Toujours en lice pour l'investiture républicaine à la présidentielle, Newt Gingrich s’est imposé comme l'un des principaux rivaux de Mitt Romney. Retour sur la carrière et la vie personnelle mouvementées d'un vétéran de la politique américaine.
Newt Gingrich fait figure de vétéran parmi les candidats à l’investiture républicaine. À 67 ans, il a déjà derrière lui une carrière riche en hauts faits et en déconvenues, au point d’avoir été donné pour mort politiquement à de nombreuses reprises. Son plus récent "come-back" remonte au 21 janvier 2011, lorsqu’il surprend en remportant haut la main la primaire républicaine de Caroline du Sud, malgré les résultats très décevants qu’il avait obtenus dans les deux premiers États (Iowa et New Hampshire). Un revirement de plus pour celui dont la vie politique et personnelle n’a cessé d’être émaillée de rebondissements.
Deux fois divorcé
La carrière politique du vieux loup républicain qu’est Newt Gingrich repose sur une détermination qui semble inébranlable depuis ses plus jeunes années. Son père "Big Newt" quitte le foyer familial quand il n’a que trois ans, laissant sa mère, âgée de 17 ans, seule pour l’élever. Celle-ci se remarie avec Bob Gingrich, qui adopte "Little Newtie" mais se montre à peine plus attentionné envers celui qui le qualifiera plus tard de personnage "totalitaire".
Très tôt, le jeune Newt affiche cependant un caractère bien trempé : le Washington Post rapporte qu’à 10 ans il se rend dans la mairie de sa petite ville, en Pennsylvanie, pour demander aux élus d’y construire un zoo. À 15 ans, il accompagne sa famille sur le champ de bataille de Verdun, en France, où il dit avoir puisé la certitude qu’il sera un homme politique, afin d’éviter que se renouvellent de telles atrocités. Devenu lycéen, il tombe amoureux de sa professeure de géométrie, de sept ans plus âgée, et jure de l’épouser. Une promesse qu’il honore deux ans plus tard, à 19 ans, malgré l’opposition de son père adoptif, qui refuse d’assister au mariage.
À peine reçu son doctorat en histoire contemporaine européenne, il embrasse une carrière politique. Après deux tentatives ratées, il est élu au Congrès américain pour la première fois en 1978 et manifeste dès lors son ambition de devenir un jour président de la Chambre des représentants. Son premier divorce, en 1981, ne freine pas celui qui fait figure d’étoile montante de son parti. Il se remarie dans la foulée avec sa maîtresse, de neuf ans sa cadette.
Newt Gingrich explique à la télévision que ses infidélités et ses divorces sont liés à l’amour qu’il porte à son pays
"Il est entendu qu’à des moments de ma vie, partiellement guidé par la passion que j’ai pour mon pays, j’ai trop travaillé et des choses sont arrivées dans ma vie, qui ne sont pas appropriées."
Un président de la Chambre des représentants inflexible
En 1995, c’est la consécration. Newt Gingrich est nommé président de la Chambre des représentants, ce qui lui vaudra d’être nommé personnalité de l’année par le prestigieux magazine Time. Inflexible, il s’oppose farouchement à l’administration du président Bill Clinton, au point de provoquer deux blocages du gouvernement (government shutdown) en 1995 et 1996.
Mais son ascension politique s’arrête brutalement en 1998, lorsqu’il est condamné à une amende de 300 000 dollars pour manquements à l'éthique et contraint à la démission quelques mois plus tard. Il reste à ce jour le seul président de la Chambre à avoir dû s’acquitter d’une amende. Un souvenir amer que s’est récemment amusé à lui rappeler le camp de Mitt Romney qui a fait parvenir, le 16 janvier dernier, un gâteau au QG de Gingrich pour marquer le 15e anniversaire de cette condamnation.
Commence alors à 55 ans une traversée du désert, durant laquelle il s’emploie à se présenter comme l’un des penseurs du parti, à travers la publication de plusieurs livres et des apparitions récurrentes dans les médias. Il divorce une deuxième fois en 2000 pour se remarier avec Calista Bisek, une assistante parlementaire qui a 23 ans de moins que lui et avec qui il entretenait une relation secrète depuis 1993.
"Un candidat sérieux, un penseur du parti et un bon débatteur"
S’il assure avoir hésité à se présenter aux primaires en 2007, Gingrich se lance finalement en 2011, encouragé par les analyses qui font de lui l’un des républicains capables de battre Barack Obama.
Mais les débuts sont chaotiques. Son équipe de campagne démissionne en bloc pendant l’été 2011, l’accusant de n’en faire qu’à sa tête, après qu’il a refusé d’annuler une croisière romantique dans les îles grecques avec sa femme. Les sondages prédisent alors sa défaite, mais il parvient une fois de plus à renverser la vapeur, jusqu’à sa victoire surprise en Caroline du Sud.
Vidéo dans laquelle Newt Gingrich s’associe à Nancy Pelosi, alors présidente démocrate de la Chambre des représentants, pour appeler à lutter contre le réchauffement climatique. Attaqué par ses adversaires à la primaire républicaine, il s’est depuis justifié en indiquant que cela était "la chose la plus bête [qu’il ait] faite ces quatre dernières années".
“C’est un candidat sérieux sur le papier, un penseur du parti et un bon débatteur. Comme Michele Bachmann, Rick Perry, Herman Cain et Rick Santorum avant lui, Gingrich s’adresse à la frange la plus populiste du parti républicain", analyse John Fortier de l’institut ‘‘Bipartisan Policy Centre’’. Interrogé par FRANCE 24, il indique toutefois que la vie personnelle "houleuse" du candidat passe mal auprès des électeurs républicains qui tendent à être très conservateurs sur les questions sociales. "Romney pourrait aussi l’attaquer sur le fait que ses anciens associés, lorsqu’il était à la Chambre des représentants, ne le soutiennent pas ou que certains l’ont même publiquement répudié", ajoute-t-il.
Autre point négatif, son principal concurrent serait plus à même de battre l’actuel président, selon John Fortier. “Romney devrait se situer trois ou quatre points au-dessus de lui dans les sondages l’opposant à Barack Obama. Cette élection étant partie pour être serrée, trois ou quatre points cela peut faire toute la différence…"