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Le bain de sang continue en Syrie, l'ONU s'inquiète de la situation

Alors que la répression du mouvement de contestation se poursuit au lendemain de la rencontre entre Kofi Annan et Bachar al-Assad à Damas, les membres du Conseil de sécurité de l'ONU déplorent à l'unisson la dégradation de la situation en Syrie.

REUTERS - Le bain de sang s’est poursuivi lundi en Syrie, au lendemain de la mission de l’émissaire spécial de l’Onu et de la Ligue arabe, et les Etats-Unis ont dénoncé au Conseil de sécurité des Nations unies le « cynisme » du président Bachar al Assad.

Quarante-sept femmes et enfants massacrés par le régime à Homs, selon des militants

Au moins 47 corps de femmes et d'enfants ont été retrouvés dans la ville syrienne de Homs (centre), un "massacre" attribué par l'opposition aux forces du régime et par les médias officiels à des "gangs terroristes".

Le Conseil national syrien (CNS), principale formation de l'opposition, a appelé à une "réunion d'urgence" du Conseil de sécurité de l'ONU après ces informations, précisant que le "massacre" avait été perpétré dimanche.

"Les corps d'au moins 26 enfants et 21 femmes ont été retrouvés dans les quartiers de Karm al-Zeitoun et Al-Adawiyé, dont certains égorgés, d'autres poignardés par les chabbiha (milices pro-régime)", a affirmé à l'AFP Hadi Abdallah, militant local de la Commission générale de la révolution syrienne, vidéo à l'appui.

Des dizaines de civils ont été abattus de sang-froid dans la ville rebelle de Homs, au nord de Damas, et les deux camps s’accusent mutuellement de ce massacre.

A Idlib, dans le nord-ouest du pays, l’armée gouvernementale a poursuivi ses attaques contre les insurgés et à Deraa, dans le Sud, une bombe a explosé devant une école, faisant jusqu’à trois morts et une vingtaine de blessés.

Malgré la poursuite des violences, l’émissaire de l’Onu Kofi Annan, qui a rencontré deux fois Assad samedi et dimanche à Damas, a estimé que sa médiation était « sur la bonne voie » tout en notant que le processus n’en était qu’à ses débuts.

Arrivé à Ankara lundi, il a cependant souligné que la communauté internationale devait envoyer « un message clair » à Damas pour faire cesser le massacre « tout simplement inacceptable » des civils.

A Homs, les médias officiels et l’opposition rapportent que plusieurs dizaines de civils ont été tués de sang-froid.

« Les groupes terroristes armés ont enlevé de nombreux civils dans la ville de Homs, dans le centre de la Syrie, les ont tués, ont mutilé leurs corps et les ont filmés pour diffuser les images dans les médias », écrit l’agence de presse officielle Sana.

Des militants d’opposition ont diffusé sur internet des images montrant des cadavres d’hommes, de femmes et d’enfants gisant dans une pièce couverte de sang.

Clinton dénonce le "cynisme" d'Assad

Selon les Comités locaux de coordination, un réseau d’opposants, au moins 45 femmes et enfants ont été poignardés et leurs corps ont été brûlés dans le quartier de Karm al Zeitoun. Ils font état de sept autres personnes tuées dans le quartier de Djobar, près de l’ancien bastion rebelle de Bab Amro, repris début mars par l’armée après un mois de bombardements.

Des activistes contactés à Homs ont accusé des miliciens alaouites fidèles à Assad d’avoir commis ce massacre sous la protection de l’armée régulière.

Les restrictions imposées par les autorités au travail des journalistes rendent difficile la vérification des affirmations des deux camps.

L’agence Sana relève pour sa part que les meurtres de Homs « commis par des groupes terroristes armés et diffusés sur Al Djazira et Arabia (...) coïncident avec la séance aujourd’hui du Conseil de sécurité destinée à prôner une ingérence étrangère en Syrie ».

Lors de cette réunion du Conseil de sécurité, la secrétaire d’Etat américaine, Hillary Clinton, a dénoncé le « cynisme » de Bachar al Assad.

« Nous rejetons toute équivalence entre les meurtres prémédités d’une machine militaire gouvernementale et les actes de civils assiégés qui ne font qu’assurer leur défense », a-t-elle dit.

« Et quelle preuve de cynisme: alors même qu’Assad recevait l’ancien secrétaire général (de l’Onu) Kofi Annan, l’armée syrienne menait une attaque contre Idlib et poursuivait son agression à Hama, Homs et Rastan », a-t-elle ajouté.

Le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, a de son côté fait part de la « grave préoccupation » de son pays face à la détérioration de la situation.

"Il faut agir maintenant", dit Juppé

Le chef de la diplomatie française, Alain Juppé, a évoqué dans son intervention « l’obstination criminelle de gouvernements archaïques ». Il a dénoncé la « fuite en avant » du régime syrien qui « s’enfonce dans une répression toujours plus sanglante, dans une violence toujours plus barbare ».

« (...) les crimes du régime syrien ne sauraient rester impunis. Le jour viendra où les autorités civiles et militaires de ce pays devront répondre de leurs actes devant la justice. Préparons dès à présent les conditions d’une saisine de la Cour pénale internationale », a-t-il ajouté.

« Notre responsabilité c’est d’agir. Et c’est d’agir maintenant pour mettre enfin un terme au martyre du peuple syrien et lui permettre de retrouver la maîtrise de son destin », a poursuivi le ministre français, appelant la Russie et la Chine à « entendre la voix des Arabes et de la conscience mondiale et à se joindre à nous ».

Moscou et Pékin ont opposé à deux reprises leur veto à des projets de résolution sur la Syrie. Le dernier texte rejeté début février appuyait les plans de la Ligue arabe, qui prévoient la mise à l’écart de Bachar al Assad pour favoriser une issue politique à la crise.

Les Etats-Unis ont préparé un nouveau projet, sans grand espoir de le voir adopté.

Le secrétaire général des Nations unies, Ban Ki-moon, a  exhorté le président Assad à passer aux actes dans les « tout  prochains jours » sur les propositions de l’Onu et de la Ligue arabe visant à ramener la paix en Syrie. 

D’après les Nations unies, la répression du mouvement de contestation par les forces syriennes a fait plus de 7.500 morts en un an. Les autorités syriennes évoquent pour leur part plus de 2.000 soldats et policiers tués par des « groupes terroristes ».