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Paris appelle les Européens à durcir les sanctions économiques contre l'Iran

Deux jours après le feu vert américain à de nouvelles sanctions contre Téhéran à cause de son programme nucléaire, la France demande à l'Union européenne de durcir les sanctions économiques contre la République islamique.

Le chef de la diplomatie française, Alain Juppé, a appelé ce mardi 3 janvier l’Union européenne (UE) à se prononcer en faveur de nouvelles sanctions de l’ONU contre l’Iran. Une déclaration qui intervient alors que la tension est très vive dans la région. Lundi, l’Iran a testé de nouveaux missiles dans la région du détroit d’Ormuz, un canal stratégique par où transite 35 % du trafic pétrolier maritime mondial.

Nucléaire : l'UE n'est pas prête à reprendre les discussions avec Téhéran

L'Union européenne a adressé mardi une fin de non-recevoir à la demande de l'Iran de fixer "une date et un lieu" pour reprendre les négociations nucléaires entre Téhéran et les grandes puissances, interrompues depuis un an.

"La balle est dans le camps iranien", a déclaré Michael Mann, le porte-parole de la chef de la diplomatie de l'UE, Catherine Ashton, en soulignant que l'UE attendait toujours la réponse de Téhéran à sa lettre adressée en octobre aux dirigeants iraniens.
 

Paris souhaiterait notamment que l'UE emboîte le pas aux États-Unis, qui ont pour leur part adopté, samedi, de nouvelles sanctions contre Téhéran, visant notamment son secteur financier. Les mesures prévoient le gel des avoirs de toute institution financière étrangère qui commercerait avec la Banque centrale iranienne dans le secteur du pétrole.

"Nous souhaitons que les Européens, d'ici le 30 janvier, prennent une mesure équivalente pour bien montrer notre détermination", a déclaré Alain Juppé qui s’exprimait sur la chaîne d’information iTélé.

Celui-ci a en outre rappelé que le président français, Nicolas Sarkozy, avait déjà, fin 2011, fait deux propositions en ce sens, celle d'un gel des avoirs de la Banque centrale iranienne, "qui serait une mesure très dure", a souligné le ministre, et celle d'un embargo sur les exportations de pétrole iranien.

"Guerre froide"

La nouvelle sortie d’Alain Juppé ne constitue certes pas une nouveauté. Comme le rappelle Bernard Hourcade, directeur de recherche au CNRS et spécialiste de l’Iran, Paris a toujours œuvré en ce sens depuis qu’il soupçonne Téhéran de vouloir développer un programme nucléaire militaire. Mais, "c’est la première fois que le cœur du système iranien, le pétrole et la Banque centrale, est ainsi visé", note le chercheur. "Imposer un embargo à l’Iran sur les exportations de pétrole est une politique extrême qui s’apparenterait à une déclaration de guerre que l’on peut qualifier de froide" va-t-il jusqu’à affirmer.

L’exportation de pétrole assure en effet à l’Iran, deuxième producteur de l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep), 80 % de ses devises.

Pour Bernard Hourcade, cette politique qu’il qualifie d’"extrême", a une visée double : d’une part tenter de faire pression sur l’Iran afin qu’il arrête son programme nucléaire, mais aussi et surtout "calmer les ardeurs des partisans d’une solution militaire, comme Israël notamment".

Paris souhaite une position européenne commune

Amener l’UE à soutenir un embargo sur les exportations de pétrole iranien s’annonce toutefois une entreprise compliquée. Cette option, défendue notamment par Londres et Paris, risque en effet de se heurter au désaccord de certains pays européens dépendant de l’or noir iranien. L’Italie, par exemple, importe ainsi 13 % de son brut d’Iran. La Grèce également est assez dépendante du pétrole iranien qui couvre environ un tiers de ses besoins.

Reste aussi à savoir si certains sont prêts à prendre une décision aussi symbolique, compte tenu de sa réelle efficacité. Contacté par France 24, Christian Emery, spécialiste de l’Iran et enseignant à la London School of Economics, relativise en effet l’impact de telles sanctions. "L’Iran trouvera toujours des acheteurs pour son pétrole, affirme-t-il, évoquant notamment la Chine et l’Inde. La différence sera que les clients de l’Iran seront pour leur majorité des pays d’Asie."