Après l’annonce de l’annulation de la hausse des droits de scolarité par la Première ministre Pauline Marois (photo), plusieurs rassemblements ont eu lieu samedi au Québec pour réclamer la gratuité scolaire pour tous.
Après des mois d’intenses mobilisations, d’occupations, d’affrontements avec la police et des milliers d’arrestations, les étudiants ont finalement été entendus. La première femme élue à la tête du Québec le 4 septembre dernier, Pauline Marois, a annoncé jeudi 20 septembre l'annulation de la hausse de 82 % sur sept ans des droits de scolarité prévue par le précédent gouvernement mené par Jean Charest. Désormais, les droits de scolarité seront indexés sur l’inflation. La figure de proue du Parti québécois a également renvoyé aux oubliettes les dispositions de la loi 12 qui encadrait le droit de manifester des étudiants.
"Pauline Marois respecte ainsi des engagements électoraux majeurs dont la réalisation ne dépend pas du bon vouloir des partis d’opposition", saluait le 20 septembre "Le Devoir", qui titrait "Pauline Marois commence en lion". Du côté du mouvement étudiant, l’annonce de l’annulation de la hausse des droits de scolarité a été saluée comme une victoire du mouvement. "Nous ne pouvons que nous réjouir de cette annonce. Cela fait près de deux ans que nous avons amorcé la campagne contre la hausse des frais de scolarité et cette déclaration du nouveau gouvernement est une victoire pour tous les étudiants du Québec qui verront l'accessibilité aux études universitaires maintenue par ce geste", ont déclaré au "Journal L’Avantage" Élaine Laberge et Martine Desjardins, respectivement présidente de la FECQ et présidente de la FEUQ, les deux principales fédérations étudiantes.
Gratuité pure et simple
Pour Léo Bureau-Blouin, ancien président de la FECQ, fraichement élu député, l'indexation sur l'inflation est "un compromis acceptable autant pour les étudiants que pour la société". Un changement radical de discours souligné par Radio-Canada. "Léo Bureau-Blouin croit maintenant que l'indexation est raisonnable et acceptable, alors qu'il défendait le gel des droits de scolarité lorsqu'il était président de la FECQ".
Mais la Coalition large de l’Association pour une solidarité syndicale étudiante (Classe), organisation la plus radicale du mouvement étudiant, ne l’entend pas de cette oreille. Le syndicat étudiant réclame désormais la gratuité pure et simple de la scolarité et a organisé des manifestations samedi 22 septembre un peu partout au Québec.
"Notre but en faisant ces manifestations est de relancer le débat sur la gratuité scolaire, explique au journal "Métro" Jeanne Reynolds, l’une des porte-paroles de la Classe. Beaucoup de gens ignorent que la gratuité n’est pas un choix économique mais politique et que nous pourrions facilement la financer."
"Bien que la hausse des droits de scolarité ait été annulée et la loi 12 abrogée par le nouveau gouvernement de Pauline Marois, les ardeurs de certains manifestants n’ont de toute évidence pas été refroidies", peut-on lire dans les colonnes du "Journal du Québec" qui précise que le défilé de samedi a attiré "plus d’appuis que de complaintes de la part des citoyens, qui semblaient toutefois curieux de les revoir après quelque temps d’absence".
"Le beurre et l'argent du beurre, c'est bien. Une vache, c'est encore mieux"
Ces derniers irréductibles du "printemps érable" n’ont pourtant pas drainé les foules. Les cortèges sont restés plutôt clairsemés. "Etant donné que la grève est terminée et que beaucoup d’étudiants poursuivent des cours de rattrapage intensifs, on ne verra pas la même mobilisation", analyse un autre représentant de la Classe, Jérémie Bedard-Wien dans "The Montreal Gazette". Le "printemps érable" avait commencé le 13 février 2012. Après des mois de manifestations réprimées violemment par les forces de l’ordre, le mouvement a entraîné la chute du gouvernement de Jean Charest.
Reste l’épineuse question du sous-financement des universités québécoises. Dans son éditorial "Les lendemains de la 'victoire' étudiante", Yves Boivert, du journal "La Presse", juge sévèrement les annonces gouvernementales. "Le beurre et l'argent du beurre, c'est bien. Une vache, c'est encore mieux, écrit-il. Pour cette année, ça ne change pas grand-chose: les universités perdent environ 1% de leur budget avec le gel. Mais à terme, c'est-à-dire dans sept ans, ce sont 332 millions de dollars canadiens de plus [soit 261 millions d’euros, ndlr] par année qui allaient arriver comme de l'oxygène dans les universités - 5 à 7 % des budgets. C'est énorme. Qui va compenser ? Les impôts, les taxes ? Va-t-on demander aux profs un gel des salaires ? La magie budgétaire a des limites." Le problème devrait être étudié lors d'un sommet sur l'enseignement supérieur qui doit se tenir prochainement.