Depuis le 16 juin, des manifestants défient le régime d’Omar el-Béchir. Malgré la répression, les opposants appellent à descendre dans la rue ce week-end.
L'annonce, le 18 juin, par le président Omar el-Béchir de la suppression des subventions sur les carburants a provoqué la colère des Soudanais et une intensification des mouvements de protestation. Ceux-ci ont démarré le 16 juin à l'université de Khartoum, motivés par une inflation galopante des prix de l'essence et de la nourriture (+30 % au mois de mai), l'annonce de la réduction des effectifs de la fonction publique et d'une hausse des taxes pour tenter de résorber le déficit budgétaire. En proie à une crise économique et politique, en particulier depuis la baisse de ses revenus pétroliers après l'indépendance du Soudan du Sud, en juillet 2011, le gouvernement impose une cure d'austérité au pays.
Les manifestations se sont rapidement étendues à d'autres endroits de la capitale et du pays. "Après 23 années passées à subir, les Soudanais ont décidé de dire que trop, c'est trop", a affirmé dans un communiqué le mouvement contestataire de jeunes Sudan Change Now. Il affirme que les manifestations déclenchées par la crise économique sont désormais "dirigées contre la dictature" d'Omar el-Béchir qui fêtera, le 1er juillet, ses 23 ans au pouvoir.
Une centaine de manifestants placés en détention
Des centaines d'interpellations ont eu lieu en marge des manifestations pacifiques, violemment réprimées par la police qui a recours aux matraques et aux gaz lacrymogènes. Plusieurs manifestants auraient été maltraités, et "plus d'une centaine sont toujours en détention", a dénoncé l'ONG Human Rights Watch.
Jeudi, une centaine d'avocats, vêtus de leurs robes noires, ont ainsi manifesté à Khartoum et Omdourman pour défendre la liberté d'expression. Les gouvernements britannique et américain ont appelé les forces de sécurité à la retenue : "La crise économique du Soudan ne peut être résolue en arrêtant et en maltraitant les manifestants", a déclaré, mardi, la porte-parole du département d'État américain Victoria Nuland. Des remarques que le président, recherché par la Cour pénale internationale (CPI) pour crimes contre l'humanité au Darfour, a balayées d'un revers de main : "Le Soudan rejette toute intervention dans ses affaires internes", a fait savoir le ministère des Affaires étrangères. Les partis d'opposition ont appelé à soutenir, ce week-end, un mouvement qui touche désormais toutes les couches de la population.
Jusqu’à présent, le président soudanais ne semblait pas ému par ces révoltes qui ne constituent pas, selon lui, une nouvelle étape du Printemps arabe. Mais les choses pourraient commencer à être prises très au sérieux : au Soudan, toutes les révolutions ont commencé par l’université… Le principal exemple est la révolte de 1964, initiée par les étudiants et qui avait provoqué la chute de la dictature militaire.