La défaite de la CDU en Rhénanie-du-Nord-Westphalie lors d'un scrutin régional test, dimanche, fragilise la chancelière. Un revers électoral qui intervient peu avant sa rencontre avec M. Hollande sur le pacte de stabilité européen.
Angela Merkel apparaît fragilisée après le cuisant revers électoral qu'a essuyé son parti, dimanche 13 mai, lors d'un scrutin régional qui a vu le Parti social-démocrate (SPD) se maintenir en Rhénanie-du-Nord-Westphalie. Alors qu’elle doit rencontrer François Hollande mardi 15 mai pour s'entretenir du pacte de stabilité européen, est-elle toujours en position de force pour refuser la renégociation du traité de discipline budgétaire, notamment sur la croissance, préconisée par le tout nouveau président élu ?
itAvec un peu plus de 26 % des voix, les conservateurs de la CDU ont enregistré leur plus faible score depuis 1945 en Rhénanie-du-Nord-Westphalie, l'État régional le plus peuplé d'Allemagne (18 millions d'habitants). La défaite du parti d’Angela Merkel, qui avait axé sa campagne sur l’épargne et la rigueur, sonne comme un avertissement pour la chancelière au pouvoir depuis 2005 et réélue en 2009, dans une région historiquement dominée par la gauche. Les Allemands de Rhénanie-du-Nord-Westphalie, composée des villes influentes Düsseldorf et Cologne, ont voté pour le Parti social-démocrate (39 %), qui devrait former une coalition avec les Verts, stables avec 11,5 % des voix.
La victoire du SPD, qui est opposé à la politique d'austérité de la chancelière, fait suite à l’élection de François Hollande et au rejet de l’austérité par les Grecs dimanche 6 mai. De quoi y voir un rejet de la politique plaidée par Angela Merkel.
Il semblerait qu’elle perde une certaine légitimité, estime le quotidien régional "Hamburger Abendblatt" : "Si en Europe l'impression se répand que Merkel est une chancelière en voie de retrait, son influence et son pouvoir devraient diminuer". Pour la revue économique "Financial Times Deutschland" (FTD), "Merkel doit se faire à un SPD qui prend clairement ses distances" avec la politique d'austérité. "L'adoption du pacte européen budgétaire, qui nécessite les deux tiers des voix (des députés), sera une lourde tâche".
59 % des Allemands opposés aux mesures de croissance
Si les médias allemands sont sceptiques sur sa crédibilité, il est necéssaire de relativiser sa défaite, comme le souligne le quotidien régional français "L'Alsace". Il ne faut pas confondre l’"antimerkalisme" avec l’"antisarkozysme". "Que François Hollande, qui doit dîner demain soir avec elle à Berlin, ne se méprenne pas sur les résultats d'hier en Rhénanie-du-Nord-Westphalie, note l’éditorialiste Patrick Fluckiger. Les électeurs de cette grande région industrielle s'opposent à l'austérité, non pas de façon idéologique comme dans les pays méditerranéens, mais pour demander la fin de la rigueur… chez eux. Ils estiment qu'ils ne sont pas là pour subir les dérives des autres. Attention à ne pas confondre la grogne et le mécontentement des électeurs avec une volonté de changer le cap fondamental de la politique allemande. "
Il semblerait, en effet, que la chancelière jouisse toujours d'une grande popularité personnelle, et les Allemands lui savent gré de promouvoir l'austérité budgétaire pour améliorer la situation d'une zone euro mal en point. Selon un sondage réalisé pour l'hebdomadaire "Stern", 59 % des Allemands sont opposés aux mesures de croissance si elles doivent entraîner de nouvelles dettes.
Merkel croit à un "partenariat stable"
Angela Merkel et François Hollande iront-ils au conflit ? "Le risque d'aller au clash, qui le prend, sinon Mme Merkel, qui anticipe la date de ratification de ce texte par le Parlement allemand et qui demande aux Italiens de faire la même chose ?", a déclaré dimanche Benoît Hamon, le porte-parole du Parti socialiste. La chancelière "ne peut pas décider seule du sort de l'Europe", a-t-il ajouté. "On n'a pas voté pour qu'il y ait une présidente de l'Union européenne qui s'appelle Mme Merkel et qui décide souverainement du sort de tous les autres".
Lundi matin, le ministre allemand des Finances, Wolfgang Schäuble, a rappelé qu’il était impossible de" modifier après des élections des traités sur lesquels nous nous sommes déjà mis d'accord. Comment peut-on modifier un traité qui a déjà été conclu ? Le président Hollande sait que cela ne peut pas se faire", a-t-il indiqué.
Pour sa part, la chancelière, qui avait refusé de rencontrer François Hollande durant la campagne présidentielle et affiché son soutien à Nicolas Sarkozy, reste optimiste. Elle a déclaré samedi, dans son podcast hebdomadaire, qu’elle croyait à "un partenariat stable" avec le nouveau locataire de l’Élysée. Et de préciser : "Nous savons depuis la création de la République fédérale d'Allemagne qu'une bonne relation franco-allemande est tout simplement très importante pour les deux pays".