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L'Ukraine élit son Parlement sur fond de corruption et de suspicion de fraudes

Les Ukrainiens sont appelés à renouveler leurs 450 députés, ce dimanche, au cours de législatives scrutées de près par les observateurs étrangers, sur fond de craintes de fraudes. Le parti du président Viktor Ianoukovitch est donné favori.

L'Ukraine élit son Parlement, dimanche, au cours de législatives observées de près par l'Occident, sur fond de craintes de fraudes électorales. Ce scrutin, qui devrait voir arriver en tête le parti au pouvoir, fait toutefois face à une opposition tenace qui a juré de combattre la corruption et le Parti des régions (le parti du président Ianoukovitch) qu’elle présente comme l’incarnation de la dérive autoritaire du pays.

Les dirigeants de l’opposition affirment, en effet, que la corruption et le favoritisme se sont propagés sous le mandat de Ianoukovitch, au grand bénéfice des industriels qui le soutiennent et des membres de "La Famille", le surnom du clan formé par ses proches.

Au pouvoir depuis deux ans et demi, le président ukrainien promet, au contraire, que la lutte contre la corruption dans les sphères du pouvoir est sa principale priorité.

Un scrutin entaché de fraudes ?

Le déroulement du scrutin est surveillé par 3 800 observateurs étrangers et 240 000 scrutateurs locaux. Mais tous ces contrôles n’empêcheront pas de nombreuses fraudes électorales, estime Gulliver Cragg, le correspondant de FRANCE 24 à Kiev, qui rappelle "qu’avec un poids lourd de l’opposition en prison [Ioulia Timochenko] et un paysage médiatique presque entièrement dominé par le parti au pouvoir, ces élections laissent vraiment à désirer".

L’opposition est, en effet, affaiblie par l’incarcération de l’une de ses principales figures de proue, Ioulia Timochenko, figure de la Révolution orange de 2004-2005 puis Premier ministre, désormais condamnée à sept ans de prison pour abus de pouvoir. Depuis le centre pénitentiaire où elle est incarcérée, l’opposante a lancé un vibrant appel à ses compatriotes pour qu’ils chassent Viktor Ianoukovitch.

"Si, grâce à votre vote, Ianoukovitch survit politiquement lors de ces élections, il établira une dictature et ne cédera plus jamais le pouvoir par des voies pacifiques", a-t-elle déclaré dans un communiqué lu par sa fille Ievguenia.

De nombreuses anomalies ont également été relevées dans les différents bureaux de vote du pays. "Les ONG ont remarqué de nombreuses violations : pression sur les élections, tentatives d’achat de voix…", ajoute Gulliver Cragg. "On note même des situations curieuses comme celle d’un bureau de vote dans lequel un panneau placé au dessus d’un isoloir indique ‘Vidéo surveillance’. C’est une manœuvre subtile pour insuffler le doute dans l’esprit de l’électeur."

Une opposition morcelée

Les derniers sondages placent en tête des intentions de vote le Parti des régions, autour de 23 %. L’Alliance démocratique ukrainienne pour la réforme, l’ancien parti créé par Vitali Klitschko, dont l’acronyme, Udar, signifie "coup de poing", se classe deuxième, avec un score proche de 16 %, devant L’Opposition unie (15 %), l’alliance formée autour de Batkivchtchina (Mère-patrie), le parti de Ioulia Timochenko.

L’Opposition unie a vainement tenté d’enrôler le parti de Vitali Klitschko, mais le boxeur poids-lourd, vainqueur par K-O de 41 des 45 combats qu’il a remportés dans sa carrière professionnelle, a préféré partir seul. Certains opposants voient dans son refus un possible rapprochement post-électoral avec le Parti des régions. Au total, 22 partis ou blocs politiques sont en lice.

Une moitié des 450 sièges du Parlement monocaméral en jeu dimanche sera attribuée à la proportionnelle, avec un seuil de représentation au Parlement fixé à 5 %. L’autre moitié sera pourvue au scrutin majoritaire uninominal par circonscription, où sera proclamé vainqueur le candidat arrivé en tête avec au moins 30 % des suffrages exprimés.

Au classement mondial établi en 2011 par l’organisation Transparency International, l’Ukraine pointe au 152e rang sur 183. Le cabinet Ernst & Young la considère pour sa part comme l'une des trois nations les plus corrompues de la planète, avec la Colombie et le Brésil.