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Présentée au festival du Printemps de septembre, à Toulouse, une œuvre d'art représentant des versets coraniques projetés sur le sol a provoqué la colère de musulmans. L’installation a été retirée en signe d’apaisement.

En projetant son œuvre sur le Pont-Neuf de la Ville rose dans le cadre du festival du Printemps de septembre, l’artiste Mounir Fatmi ne s’attendait pas à une réaction aussi vive de la part de la communauté musulmane. Des cercles de lumière figurant des versets coraniques qui habillaient, mardi 3 octobre, le sol toulousain, ont, en effet, été retirés à la suite des protestations de musulmans.

Jugée blasphématoire par certains, l’œuvre, baptisée "Technologia", est inspirée des "rotoreliefs" de Marcel Duchamp et présente des versets calligraphiés du Coran et des hadiths (paroles) du prophète Mahomet.

"On met le Coran par terre, c'est vraiment pas faisable", s'emporte Charaza Boumzaa, interrogée par l'AFP. Cette jeune femme de 23 ans affirme avoir été la première à se rendre compte à sa sortie du travail de ce qu'elle a appelé un "blasphème". "Les gens marchaient dessus, crachaient dessus. On leur expliquait gentiment, on leur disait que c'est notre religion, ils nous répondaient : 'On s'en fout'", s’indigne-t-elle.

Après le déclenchement inopiné de l’installation artistique, des dizaines de personnes se sont rassemblées, mardi, et ont empêché les passants de fouler le sol recouvert des projections sacrées. Une jeune femme ayant mis le pied sur les versets a également été giflée.

Aucune volonté de provocation

En réaction, l’artiste s’est défendu de toute provocation. "Mon but, ce n'est ni de choquer, ni de provoquer", a expliqué Mounir Fatmi, de nationalité marocaine, précisant que son intention était de s'approprier personnellement l'héritage islamique.

Étant donné que "les conditions d'exposition de ma pièce ne sont pas réunies et qu'elles nuisent à sa lisibilité - et surtout à sa compréhension -, je préfère la suspendre", a-t-il poursuivi. Prévue pour être exposée lors de deux week-ends, l’œuvre se serait déclenchée de façon intempestive mardi soir, alors que le dispositif de sécurité nécessaire n’était pas en place.

L’artiste, dont les œuvres ont déjà suscité la polémique ailleurs, souligne tout de même que l'œuvre contestée appartient au Musée d'art moderne de Doha, au Qatar. "À quelques kilomètres de l'Arabie saoudite, ça n'a pas choqué. Que ça choque à Toulouse, je suis vraiment consterné, je ne comprends pas vraiment", a-t-il déclaré. Une autre de ses pièces, qui consiste en une projection sur la façade de l’Hôtel-Dieu, est en revanche maintenue.

Contacté par FRANCE 24, le directeur du festival, Régis Durand, a fait part, quant à lui, de son souci d’apaisement : "Nous sommes déçus d’avoir dû retirer l’œuvre mais, étant confrontés à une situation violente, nous ne voulions pas aggraver la situation."

Malentendu

Pour le vice-président de l'Association musulmane de Toulouse, Hassan Idmiloud, joint par FRANCE 24, cette situation est le fruit d’un malentendu. "L’œuvre a été victime d’une erreur technique : le week-end dernier, elle avait été exposée mais l’accès au périmètre avait été bloqué. Ce qu’il s’est passé mardi soir est un accident", précise l‘homme qui ajoute que des excuses ont été présentées à la jeune femme giflée.

"C’est toujours dommage de retirer une œuvre d’art, poursuit-il. Actuellement, la situation est tendue après l’affaire Mohamed Merah [qui avait eu lieu dans la région toulousaine, en mars dernier, NDLR]", analyse le vice-président qui veut véhiculer un message d’apaisement. "On ne peut pas rejeter toute la faute sur la religion, il y a aussi une forte crise identitaire chez les musulmans. Ceux qui ont réagi n’ont pas vu, au premier abord, qu’il s’agissait d’un hommage à l’islam et non pas d’une insulte."

Tags: France, Islam, Culture,