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Nicolas Sarkozy a indiqué au "Figaro Magazine" qu’il envisageait d’organiser prochainement deux référendums. Une annonce décriée par le constitutionnaliste Dominique Rousseau, qui fustige "un faux instrument de démocratie".
Associé dans l’imaginaire français au général de Gaulle, le référendum s’est trouvé un nouvel adepte en cette période électorale : Nicolas Sarkozy. Dans un entretien accordé au "Figaro magazine", à paraître le 11 février et dont le journal ‘’Le Monde’’ s’est procuré des extraits, le président français indique qu’il pourrait avoir recours à cette procédure afin de "s'adresser directement au peuple français".
Bien qu’il n’ait encore jamais eu recours au référendum, le chef de l’État dévoile deux questions sociétales qu’il pourrait soumettre à l’approbation des Français : la réforme du système d’indemnisation des chômeurs et le droits des étrangers. Nettement décroché dans les sondages, le président avait récemment promis des "annonces chocs" pour se refaire et imposer ses thèmes dans la campagne.
"Le recours massif au référendum nuit à la démocratie"
Le recours au référendum est un sujet sensible en France, où il est tour à tour présenté comme l’outil démocratique ultime ou comme un vieux réflexe populiste. Interrogé par FRANCE 24, le professeur de droit constitutionnel à Paris-I Dominique Rousseau se range lui parmi les détracteurs de ce qu’il considère comme "un faux instrument de démocratie".
"Le recours massif au référendum nuit à la démocratie en mettant de côté la discussion, la délibération, la prise en compte de la complexité d’un problème. Il constitue pour le pouvoir une manière d’imposer ses opinions en contournant les institutions qui font vivre la démocratie", argumente-t-il.
- 28 septembre 1958 : projet de Constitution de la Ve République.
- 8 janvier 1961 : référendum sur l'autodétermination en Algérie.
- 8 avril 1962 : référendum sur les accords d'Evian.
- 28 octobre 1962 : référendum sur l'élection du président de la République au suffrage universel direct.
- 27 avril 1969 : référendum sur la régionalisation et la transformation du rôle du Sénat. Le non l'emporte avec 52,41% des suffrages.
- 23 avril 1972 : référendum sur l'élargissement de la CEE.
- 6 novembre 1988 : référendum sur l'autodétermination de la Nouvelle-Calédonie.
- 20 septembre 1992 : référendum sur le traité de Maastricht.
- 24 septembre 2000 : référendum sur la réduction de la durée du mandat du président de la République.
- 29 mai 2005 : référendum sur le traité constitutionnel européen. Le non l’emporte avec 54,68 % des suffrages.
Il considère le soudain engouement de Nicolas Sarkozy pour cet outil comme une manœuvre électoraliste, d’autant plus que le chef de l’État n’est pas, en France, habilité à convoquer un référendum. "L’article 11 de la Constitution, modifié par la réforme de 1995, précise qu’il revient au Premier ministre ou aux deux Assemblées [Sénat et Assemblée nationale ndlr] de lancer un référendum. Le président de la République est simplement chargé de donner ou non une suite positive à cette initiative."
"Le prochain référendum, c'est l'élection présidentielle"
Un scepticisme partagé par le directeur général adjoint de l'institut Ifop, Frédéric Dabi, qui reconnaît ne pas avoir été convaincu par "les éléments programmatiques que le chef de l’État a glissé dans son entretien au 'Figaro magazine'". "Le dernier référendum en date en France avait profondément scindé la société", se souvient-t-il. De surcroît, il rappelle que l’issue de celui-ci, le rejet du traité constitutionnel européen, n’avait pas été prise en compte par Nicolas Sarkozy, qui, une fois élu président, avait fait adopter le traité de Lisbonne trois ans après.
Le sondeur est à peine plus clément quant il détaille les thèmes que le président envisage de soumettre au vote des Français. "Dans nos enquêtes d’opinion, ce sont toujours les thématiques économiques qui reviennent comme étant les priorités des Français, et non l’immigration ou les questions sociétales. Si ces fuites sont les principales annonces de l’interview, je doute que Nicolas Sarkozy puisse remonter son retard dans les sondages", commente-t-il.
Il observe que Nicolas Sarkozy semble vouloir baser sa campagne sur "un contact direct avec les Français, en apparaissant au-dessus de la mêlée des médias et des sondages, qu’il accuse de favoriser François Hollande". Le candidat socialiste a profité pour sa part d’un meeting jeudi 9 février à Orléans pour répondre à son très probable futur adversaire : "Le prochain référendum, c'est l'élection présidentielle."