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American Airlines dans le collimateur des passagers et des pilotes

Une tribune assassine contre American Airlines a été publiée dans le "New York Times" par l’écrivain Gary Shteyngart. Alors que la compagnie lutte pour sa survie, ce témoignage tombe à point nommé pour les pilotes en guerre contre la direction.

“Toi, American Airlines, ne devrais plus faire de vols transatlantiques. Tu n'as pas le savoir-faire. Tu n'as pas l'équipement. Et tes employés ont clairement perdu tout intérêt dans tes opérations”. C’est par ces phrases que débutent une violente charge de l’écrivain américain Gary Shteyngart,  parue samedi 29 septembre dans le New York Times, contre la compagnie aérienne la plus connue des États-Unis

L’auteur raconte dans cette lettre ouverte aux responsables de "ce qui fut un jour une grande compagnie aérienne” son vol “kafkaien” entre Paris et New York. Un calvaire de 30 heures en compagnie d’un personnel composé, au choix, de “martiens” que personne ne comprenait ou d’employés qui répondaient sur un ton blasé peu à même de rassurer des passagers inquiets pour leur sécurité.

L’avion en lui-même, d’après le récit du romancier, n’avait en effet rien pour inspirer confiance. “L’un des compartiments à bagages était fermé avec du gaffeur”, raconte Gary Shteyngart. Surtout, en plein milieu de l’Atlantique, les pilotes ont décidé de changer de direction pour mettre le cap sur Londres car l'"altimètre ne fonctionnait pas”. La compagnie aérienne a confirmé, par la suite, que cet avion “avait dû être dérouté vers London Heathrow à cause d’un problème mécanique”, selon l’un des porte-paroles cité par le quotidien économique "Les Échos".

Des récits en veux-tu, en voilà

Ce récit qui conclut au risque d'"effondrement de l’empire” American Airlines (AA) n’est pas un tir isolé contre la compagnie. Le journaliste économique pour le site Slate et co-auteur du blog MoneyBox, Matthew Yglesias, affirme également que basé sur son expérience “il faut arrêter de prendre des vols American Airlines”. Il relate, lundi 1er octobre, une mésaventure alors qu’il tentait de rallier Tulsa (Oklahoma) à Baltimore (Maryland). Son vol a eu plus d’une heure de retard car “le gyroscope de secours était cassé”. Le journaliste reconnaît que l'anectode est peu impressionnante, mais qu'elle démontrerait une "banalisation des retards et des problèmes" sur AA.

Deux autres vols intérieurs d’American Airlines avaient dû, samedi et lundi, effectuer des atterrissages en urgence car une rangée de sièges menaçait de se détacher, rappelle "Les Échos".

Des expériences qui, mises bout à bout, donne une visibilité de ce qui se passe dans les coulisses d'American Airlines depuis la fin de l’année dernière. La holding AMR, maison mère d’AA, avait annoncé, le 29 novembre, la mise en faillite de la compagnie. Le plan de redressement initié a mis sérieusement à mal le climat social au sein du groupe. American Airlines avait, en effet, annoncé début février son intention de supprimer 13 000 emplois. Le groupe a, en outre, entamé un bras de fer avec les syndicats pour renégocier les conditions de travail et les salaires.

Guérilla des pilotes

Les pilotes opposent la plus forte résistance à une éventuelle baisse de leur salaire. Depuis une décision, le 6 septembre, du tribunal américain des faillites qui permet à AMR d’imposer ses conditions aux pilotes, ces derniers semblent avoir entamé une guérilla aérienne contre leur direction.

Augmentation des congés maladie et mutliplication des retards et annulations de vols pour cause de problèmes techniques relevés par les pilotes seraient les principales armes utilisées dans cette guerre des nerfs selon le "New York Times" du 26 septembre. Le célèbre quotidien américain relève que depuis début septembre, moins de 60 % des vols American Airlines arrivent à l’heure, soit bien en deçà de la moyenne auparavant (80 % de ponctualité).

“Normalement, on ignore les petits problèmes techniques mineurs qui peuvent être gérés à l’atterrissage, alors que là, les pilotes notent et remontent tout, ce qui entraînent des retards à répétition”, explique au quotidien "Dallas News", un ancien pilote d’American Airlines sous couvert d’anonymat. Le syndicat Allied Pilots Association (APA) conteste, cependant, cette version de l’histoire : “la liste des problèmes de maintenance non résolus s'allonge chaque jour sur les appareils vieillissants que nous utilisons, et nous ne pouvons (les) ignorer”, ont-il affirmé dans un communiqué cité par "Les Échos".

Cet excès de zèle des pilotes s’explique, en outre, par la volonté des syndicats de voir se réaliser une fusion entre American Airlines et US Airways. Cette possibilité est évoquée depuis le 28 août, date à laquelle les deux compagnies ont débuté des discussions en vue d’un éventuel rapprochement. Une option à laquelle ne veut pas se résoudre la direction d’American Airlines car “cela aurait pour conséquence de mettre la plupart des responsables de la compagnie au chômage”, assure Richard Aboulafia, spécialiste de l’aéronautique au cabinet américain d’analyses Teal Group.