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Megaupload, une internationale du crime selon le FBI

Le dossier d’accusation qui a mené le FBI à fermer, jeudi, le populaire site de partages de fichier Megaupload et à arrêter sept personnes dresse un tableau accablant des activités de ce groupe comparé à une sorte de mafia du téléchargement illégal.

Le FBI a réussi à avoir la peau de Megaupload. Jeudi 19 janvier, les autorités américaines ont fait fermer la célèbre plateforme de partage de fichiers et 18 autres sites du groupe Mega. Le service fédéral américain de police judiciaire a également obtenu l’arrestation du fondateur, connu sous le pseudonyme de Kim Dotcom, et de six autres membres - dans plusieurs pays - de cet empire du téléchargement et du streaming sur Internet. Avant cette fermeture forcée, Megaupload figurait parmi les 15 sites les plus fréquentés au monde et comptait pas moins de 180 millions d’abonnés.

Une opération qui a pris par surprise des millions d’internautes désormais orphelins de leur plateforme favorite sur laquelle ils téléchargaient gratuitement des films, des séries et des musiques pourtant protégés par le droit d’auteur américain. Mais ce coup de force ne s’est pas construit en une journée. Il a fallu plus d’un an au FBI pour monter un solide dossier contre ce qui était devenu, à leurs yeux, l’empire du mal en ligne, une sorte de caverne d’Ali Baba de fichiers illégaux.

Les preuves recueillies sont largement reproduites dans l’acte d’accusation dressé le 5 janvier par un tribunal de Virginie et disponible en ligne. Le dossier décrit dans le détail le fonctionnement de ce que les autorités américaines ont été amenées au fil de leur enquête à appeler la "'Mega Conspiracy’, une organisation criminelle aux ramifications mondiales”. Leur conclusion est sans appel : cette prétendue internationale du crime contre le droit d’auteur américain a privé les ayants droit de plus de 500 millions de dollars tandis que ces membres ont amassé un pactole estimé à plus de 175 millions de dollars.

Pour parvenir à ces allégations, le FBI a eu accès aux conversations par courriel entre les accusés depuis la création de Megaupload en 2005 et au détail de leurs comptes répartis dans une soixantaine de banques dont une grande partie est située dans des pays aux régimes fiscaux avantageux et d’ordinaire peu enclin à communiquer ce genre d‘informations.

Organisation tentaculaire

Le tableau dressé par l’acte d’accusation donne, en effet, de l’”empire Mega” l’image d’une organisation tentaculaire qui avait mis en place un système bien rodé pour s’enrichir. Au fil des 75 pages du dossier d’accusation, les membres du groupe apparaissent comme des experts de la navigation en eau trouble. Dans des courriels, ils expliquent qu’il ne fallait pas permettre de faire, sur Megaupload, une recherche pour trouver des films ou des musiques à télécharger car sinon “nous aurions des sérieux problèmes avec la loi”, reconnaît Kim Dotcom en 2009.

Les conversations électroniques épluchées prouvent également que les salariés eux-mêmes se servaient de Megaupload pour télécharger illégalement des films. L’un des accusés, le directeur artistique du site, Silvius Bencko, se plaint ainsi dans un courriel : “Les épisodes des 'Sopranos' que j’ai regardés étaient tous en français !!! Il faut que j’en trouve d’autres.”

Les enquêteurs notent aussi que Megaupload avait mis au point un système leur permettant de détecter rapidement et d’effacer automatiquement tout contenu “pédo-pornographique ou de propagande terroriste” mis en ligne sur leurs serveurs... Pourquoi, s'interrogent les limiers américains, ne pas avoir alors mis en place un mécanisme similaire pour la détection des films et des musiques protégés par des droits d’auteur ?

La réponse coule de source pour le FBI : la mise à disposition de ces contenus illégaux était leur principal fonds de commerce. Les gérants de Megaupload rémunéraient même plusieurs de leurs membres pour mettre en ligne des contenus “tombant, pour certains, sous le coup de la loi sur la protection des droits d’auteur”, selon l’acte d’accusation. Le FBI affirme que “des millions de dollars ont ainsi été versés aux utilisateurs” pour enrichir la base de données et ensuite en faire la promotion sur des sites “partenaires”.

L’argent de Megaupload provenait essentiellement des abonnements. Pour avoir accès à des films entiers sur le site, l’internaute devait y souscrire car sans cela, il n’était possible que de regarder 72 minutes de vidéos. Depuis 2005, ces abonnements ont rapporté à “l’empire Mega” 150 millions de dollars. Les 25 millions restant proviennent de la publicité.

Un joli pactole qui a permis aux sept co-accusés de mener un train de vie d’enfant gâté de l’Internet. Le FBI a ainsi saisi une trentaine de voitures de luxe, des Lamborghini, Cadillac ou encore Mercedes, leur appartenant. Kim Dotcom a touché, pour l’année 2010 seulement, 42 millions de dollars, tandis que le chef technique du groupe, l’Allemand Mathias Ortmann, a gagné sur le même période 9 millions de dollars. Le moins bien payé des sept accusés, le programmeur estonien Andrus Nomm, a dû se contenter de 100 000 dollars.

Tags: Piratage, Internet, FBI,