Cristina Dumitru, une jeune Rom qui étudie à Nantes, vient d’obtenir son titre de séjour. Un précieux sésame qu’elle a reçu juste après avoir remporté le concours de meilleure apprentie de France alors qu’elle était sans-papiers.
Il y a des sésames qui ouvrent bien des portes. Pour Cristina Dumitru, une Roumaine d’origine rom de 18 ans, tout a basculé jeudi 30 mars lorsqu’elle a reçu la médaille d’or de la meilleure apprentie de France. Ce jour-là, elle franchissait les portes du Sénat pour recevoir son prix... tout en étant sur le sol français sans titre de séjour. Le lendemain, elle était convoquée à la préfecture qui lui a délivré le document qu’elle attendait depuis 2005 : le récépissé qui l’informe qu’elle sera titulaire d’une carte de séjour dans trois mois.
Pour elle, le lien entre les deux événements est évident. “A part mon prix de meilleure apprentie de France, rien n’a changé depuis la dernière fois [en février ndlr] où ma demande de carte de séjour a été refusée”, raconte-t-elle à FRANCE 24. D’autant plus évident que l’histoire bégaie : en 2010, déjà, la lauréate de ce concours, Linda Mihai, était une Rom elle aussi en situation irrégulière qui avait reçu son titre de séjour dans la foulée de sa médaille d’or.
Il y a quelque jours seulement, la situation de Cristina Dumitru était en effet des plus précaires. Cette étudiante en CAP vente au lycée Leonard de Vinci à Nantes était en situation irrégulière depuis sa majorité. Cristina Dumitru risquait donc d’être expulsée vers la Roumanie qu’elle a quitté avec sa famille il y a sept ans. Ses demandes pour obtenir un titre de séjour avaient été refusées deux fois au même motif : elle devait fournir un contrat de travail. “Mais je ne pouvais pas avoir de contrat de travail puisque je suis encore étudiante”, explique-t-elle.
Etudiante exemplaire
En parallèle à ses déboires administratifs, Cristina Dumitru suit une scolarité exemplaire. A tel point qu’après avoir obtenu en juin 2011 un CAP pressing, elle est inscrite au concours de meilleur apprenti de France par son lycée. “C'est une jeune femme extrêmement volontaire qui a une envie d'insertion très forte”, a expliqué le 30 mars au "Figaro" Florine Durand, la proviseure de l’établissement nantais. Après son CAP de pressing en juin dernier, le lycée l’autorise à poursuivre sa scolarité par une formation de CAP de vente.
Cristina Dumitru participe au concours et le remporte. Elle est alors invitée au Sénat, symbole fort d’une République qui jusqu’alors lui refuse ses papiers. “C’était très perturbant de me rendre au Sénat dans ma situation, d’autant plus que personne ne savait que j’étais sans-papiers”, se souvient la jeune femme. Avec sa famille, elle profite de la cérémonie pour évoquer sa situation avec les journalistes et les parlementaires présents sur place.
Une offensive qui aura donc porté ses fruits mais laisse Cristina Dumitru un peu sur sa faim. “Evidement que je suis ravie de savoir que j’aurai ma carte de sejour, mais c’est quand même dommage d’avoir été obligée d’attendre de recevoir un prix pour être régularisée”, regrette-t-elle.
Elle espère en outre que son parcours personnel contribuera à tordre le cou aux clichés qui collent à la peau des Roms en France. Une communauté qui avait été stigmatisée dans le célèbre discours prononcé par le président Nicolas Sarkozy à Grenoble en juillet 2010.
Surtout, pour Cristina Dumitru, cette médaille d’or signifie qu’elle pourra continuer à “étudier pour avoir un bac pro force de vente”. Pour elle, le rêve serait parfait si ses parents, toujours sans-papiers, pouvaient décrocher également leur carte de séjour.