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Jeudi, lors du premier conseil des ministres de l'ère Hollande, les membres du gouvernement ont signé une charte de déontologie. Objectif : prévenir les conflits d’intérêt et améliorer l’information des citoyens sur l’action gouvernementale.
Jeudi après-midi, dès le début de leur premier conseil des ministres, les membres du gouvernement Ayrault se sont vu distribuer une "charte de déontologie". Un règlement intérieur de la présidence "normale" qu’ils ont été tenus de signer dans la foulée.
Ce texte de deux pages a été rédigé par l’équipe de Laurent Fabius chargée de préparer la première année de gouvernement, puis revu par le président, François Hollande, et le Premier ministre, Jean-Marc Ayrault. Il apparaît comme une réponse directe aux nombreuses polémiques qui ont émaillé le mandat précédent.
Des ministres tenus d’être irréprochables
Les membres du gouvernement, tenus d’être "à l’écoute des citoyens", doivent se consacrer à plein temps à l’exercice de leurs fonctions ministérielles. De ce fait, ils doivent "renoncer aux mandats exécutifs locaux". Ils sont par ailleurs tenus de se prémunir de "tout soupçon d’intérêt privé" et devront donc signer une déclaration d'intérêts rendue publique lors de leur entrée en fonction et "confier la gestion de leur patrimoine mobilier à un intermédiaire agréé". Les cadeaux d'ordre non-privés d’une valeur supérieure à 150 euros devront être remis au service France Domaine. En outre, toute invitation d’un membre du gouvernement pour un séjour privé émanant d’un autre État, de personnes ou d’entreprises en relation directe avec son ministère doit être classée sans suite. Allusion à l’affaire Alliot-Marie, ex-ministre des Affaires étrangères, invitée à passer des vacances en Tunisie par un homme d'affaires proche du clan de Ben Ali, le leader tunisien d'alors.
L’exemplarité comme ligne de conduite
"Seules les dépenses directement liées à l'exercice des fonctions sont prises en charge par l'État", précise même la charte. Les ministres "disposant d'un logement de fonction déclarent l'avantage en nature correspondant". Par ailleurs, ceux disposant de logements sociaux devront les quitter. Le Premier ministre a ainsi annoncé vendredi matin sur France Inter que la nouvelle ministre déléguée à la Justice, Delphine Batho, devra trouver rapidement un nouvel appartement.
Pour leurs déplacements, les membres du gouvernement devront préférer le train si la durée de transport n’excède pas trois heures. Engagement qu’avait déjà pris François Hollande pendant sa campagne. Quand cela est possible, finies les lourdes escortes motocyclistes lors des déplacements en voiture. Ils devront désormais se faire "dans la discrétion et le respect des règles du code de la route". Allusion là encore à un événement de l'équipe de Nicolas Sarkozy : l’escorte de la ministre Nadine Morano avait, en janvier dernier, renversé un piéton. Là encore, ce n’est pas la première fois qu’une nouvelle équipe prend cet engagement. Ces bonnes intentions n'ont pas résisté au rythme infernal des journées de ministre.
Collégialité et solidarité gouvernementale
Oubliées aussi les divisions de ces dix dernières années au sein du Parti socialiste. La bonne entente - de façade du moins - devra être de mise. Concrètement, si "l’expression des points de vue, la confrontation des idées en toute confiance sont nécessaires", une fois la décision prise le "principe de solidarité" sera de mise pour prévenir "le scepticisme des citoyens à l’égard de la crédibilité de l’action politique". Cela dit, la "solidarité gouvernementale" est une règle à peu près aussi vieille que la République. Elle résiste en général mal à l'exercice du pouvoir...
Transparence et accessibilité des données de l'administration
La France poursuit son évolution vers un système équivalent au "Freedom of information act" en vigueur aux États-Unis - une charte prévoyant la possibilité, pour tout citoyen, de demander à consulter les données récoltées par l'administration publique - mais elle en reste encore assez loin. Les décisions gouvernementales devront donc être prises en concertation avec l’ensemble des partenaires institutionnels traditionnels. Mais François Hollande veut aller plus loin. Sans évoquer le concept de "démocratie participative" porté par Ségolène Royal, la charte déontologique appelle au développement de la "consultation du public en utilisant les possibilités offertes par l’internet". Ce qui était jusqu'à présent l’exception en ce qui concerne les projets gouvernementaux, devrait donc devenir la règle. La charte consacre aussi l’open data, appelant à "la mise à disposition gratuite et commode sur internet d’un grand nombre de données publiques". La mission EtaLab, entamée sous Nicolas Sarkozy et François Fillon, devrait donc se poursuivre et même s'accentuer sous François Hollande et Jean-Marc Ayrault.