Les Taïwanais ont voté, ce samedi, pour élire leur nouveau président. Le résultat s'annonce serré entre le chef d'État sortant Ma Ying-jeou, partisan du rapprochement avec Pékin, et la dirigeante du parti indépendantiste PDP, Tsai Ing-wen.
REUTERS - Les Taiwanais élisent ce samedi leur nouveau président ainsi qu’un nouveau parlement, et le scrutin sera suivi de près par Pékin comme par Washington à l’heure où ces deux capitales aspirent à la stabilité dans cette région du monde.
Les partisans de l’indépendance et ceux d’un rapprochement graduel avec la Chine communiste étaient au coude-à-coude dans les sondages publiés dans les derniers jours de la campagne.
Les bureaux de vote ont ouvert leurs portes à 08h00 (00h00 GMT. La plupart des observateurs s’attendent à une participation élevée, étant donné les sondages prédisant une issue serrée.
La perspective d’un parlement bloqué et de l’installation d’un statu quo est même envisagée tant l’écart est faible entre la coalition indépendantiste emmenée par le Parti démocrate progressiste (PDP) et les nationalistes du Kuomintang (KMT).
« C’est difficile pour nous, mais peut-être qu’aucun des deux partis n’aura la majorité », indiquait Gao Jyh-peng, un vieux routier du PDP qui a fait campagne dans la banlieue de Taipeh, la capitale. « Si nous obtenons une majorité, nous pourrons au moins, dans une certaine mesure, bloquer certaines politiques. »
L’issue électorale pourrait avoir des implications pour les relations sino-américaines en cette année d’élection présidentielle aux Etats-Unis et de transition politique en Chine.
L’île, qui a servi de refuge aux nationalistes en 1949 après la guerre civile remportée par les communistes aux Chinois, est revendiquée par Pékin et étroitement soutenue par Washington.
Pour Gao et les autres candidats, les dimensions géopolitiques du scrutin ne sont pas l’essentiel: ils doivent d’abord répondre aux préoccupations des électeurs concernant l’emploi, le logement ou le pouvoir d’achat.
Mais si les nationalistes ne parviennent pas à conserver leur majorité qu’ils ont reconquise en 2008 après huit années dans l’opposition, la politique de rapprochement avec la Chine pourrait être freinée et du même coup ralentir les investissements étrangers qu’elle a stimulés.
Un troisième parti comme arbitre ?
Le président sortant, le nationaliste Ma Ying-jeou, devance légèrement la juriste Tsai Ing-wen, candidate du PDP, dans les sondages mais même en cas de victoire, le contrôle du parlement restera un enjeu crucial.
« Si l’on se retrouve avec différentes branches du gouvernement contrôlées par différents partis, cela pourrait être un problème pour avancer sur certains dossiers législatifs importants, et pour mettre en oeuvre certaines grandes réformes », analyse Ray Wu, chercheur à l’université Fu-Jen.
En dépit de leur rivalité historique avec les communistes au XXe siècle, les nationalistes du Kuomintang sont aujourd’hui plus enclins au rapprochement avec Pékin et à une intégration économique rapide avec le continent.
La Chine voit quant à elle d’un oeil méfiant la candidate du PDP, même si Tsai a modéré les positions indépendantistes de son parti.
Il y a quatre ans, les nationalistes du KMT avaient remporté 81 des 113 sièges: cette confortable majorité a permis à Ma Ying-jeou de mettre en pratique sa volonté de relations commerciales plus poussées avec Pékin, qui ont abouti à une amélioration marquée des relations de part et d’autre du détroit de Taiwan.
Mais cette année, le scénario le plus probable dessiné par les sondages est celui d’une courte majorité pour le KMT, ancien parti dictatorial qui a ouvert le pays à la démocratie dans les années 1990.
« Les nationalistes ont relativement une plus grande chance d’obtenir une majorité mais ils n’auront jamais plus de 70% comme en 2008 », déclare Wang Yeh-lih, chef du département de sciences politiques à l’université nationale de Taiwan.
Un résultat serré pourrait contraindre le président à dépendre du parti le Peuple d’abord, émanation du KMT, au programme similaire, mais dont le dirigeant James Soong est opposé au chef de l’Etat.
Même s’il reste très loin des deux principaux partis dans les sondages, cette formation pourrait jouer un rôle clé dans les tractations qui se dérouleront à l’issue de ce scrutin à un tour.