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Avec la prise de Tombouctou, la rébellion touareg fait mainmise sur le Nord

Les insurgés annoncent avoir pris le contrôle de Tombouctou, dernière ville du nord du Mali encore tenue par les forces loyalistes. Débordée par l’offensive touareg, la junte au pouvoir a rétabli la Constitution et les institutions républicaines.

La rébellion touareg qui sévit dans le nord du Mali contrôle désormais la quasi totalité de la région. Après s’être emparés de Kidal, vendredi, et de Gao, samedi, les insurgés du Mouvement national pour la libération de l'Azawad (MNLA) affirment avoir pris le contrôle, dimanche 1er avril, deTombouctou, la dernière ville du nord du Mali à se trouver encore sous le contrôle des forces loyalistes.

Selon des témoins contactés par l’AFP, des scènes de pillage ont été constatées en différents endroits de la cité. Un homme aurait par ailleurs été tué par un éclat d'obus à proximité de la grande mosquée, selon un directeur d’école à Tombouctou.

Il y aurait eu cependant peu d’échanges de tirs dans la ville, les rebelles ayant négocié leur entrée avec les milices "arabes" qui la défendent.

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Peu avant cette annonce, la junte au pouvoir au Mali avait annoncé le rétablissement immédiat de la Constitution et des institutions républicaines. "Nous prenons l'engagement solennel de rétablir à compter de ce jour la Constitution de la république du Mali du 25 février 1992, ainsi que les institutions républicaines", a déclaré le chef des putschistes, le capitaine Amadou Sanogo, dans un texte lu à la presse à son quartier général de Kati, en banlieue nord de Bamako, la capitale malienne.

Le capitaine a également déclaré vouloir lancer des "consultations avec les forces vives du pays dans le cadre d'une convention nationale", dans le but de remettre le pouvoir aux civils. Depuis sa garnison, il a également annoncé "la mise en place d'organes de transition en vue de l'organisation d'élections apaisées, libres, ouvertes et démocratiques auxquelles nous ne participerons pas", sans toutefois indiquer la date de leur organisation.

Concert de klaxons

Les équipes de FRANCE 24 au Mali rapportent que cette annonce surprise a été accueillie par des concerts de klaxons à Bamako. "C’est un changement de position radical de la part de la junte", affirme notre envoyée spéciale Melissa Bell, qui précise que, selon la Constitution de 1992, le pouvoir devrait à présent revenir au président de l’Assemblée nationale.

Depuis le coup d’État du 22 mars, qui a renversé le président Amadou Toumani Touré (dit "ATT"), le capitaine Sanogo occupe le pouvoir dans le pays. Mais celui-ci n’est jamais parvenu à s’attirer la bienveillance des pays voisins du Mali, qui n’ont eu de cesse de multiplier les menaces à l’encontre des putschistes. La junte était ainsi sous le coup d’un ultimatum de la Communauté économique des États d'Afrique de l'Ouest (Cédéao), qui lui avait donné jusqu'à ce dimanche minuit pour restituer le pouvoir aux civils, sous peine de se voir infliger un "embargo diplomatique et financier" dès lundi.

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La rébellion touareg au Mali
Avec la prise de Tombouctou, la rébellion touareg fait mainmise sur le Nord

La rébellion a profité de la chute de Kadhafi

S’il s’explique par leur isolement diplomatique, le geste des putschistes est également sans doute lié à leur incapacité à freiner l'avancée des rebelles touareg armés et rompus aux combats dans le désert.

Impuissant, le capitaine Sanogo avait été contraint de lancer un appel à la communauté internationale. "Notre armée a besoin de l'aide des amis du Mali pour sauver la population et l'intégrité territoriale du Mali", avait-t-il déclaré, vendredi.

"La chute de Kadhafi [le défunt dirigeant libyen] a été un moment décisif pour les rebelles, qui ont vu le retour dans le nord du Mali de miliciens touareg lourdement armés", rappelle Pierre Boilley, directeur du Centre d'études des mondes africains (Cemaf). Interrogé par FRANCE 24, le chercheur assure que le coup d’État du 22 mars a été une aubaine pour la rébellion. "Le putsh a engendré une confusion politique à Bamako et a accéléré la désorganisation de l’armée malienne."

Selon lui, le pouvoir malien dispose aujourd’hui d’une marge de manœuvre réduite. "Le moral des troupes est bas et les soldats basés dans le Sud ne veulent plus aller combattre dans le Nord. Le pouvoir va peut-être devoir se résoudre à négocier avec les rebelles", avance-t-il.