logo

Ex-filiale du géant des médias News Corp, la société News Datacom est accusée d'avoir payé des pirates informatiques pour saboter des chaînes payantes concurrentes du groupe médiatique australien, affirment des médias anglo-saxons.

Après les écoutes téléphoniques, les pirates informatiques. Le groupe News Corp se retrouve de nouveau au centre d’un scandale qui a une nouvelle fois pour objet les méthodes utilisées par le géant international des médias.

Cette fois-ci, l’empire de Rupert Murdoch est accusé, aussi bien par la chaîne britannique BBC que par le journal australien The Australian Financial Review, d’avoir payé des pirates informatiques pour saboter les activités de chaînes cryptées payantes concurrentes entre la fin des années 1990 et le début des années 2000.

Au centre de cette nouvelle affaire, une entreprise baptisée News Datacom (NDS) acquise en 2002 par Rupert Murdoch et revendue le 16 mars dernier pour 5 milliards de dollars à Cisco. Spécialiste des systèmes de cryptage pour la télévision payante (comme les cartes de décodeur), NDS aurait, en fait, servi à payer des pirates informatiques chargés de diffuser sur l’Internet les moyens de voir en clair - donc gratuitemement - des chaînes payantes concurrentes à celles de News Corp, explique The Australian Financial Review dans son édition de ce mercredi 28 mars. Un département spécialisé - nommé "Operational Unit" - dans ces activités aurait même été mis en place au sein de la société, dont l'un des responsables, Ray Adams, était l'ancien patron de la police de Londres.

Dans plusieurs pays

Ces agissements auraient fait perdre plus de 50 millions de dollars aux concurrents australiens de News Corp, conclut le quotidien australien qui a mené l'enquête pendant quatre ans, récupérant au passage 14 400 e-mails sur l’ordinateur portable d’un dirigeant de NDS (des e-mails mis à la disposition de tous les internautes à cette adresse). Pire : c’est grâce à ces activités que le géant des médias aurait pu racheter à bas prix certains de ses concurrents australiens qui se sont retrouvés financièrement fragilisés.

Ces accusations font écho à celles formulées dans l’émission d’investigation "Panorama" de la BBC diffusée le 26 mars, elle aussi consacrée à ce nouveau scandale. L’enquête britannique s’intéresse, elle, au mauvais sort de la chaîne payante ITV Digital qui, en 1998, a eu le malheur de se trouver sur le chemin de Sky TV, chaîne du groupe News Corp. La BBC affirme que, là encore, NDS a fait travailler des pirates informatiques pour mettre sur le marché des cartes piratées permettant de regarder les programmes d’ITV Digital gratuitement. “Cette affaire nous a achevés”, explique à la BBC Simon Dore, l’ancien responsable technique d’ITV, qui a cessé d’émettre en 2002.

Ces nouvelles accusations de sabotage numérique ne se bornent pas à l'Australie et au Royaume-Uni. D’après The Australian Financial Review, NDS se serait également attaquée au bouquet satellitaire américain DirectTV et à la chaîne italienne Telepiu (qui appartenait au groupe français Canal Plus). Là encore, le piratage des cartes de cryptage a réduit la valeur financière de ces deux concurrentes rachetées par News Corp en 2002 et 2003.

“Truffé d’erreurs”

L’acquisition de Telepiu a, en outre, permis à News Corp de mettre un terme à une action en justice qui visait les activités de... NDS. Déjà à l’époque, en effet, Vivendi, la maison-mère de Canal Plus, accusait cette société d’avoir fourni à des pirates informatiques des informations sur les méthodes de cryptages utilisées par Telepiu. Dans l’accord d’acquisition de la chaîne italienne, Vivendi assure “que tout contentieux existant entre les parties, y compris (...) entre Canal Plus et NDS, sera suspendu sur le champ et définitivement abandonné à l'issue de la transaction”.

“Si ces allégations sont fondées, ce sont les plus graves à ce jour [contre News Corp, NDLR]”, a commenté mercredi le député travailliste britannique Tom Watson, qui a saisi l’Ofcom, la police britannique des médias afin qu’elle enquête sur cette histoire.

À la suite de la diffusion de "Panorama", NDS a dit n'“avoir jamais été en possession de codes destinés à promouvoir le piratage”. De son côté, News Corp a affirmé, ce mercredi, que l’enquête menée par The Australian Financial Review était “truffée d’erreurs”.