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Aéroports : des policiers remplacent les grévistes, les syndicats indignés

, envoyée spéciale à Roissy – Alors que les agents de sécurité des aéroports ont décidé de reconduire leur grève vendredi, le gouvernement a mis en place un service de substitution assuré par la police. Une initiative qui n'est pas du goût des syndicats.

Devant le nouvel échec des discussions entre les compagnies de sécurité et les agents de sûreté aéroportuaire en grève, le gouvernement a mis en place dès jeudi 22 décembre un service de substitution assuré par les effectifs de la police aux frontières (PAF) et des CRS. Les syndicats s’interrogent sur la légalité d’une telle mesure et s'inquiètent de la sécurité des passagers .

Pénalités

La ministre de l'Ecologie et des Transports, Nathalie Kosciusko-Morizet, a affirmé jeudi soir que l'aéroport de Paris allait infliger des "pénalités" aux entreprises de sécurité qui sont "sous pression" du fait de la grève des agents de sûreté.

"Les pénalités seront appliquées aux entreprises de sécurité. Les entreprises patronales sont donc bien sous pression du fait que les salariés sont grévistes", a déclaré la ministre sur la chaîne M6.

A l’entrée du Terminal 2F de l’aéroport de Roissy, drapeaux et banderoles flottent au-dessus des passagers massés dans les files d’attente en ce jeudi matin. Les forces de l’ordre, inhabituellement postées aux portiques d’embarquement, ont pris leurs nouveaux quartiers. Si les voyageurs apprécient le fait de pouvoir partir comme prévu en cette veille de Noël, les syndicats de tous bords, en revanche, montent au créneau. "Ce n’est pas conforme au principe de l’Etat de droit", confie à France 24 Gilles Desbordes, secrétaire général CFDT rattaché à la Fédération des services. "Je trouve inacceptable que l’on casse ainsi le droit de grève, ce n’est pas le rôle de l’Etat", ajoute Omar Kerriou, également affilié à la CFDT en tant que secrétaire fédéral de la Fédération des services.

Le ministre des Transports, Thierry Mariani, se défend de ces accusations en affirmant que "le droit de grève est respecté" et que l'intervention des forces de l'ordre n’est en rien "illégale". Il préfère rappeler que le recours à des policiers est "nécessaire", estimant que le droit de grève ne consiste pas à "paralyser un pays". Selon Thierry Mariani, en effet, "le droit de grève est tout à fait respectable", mais "il y a des moments où il faut arrêter, systématiquement aux dates les plus sensibles, de faire grève". "Pures mesures électoralistes", rétorquent les grévistes. En attendant, certains syndicats, comme la CFDT, se disent prêts à attaquer le donneur d’ordre en justice, c’est-à-dire l’Etat, si la plainte est jugée recevable par les tribunaux. 

Bas salaires

À l’aspect juridique soulevé par les syndicats s’ajoute la question de la sécurité. "En tant que citoyen, je ne me sens pas en sécurité quand je prends l’avion", déclare à France 24 Omar Kerriou. Selon lui, "il ne faut pas s’étonner qu’il y ait des problèmes de sécurité quand on voit les bas salaires et les conditions de travail des agents de sécurité". En 1996, l’Etat externalise le contrôle de la sûreté à des entreprises du secteur privé dans le but de faire des économies. Aujourd’hui, ces sociétés, dont certaines d’entre elles connaissent d’importantes difficultés financières, réclament davantage de moyens auprès d’Aéroports de Paris (ADP). En vain. 

Plus surprenant, côté syndicats des forces de l’ordre, la nouvelle mesure ne convainc pas non plus. Benoît Bernard, secrétaire départemental du syndicat Alliance police nationale, (syndicat positionné à droite sur l’échiquier politique), refuse que les forces de l’ordre endossent des missions qui ne sont pas régaliennes. "Nous ne sommes pas formés pour cela, ce n’est pas notre travail et la sécurité n’est pas optimale dans ces conditions." Les policiers et gendarmes mobilisés sont effectivement habilités à pratiquer les palpations mais n’ont jamais été formés aux appareils à rayons X. Le ministre des transports, Thierry Mariani, a en outre fait valoir que les policiers réquisitionnés étaient qualifiés car "appelés à travailler habituellement sur les aéroports". 

Les agents de sécurité ont décidé de reconduire la grève pour le huitième jour vendredi 23 décembre. À la veille de Noël, syndicats et gouvernement ne semblent pas prêts à se faire de cadeaux.

Tags: Grèves, France,