Des milliers de personnes ont manifesté ce dimanche dans les rues de Paris pour protester contre la politique d’austérité et le traité budgétaire européen. Avec, pour mot d’ordre, "Pour une Europe solidaire, non au traité de l’austérité". Reportage.
Une marée rouge a de nouveau envahi, dimanche 30 septembre, les rues parisiennes. Drapeaux du Parti communiste, du Front de gauche, de la CGT, un Jean-Luc Mélenchon en grande forme, des milliers de personnes hurlant "Résistance !"… Un peu plus et on se serait cru revenu six mois en arrière, en pleine campagne présidentielle. Mais sous le soleil de cette journée d’automne à Paris, c’est contre les politiques d’austérité et le traité budgétaire européen - dont les députés doivent commencer l’examen mardi - qu’une soixantaine d’organisations de l’Hexagone ont appelé à manifester.
En tête de la marche : Jean-Luc Mélenchon, le candidat du Front de gauche à la dernière élection présidentielle, aux côtés, entre autres, de Pierre Laurent, numéro un du Parti communiste, d’Olivier Besancenot, ex-porte-parole du Nouveau parti anticapitaliste (NPA), et d’André Chassaigne, le président du groupe de la Gauche démocrate et républicaine à l’Assemblée nationale. C’est la première fois depuis l’arrivée au pouvoir des socialistes que l’aile gauche de la gauche manifeste.
"Ce jour est le jour où le peuple français entre en mouvement contre la politique d'austérité", martèle Mélenchon, accueilli en rock star par les militants qui brandissent leurs appareils photos et leurs téléphones pour immortaliser le charismatique leader du Front de gauche. "Pour lui [Hollande, NDLR], le traité, c’était une formalité, c’était réglé. Et maintenant, il va prendre conscience du fait que non, en France comme dans le reste de l’Europe, il y a une opposition structurée à ce traité et aux politiques d’austérité", déclare-t-il.
"Non à une Europe de la finance"
Plus loin dans le défilé, les Fralib - du nom de l’usine de fabrication des infusions Lipton et Éléphant, dans les Bouches-du-Rhône, menacée de fermeture - se sont mobilisés en masse, derrière une large banderole "Unilever doit payer". L’ambiance est grave mais combattive : "L’Éléphant est français, en Provence il va rester !", scandent les employés. Et de chaque côté de la rue alors que passe leur cortège, des applaudissements fusent, des "Courage !", "On est avec vous", "Ne lâchez rien !" parviennent à arracher quelques sourires aux salariés, sous leurs panneaux aux couleurs de leur usine.
Marie-Ange, militante du Front de gauche venue de Limoges en car, s’insurge. "C’est ce contre quoi je lutte ! Je dis non à une Europe des banquiers et de la finance, explique-t-elle. Ce traité budgétaire européen, c’est la toute puissance des financiers et je n’en veux pas. Il y a des mouvements de contestation partout en Europe. Les gouvernements et Bruxelles vont bien, à un moment donné, devoir prendre en compte l’opinion de la rue !"
Noé, 24 ans, s’est spécialement déplacé de Toulon pour venir grossir les rangs de la contestation. Le jeune homme assure ne pas être engagé en politique. C’est la première fois qu’il manifeste. Mais face au "tournant catastrophique" que prend, selon lui, la politique, se mobiliser s’est imposé en véritable nécessité. "La politique est soumise à la finance. Ce traité-là a été fait pour conforter le monde de la finance, des banques. C’est ça que je ne supporte pas", affirme-t-il.
Partout dans le cortège, le mot "référendum" revient. Épinglé au revers des vestes, collé sur les arrêts de bus, répété entre les manifestants. "Je suis venue manifester parce que je veux qu’un référendum soit organisé sur le traité budgétaire européen, assure ainsi Sarah, étudiante en psychologie venue de Besançon. Ce n’est pas possible d’imposer un texte aussi important sans demander l’avis du peuple !"
Le traité, adopté en mars dernier par 25 des 27 pays de l’Union européenne dans le but de renforcer la discipline budgétaire, doit être voté par les députés le 9 octobre, puis examiné au Sénat à partir du 10 octobre. Le groupe de la Gauche démocrate et républicaine, qui rassemble à l’Assemblée des députés du Front de gauche et quelques élus écologistes et socialistes, sont hostiles au texte. Mais l’immense majorité du Parti socialiste, les centristes et une large majorité de l’UMP y sont favorables.