L’agence de notation Moody’s a contredit, ce lundi, sa rivale Standard & Poor’s en confirmant le triple A français. Une différence d’appréciation difficile à expliquer mais qui montre qu’il n’y a pas de vérité scientifique en économie.
L’un dit noir, l’autre dit gris et l’économie française ne sait plus vraiment où elle se situe... du moins au regard du jugement des agences de notation. Moody’s a, en effet, confirmé lundi 16 janvier le triple A français, trois jours seulement après la dégradation de la note de la France par Standard & Poor’s.
La différence entre les deux agences rivales ne s’arrêtent pas à la lettre A. Tandis que
Standard & Poor’s estime qu’il y a des risques qu’elle dégrade encore davantage la note de la France dans les prochains mois, Moody’s s’est bien gardé, de son côté, de mettre l'Hexagone sous surveillance négative. Elle “tiendra le marché informé” dans le courant du premier trimestre 2012 sur les perspectives de notation de Paris.
Cette situation de la note française n’est pas pour autant inédite. En août 2011, Standard & Poor’s avait abaissé la note américaine de AAA à AA+ et quelques semaines plus tard Fitch avait rétorqué en confirmant le triple A des États-Unis. Une apparente cacophonie qui n’en est pas vraiment une à en croire Pascal de Lima, professeur d'économie à Sciences-Po. “La différence de santé économique entre deux pays qui bénéficient pour l’un du AAA et pour l’autre d’un AA+ n’est pas énorme”, rappelle-t-il.
Opacité
Reste toutefois que cette différence d’appréciation à quelques jours d’intervalle remet sur le devant de la scène la question de la méthodologie de notation des agences. D’un point de vue purement statistique, Standard & Poor’s utilisent 47 critères qui prennent en compte aussi bien les dimensions économiques que des facteurs politiques. Moody’s se base, quant à elle, sur 50 critères qui sont plus axés sur la structure économique du pays. Mais “s’ils sont connus, la manière dont les agences appliquent ces critères demeure opaque”, regrette Pascal de Lima. Impossible ainsi de dire si l’une d’entre elles se montre plus sévère que ses concurrentes. Toutefois, “généralement, Standard & Poor’s attache beaucoup d’importance au contexte économique international et aux facteurs systémiques [comme la crise de la zone euro ndlr]”.
Ces divergences de notation, dont la France vient de faire les frais, rappellent avant tout que l’économie “n’est pas une science exacte”, constate Pascal de Lima. “Les agences de notation utilisent des critères quantitatifs mais aussi qualitatifs et il y a donc forcément une part de subjectivité dans les notes”, ajoute l'économiste.
Une part de subjectivité qui peut faire la pluie et la beau temps pour l’économie d’un pays. Un État aura, en effet, plus de difficulté à emprunter sur les marchés financiers si sa note a été abaissée. Mais la confirmation du triple A français par Moody’s ne devrait pas, en revanche, niveler l’effet négatif de la décision de Standard & Poor’s. En effet, les rumeurs sur la dégradation de la France se précisant au fil des mois depuis l'automne 2011, les marchés financiers l'avaient déjà largement anticipé.