
Le gouvernement français adressera aux préfets une nouvelle circulaire invitant à assouplir la délivrance de permis de travail pour les étrangers les plus qualifiés. Une révision de la circulaire initiale que les étudiants étrangers rejettent.
Face au tollé suscité jusque dans les rangs de la majorité par la circulaire du 31 mai qui durcissait les conditions d'acquisition du statut de salarié pour les étudiants étrangers diplômés en France, le gouvernement avait promis fin décembre de revoir sa copie. C’est aujourd’hui chose faite, même si le nouveau texte ne remet pas en question l’ancien.
À l'issue d'une réunion organisée mercredi 4 janvier en présence des responsables des universités et des grandes écoles françaises - mais en l’absence des représentants des étudiants concernés -, les ministères de l'Intérieur, du Travail et de l'Enseignement supérieur ont annoncé qu’ils adresseraient aux préfets dès la semaine prochaine "une circulaire complémentaire, donnant les orientations applicables à la situation spécifique des diplômés étrangers hautement qualifiés, de niveau au moins égal au master 2 (bac+5), qui souhaitent acquérir en France une première expérience professionnelle, conformément à la loi en vigueur", précise un communiqué. Qui poursuit : le texte "invitera les préfets à faire en sorte que la nécessaire maîtrise de l’immigration professionnelle ne se fasse pas au détriment de l’attractivité du système d’enseignement supérieur, ni des besoins de certaines de nos entreprises en compétences spécifiques de haut niveau".
Le texte initial demandait aux préfets d’instruire avec "rigueur" l’octroi d’autorisations de travail aux étudiants étrangers diplômés en France pour donner la priorité aux demandeurs d’emploi résidant dans le pays. À la suite de sa publication, nombre de jeunes étrangers fraîchement sortis du système scolaire français qui avaient été recrutés par des entreprises n'avaient pu, par conséquent, obtenir un changement de statut et s'étaient retrouvés en situation irrégulière. Les organisations patronales, au premier rang desquelles le Medef, étaient alors monté au créneau pour défendre des jeunes diplômés "très demandés" par les sociétés hexagonales.
Les étudiants de licence pénalisés
Reste que même si les conditions de délivrance des permis de travail seront assouplies pour les plus qualifiés, les étudiants de licence (bac+3) resteront pénalisés, de même que ceux qui ne sortiront pas des filières les plus prestigieuses. Sans compter que s'ajoute par ailleurs à cela une nouvelle hausse des conditions financières requises pour étudier en France. Le montant des ressources mensuelles obligatoires demandées est ainsi passé de 460 à 620 euros et la taxe pour le renouvellement du titre de séjour étudiant a lui grimpé d'une fourchette de 50 à 70 euros à une somme comprise entre 200 et 385 euros.
Les réactions à la mise en place de la nouvelle circulaire ne se sont donc pas fait attendre. Si pour Alexandre Rigal, directeur exécutif de la Conférence des directeurs des écoles françaises d'ingénieurs, le texte va "dans le bon sens car il répond aux besoins des entreprises et précise deux dispositifs : l’autorisation provisoire de séjour et le changement de statut des étudiants", les premiers concernés par le dispositif ne partagent pas ce point de vue.
Porte-parole du Collectif du 31 mai, Fatma Chouaieb continue ainsi à réclamer l’abrogation de la circulaire. Celle-ci estime en effet que l’assouplissement annoncé est fondé sur des critères "qui laissent la place à l'arbitraire. Nous attendons de voir le texte, mais je ne suis pas du tout sûre que ces nouvelles instructions corrigeront les multiples dysfonctionnements de la circulaire du 31 mai, comme l’augmentation des refus abusifs". Selon elle, 700 étudiants étrangers titulaires d’un master et disposant d’une promesse d’embauche n’ont toujours pas d’autorisation de travail.
Diplômé de la Haute École de commerce (HEC) en 2011, Nabil Sebti, 25 ans, lui aussi porte-parole du Collectif du 31 mai, estime de son côté que "le mal est déjà fait". "Cette nouvelle circulaire ne nous étonne pas en période électorale, mais le cas par cas n’est pas une solution, la France est un État de droit et il doit y avoir des règles."