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Sans le second plan d’aide internationale débloqué mardi, la Grèce n’aurait pu éviter la faillite, même si, selon l’économiste Pascal de Lima, Athènes est déjà de facto en défaut de paiement.

La Grèce a enfin obtenu ce qu’elle demandait depuis des semaines. Les ministres européens des Finances ont décidé, dans la nuit de lundi à mardi, à Bruxelles lors d’une réunion de l’Eurogroupe, de débloquer le deuxième plan d’aide internationale d’un montant de 130 milliards d’euros dont le principe avait été acté en juillet dernier.

Pour obtenir ce précieux soutien financier, le gouvernement grec a dû concocter, ces dernières semaines, un nouveau plan de rigueur drastique qui a engendré une grève générale les 10 et 11 février et de violents heurts entre manifestants et forces de l’ordre en début de semaine dernière. Athènes a pris le risque de la crise sociale car pour le gouvernement, cette aide financière internationale est vitale : sans elle, le pays n’aurait pas pu rembourser les dettes qui arrivent à échéance à la mi-mars.

Mais pour autant, la Grèce est loin d’être tirée d’affaire comme l’explique à FRANCE 24 Pascal de Lima, économiste à Sciences Po.

FRANCE 24 : Quelle est l’importance pour la Grèce de l’accord qui a permis mardi de débloquer le deuxième plan d’aide international ?
Pascal de Lima : C’est à la fois un accord de la dernière chance et une aide condamnée à être insuffisante. En effet, la Grèce qui est en grave récession ne peut faire autrement que de demander à la communauté internationale de la soutenir financièrement. Elle n’a aucune chance, vu l’état de ses finances publiques, de lever de l’argent sur les marchés financiers. Sa situation économique catastrophique justifie ce nouveau plan de soutien.

Mais même si l’aide est conséquente, elle ne fait que maintenir artificiellement la Grèce à flots. En effet, sans croissance, Athènes n’a pas les rentrées fiscales nécessaires pour espérer équilibrer ses comptes et la dette est donc condamnée à rester élevée.

F24 : Vous parlez de la nécessité de retrouver la croissance, mais les pays de la zone euro ont conditionné le nouveau plan d’aide à davantage d’austérité, n’est-ce pas contradictoire ?
P. de L. : La logique qui a entouré l’adoption de ce plan d’aide est fallacieuse car elle ne tient pas compte des circonstances économiques. Certes, il faut que la Grèce redresse ses comptes, mais les mesures d’austérité sont inefficaces en période de récession. C’est un cercle vicieux qui va simplement conduire à une augmentation des déficits. La question de l’éventuelle faillite grecque va de ce fait se poser de nouveau.

F24 : Pensez-vous que la Grèce peut encore éviter la faillite ?
P. de L. : Je pense que la zone euro devra reconnaître dans les six mois la réalité de la faillite grecque. Athènes est en fait déjà en défaut de paiement. N’oublions pas que les créanciers privés ont accepté d’effacer 100 milliards d’euros sur les 200 milliards d’euros de dettes qu’ils détiennent. Les responsables politiques ont beau utiliser à ce sujet le terme de “restructuration”, il s’agit bel et bien d’un défaut de paiement. Mais les États européens retardent autant que possible le moment où ils devront regarder la réalité de la faillite en face car ils devront alors se demander si une Grèce en faillite peut rester dans l’Union européenne.