Alors que le bilan des attaques menées par la secte islamiste Boko Haram depuis vendredi dernier s'élève à 192 morts, des tirs et des explosions ont été entendus mardi après-midi. Le bilan de ces nouvelles violence était inconnu en début de soirée.
AFP - Des hommes armés ont de nouveau attaqué mardi à l'arme automatique un commissariat de la ville de Kano, dans le nord du Nigeria, à peine quatre jours après une série d'attaques meurtrières du même genre qui avaient fait 185 morts.
"Il était vers 18H30, au moment où les fidèles se préparent pour la prière du soir, quand de nombreux assaillants sont arrivés et ont ouvert le feu en lançant des engins explosifs sur le commissariat", a déclaré un habitant du quartier de Sheka.
itUn autre habitant a confirmé l'incident, faisant état de tirs et explosions. "Des gens qui ont fui la zone m'ont dit que c'était une station de police qui était attaquée. J'ai vu des flammes qui s'élevaient du bâtiment", selon ce témoin.
Le bilan de ces violences était toujours inconnu en début de soirée.
Deuxième ville du pays, Kano avait été secouée vendredi dernier par une série d'attaques et attentats coordonnées visant essentiellement des bâtiments de la police, dont son quartier général. Au moins 185 personnes ont été tuées, ainsi que onze assaillants, dont cinq kamikazes. Ces attaques ont été revendiquées par le groupe islamiste Boko Haram.
Selon l'organisation de défense des droits de l'Homme Human Rights Watch (HRW), au moins 935 personnes ont été tuées au Nigeria dans les attentats revendiqués par Boko Haram depuis que le groupe a lancé une campagne de violences en 2009.
Il ne cesse de multiplier les assauts de plus en plus meurtriers, à la fois contre les forces de l'ordre et, plus récemment, contre les chrétiens. Ainsi, rien qu'au cours des trois premières semaines de janvier, plus de 250 personnes ont été tuées, dont 185 vendredi à Kano, le bilan le plus lourd jusqu'à présent, souligne HRW dans un communiqué mardi.
Toujours à Kano, plongé dans la terreur de nouvelles violences, des habitants avaient affirmé avoir entendu dans la nuit de lundi à mardi des tirs pendant plusieurs heures dans un quartier proche d'un poste de police.
Selon un témoin, policiers et militaires ont encerclé une maison soupçonnée d'abriter des combattants de Boko Haram, peu après minuit. Ils ont ouvert le feu, les suspects ont riposté. Les échanges de tirs, parfois à la mitrailleuse lourde, ont duré plus de quatre heures.
Un couvre-feu nocturne est en vigueur à Kano depuis les attaques de vendredi.
Dans ce contexte d'extrême tension, les Etats-Unis ont appelé mardi "tous les Nigérians à rester unis contre les ennemis de la vie en commun et de la paix".
Le Département d'Etat a souligné que "la diversité ethnique et religieuse" du pays était une "force", "et ceux qui cherchent à la remettre en cause en semant la division ne peuvent pas réussir".
"Une connexion avérée entre Aqmi et Boko Haram"
Les nombreuses attaques de Boko Haram ont fait naître des craintes de violences interconfessionnelles, certains évoquant même le risque d'une guerre civile au Nigeria.
Boko Haram, qui a longtemps ciblé essentiellement des symboles du pouvoir (police, armés, homme politiques) a revendiqué des attentats le jour de Noël contre des églises notamment, dont une, près d'Abuja, où 44 personnes avaient été tuées.
Les 160 millions de Nigérians sont à peu près aussi nombreux dans le nord, majoritairement musulman, que dans le sud, à dominante chrétienne.
Le président Goodluck Jonathan s'est rendu à Kano lundi. Confronté à la plus grave crise qu'il ait connue depuis son accession au pouvoir il y a neuf mois, il a promis de renforcer la sécurité dans le pays, par ailleurs touché par un fort mécontentement social.
Le dirigeant a instauré l'état d'urgence dans plusieurs zones du nord et du centre le 31 décembre, mais Kano n'est pas concernée par cette mesure.
Selon un porte-parole de Boko Haram, le groupe a agi vendredi en représailles au refus du gouvernement de libérer plusieurs de ses membres emprisonnés.
Depuis des mois, certains s'interrogent sur d'éventuels liens entre Boko Haram et la branche maghrébine d'Al Qaïda (Aqmi).
Mardi, le ministre malien des Affaires étrangères, Soumeylou Boubèye Maïga a estimé qu'il existait "une connexion avérée" entre les deux mouvements.
Il s'exprimait à l'ouverture d'une réunion, à Nouakchott, des chefs de la diplomatie du Mali, de la Mauritanie, du Niger et de l'Algérie, à laquelle était invité le Nigeria. Les quatre pays sont confrontés à une insécurité croissante liée aux activités d'Aqmi et d'autres groupes criminels. Le ministre n'a pas fourni de détails sur cette "connexion avérée".
Le responsable de la lutte contre le terrorisme pour l'Union africaine (UA), Francisco Caetano Jose Maderia, s'est lui aussi alarmé mardi de "l'intensification des activités de Boko Haram", et de "la possibilité que ce groupe étende ses activités aux pays voisins, et pénètre même dans la région d'Afrique centrale".