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Affaire Merah : le rapport de la police des polices accable le renseignement intérieur

Commandé par le ministre de l’Intérieur Manuel Valls, le document pointe les ratés de la DCRI qui n’a pas suffisamment surveillé le tueur toulousain en raison d’une mauvaise appréciation de la menace qu’il représentait.

Le rapport sur l'affaire Merah, commandé par le ministre de l’Intérieur Manuel Valls, rendu public ce mardi 24 octobre, met en exergue "plusieurs défaillances objectives", notamment le loupé du Renseignement dans l'évaluation de la dangerosité du tueur au scooter.

Dans ce document de 17 pages, les deux rapporteurs de l'Inspection générale de la police nationale (IGPN, la police des polices), Guy Desprats et Jérôme Léonnet, critiquent moins le siège de l’appartement de Mohamed Merah que le raté de l’évaluation de la dangerosité du tueur.

En effet, plusieurs indices tendent à prouver que le renseignement intérieur (DCRI) a failli à plusieurs reprises dans sa traque du jeune tueur. Ainsi, on apprend que la fiche de surveillance de Merah a été désactivée de manière "inopportune" en 2010... alors même que Merah était considéré, depuis 2006, comme un suspect gravitant autour de la mouvance salafiste toulousaine.

Contrôlé en Afghanistan en 2010, le jeune Toulousain aurait dû devenir un centre d’intérêt de premier choix pour la DCRI. Mais son "debriefing", le 14 novembre 2011, est raté, selon le rapport. Il n'est plus surveillé en janvier 2012. Pendant le siège de son appartement, lors de ses échanges avec un agent de la DCRI, Merah s'amusera d’ailleurs de ce loupé.

Autre défaillance dont a pu profiter Merah, selon l'IGPN : le manque de fluidité dans le partage des informations entre services. Ainsi, quand une femme se plaint, en juin 2010, que Merah a montré à son fils des vidéos de décapitation, l'information ne remonte pas à la DCRI. Merah s'est "ré-islamisé" en prison en février 2008, mais cet élément, qui aurait pu déclencher l'alarme, ne sera connu qu'à la mi-2011.

Squarcini, l'ancien chef de la DCRI, n'a pas été entendu

De même, le départ de Merah au Pakistan depuis Roissy, le 19 août 2011, passe inaperçu : le jeune homme choisit de faire une escale à Oman, qui ne fait pas partie des 31 destinations sensibles surveillées de près par les services.

Quelques point positifs apparaissent toutefois dans le rapport : l'action du RAID. Quoique critiquée pour une série de défaillances concernant la surveillance de l’appartement du tueur, l'unité d'élite de la police est saluée par le document. Son "choix tactique", notamment celui d'interpeller l'assassin chez lui plutôt qu'à l'extérieur, "paraît cohérent", soulignent les rapporteurs.

Interrogé par l'AFP, l'ancien patron de la DCRI a répondu qu'il réservait ses observations à la justice et affirmé qu'il ne mettait "pas en cause l'impartialité" des rapporteurs, relevant toutefois qu'ils ne l'avaient "pas entendu".

Au vu de ce raté, les rapporteurs souhaitent mettre en place de nouvelles méthodes pour les services de renseignement. L'essentiel de ce travail de fond devrait porter sur une meilleure détection de ces candidats au djihad. 

Les enquêteurs souhaitent également que soit établi "un cadre juridique" permettant de suivre de près les sites islamistes dont la consultation a pesé dans "la formation et (...) l'endoctrinement de Merah". Le rapport prévoit, enfin, la création d'une structure dédiée au pilotage des services territoriaux, le développement d'une structure d'audit interne, la formalisation des entretiens de prévention-dissuasion et le recours à des experts extérieurs.

FRANCE 24 avec dépêches