rennes pour être rejugée, l’affaire devrait désormais déboucher sur un procès en correctionnelle des deux policiers pour non-assistance à personne en danger.    
"Cela donne de l’espoir à la famille qui attend ce jour depuis sept ans", a déclaré à FRANCE 24 Mohamed Mechmache, président du collectif Aclefeu. "Le combat n’est pas fini et nous attendons le procès ; mais au moins cette décision de la Cour de cassation va redonner aux jeunes des quartiers un peu d’espoir dans la justice. Le non-lieu, c’était comme nier les faits", poursuit M. Mechmache.
Pour les familles, c’est un véritable soulagement. J"'ai eu Siyakha Traoré [frère aîné de Bouna, ndlr] au téléphone, il en avait les larmes aux yeux", confie M. Mechmache.
"Tout le monde a besoin de ce procès, nous les familles, les Clichois, tout le monde", avait récemment déclaré à l’AFP Siyakha Traoré. Il ne demandait "pas la lune", mais "que la justice passe".