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Affaire Armstrong : l'Union cycliste internationale et Nike au banc des accusés

Un coéquipier de Lance Armstrong ainsi qu'un ancien directeur de l'Agence mondiale antidopage accusent l'Union cycliste internationale d’une complaisance vis-à-vis des pratiques du champion. La marque Nike est aussi critiquée pour le soutenir.

Une semaine après la parution du rapport de l’Agence américaine antidopage (USADA) sur les méthodes de dopage utilisées par Lance Armstrong, l’Union cycliste internationale (UCI) est sous le feu des critiques.

Le document de plus de 1.000 pages démontre que le champion américain et son directeur sportif, Johan Bruyneel, profitaient de protection voire de complicité en haut-lieu. Ils étaient en effet au courant des horaires des contrôles antidopage de leur équipe.

Une ordonnance antidatée

Dans une interview accordée à CNN, Tyler Hamilton, qui avait épaulé Lance Armstrong lors de ses trois premières victoires sur le Tour de France (1999, 2000, 2001), parle lui aussi de la complaisance de l’UCI.

Selon cet ancien coureur, la fédération internationale était au courant qu’Armstrong les avait manipulés après un contrôle positif aux corticostéroïdes pendant la Grande boucle de 1999. Il avait fourni une ordonnance antidatée de cortisone pour échapper à la sanction.

"L’UCI savait ce qu'il s’était passé, ils ont laissé passer cette prescription antidatée", explique Tyler Hamilton.

Pour Richard Pound, l’ancien directeur de l’Agence mondiale antidopage (AMA), il est également évident que l’UCI a délibérément choisi de ne pas agir. "Ce n'est pas crédible de dire qu'ils ne savaient pas ce qu'il se passait. Je me suis plaint auprès de l'UCI pendant des années", affirme-t-il dans un entretien à l’AFP.

Richard Pound raconte que les contrôles étaient beaucoup trop laxistes : "La course partait à 13h00 ou 14h00 et aucun test n'était effectué avant pour voir s'ils étaient chargés."

Autre détail troublant selon lui, les coureurs avaient le droit à une heure sans surveillance après la course : "Il suffisait alors d'une solution saline ou d'un autre moyen de cacher les effets de l'EPO ou de quelqu'autre substance dopante, explique-t-il. C'est à se demander si les contrôles n'étaient pas délibérément voués à l'échec."

Pourquoi l’UCI n’a-t-elle rien fait ?

Suite aux révélations du rapport de l’USADA, le journal britannique "The Guardian" s’interroge aussi sur les responsabilités de la fédération dans un éditorial particulièrement offensif : "Pourquoi l’UCI était-elle si inutile ? Faisait-elle preuve de naïveté, d’incompétence ou de complicité ?"

Le quotidien rappelle avec ironie que l’instance internationale avait même accepté un don de 125.000 dollars (96.000 euros) de Lance Armstrong pour l’aider dans ses recherches anti-dopage.

"The Guardian" blâme également Nike, l’un des sponsors principaux de Lance Armstrong, qui soutient toujours l’ancien cycliste.

"Pourquoi la plus grande marque mondiale de vêtements de sport veut continuer à être associé à un homme qui est au centre de la plus grande fraude sportive de tous les temps ? (…) Est-ce que les jeunes sportifs devraient suivre l’exemple d’Armstrong ? Mentir, tyranniser, se doper et tricher pour être au top? ", questionne le journal.

"Je fais ce que je veux de mon corps"

"Le Daily Mail" n’épargne pas non plus la marque américaine. Le quotidien anglais se moque de plusieurs publicités glorifiant les performances de Lance Armstrong.

Dans un spot de 2001, Nike met notamment en scène le coureur à l’entraînement. "Ceci est mon corps et je peux lui faire ce que je veux (…) Tout le monde veut savoir à quoi je tourne ? Je suis sur mon vélo à travailler dur six heures par jour", explique le coureur, filmé avec une aiguille dans le bras lors d’un contrôle.

Dans une seconde publicité de 2009, Lance Armstrong se déclare une nouvelle fois innocent : “Les critiques disent que je suis un arrogant, un dopé, un fraudeur. (…) Ils peuvent dire ce qu’ils veulent. Je ne suis pas de retour sur mon vélo pour eux. "

À la lumière des dernières accusations qui pèsent sur Armstrong, ces déclarations publicitaires ont une saveur toute particulière. Pourtant, Nike a une nouvelle fois volé au secours de son champion en réaffirmant la semaine dernière son appui au sportif.

"Lance a déclaré son innocence et a été inébranlable sur cette position. Nike envisage de continuer à soutenir Lance et sa fondation, qu’il a créée pour servir les survivants du cancer", affirme la marque dans un communiqué.

Alors que Nike risque seulement de voir son image ternie par ses liens avec le champion déchu, l’UCI pourrait être ébranlée plus fortement par le rapport de l’USADA.

De nombreuses personnalités du cycliste, comme l'ancien coureur David Millar, demandent aujourd’hui la démission du président de l’UCI, Patrick McQuaid, ainsi que celle du président honoraire, Hein Verbruggen, accusé d’avoir couvert à l’époque le système de dopage de Lance Armstrong.