
Trois hommes, suspectés d'avoir participé à l'attentat du Caire qui a coûté la vie à une jeune touriste française, dimanche, ont été arrêtés. La plupart des lycéens de Levallois, touchés par l'explosion, sont revenus en France, lundi.
AFP - L'attentat qui a coûté la vie dimanche au Caire à une jeune Française paraît davantage l'acte d'islamistes isolés que la marque sanglante d'un groupe terroriste organisé, ont affirmé des analystes à l'AFP.
La police a annoncé avoir arrêté trois suspects dans cet attentat non revendiqué perpétré près du grand bazar, le Khan el-Khalili, tuant une adolescente et blessant 24 touristes, surtout de jeunes Français.
Aucun chef d'inculpation n'a été annoncé contre ces trois hommes arrêtés sur place après l'explosion d'un engin artisanal placé, selon la police, sous un banc de pierre, ou lancé, selon des témoins.
"L'enquête le dira, mais il semble bien qu'il s'agit d'un acte primitif qui a ciblé un groupe de touristes étrangers plus que des Français en particulier", affirme Dhia Rachwan, un expert de l'islamisme radical.
Pour Amr Choubaki, un autre chercheur du centre d'études stratégiques al-Ahram, "cet acte est révélateur d'un malaise social et politique mais paraît l'oeuvre d'un individu ou d'un groupe très isolé".
Dans son histoire moderne, l'Egypte a été sans cesse confrontée au terrorisme. Plusieurs de ses pages depuis la "révolution" nassérienne de 1952 ont été écrites dans le sang.
Ainsi l'assassinat du président Anouar el-Sadate, en 1981, par un commando islamiste, alors que son successeur Hosni Moubarak a échappé à une dizaine de tentatives d'attentats en 28 ans de pouvoir.
Depuis, l'état d'urgence, qui permet des incarcérations non motivées, est systématiquement reconduit en attendant l'élaboration, toujours retardée, d'une loi antiterroriste.
"La pire période, marquée par l'action de deux groupes, al-Jihad et al-Gamaa al-Islamiyya, a eu lieu des années 70 jusqu'au massacre de 57 touristes en 1997 à Louxor", rappelle M. Choubaki.
Ces groupes, porteurs d'un projet de subversion islamiste, ont multiplié les attentats sanglants, enclenchant un cycle de violences qui ont couté la vie à 1.300 personnes dans la décennie 90.
Durement réprimés, leurs militants ont été tués, emprisonnés, ou se sont exilés, fournissant l'ossature d'Al-Qaïda dont le numéro deux est l'Egyptien Ayman al-Zawahiri, fondateur d'al-Jihad.
Al-Gamaa al-Islamiyya ayant annoncé avoir renoncé, doctrinalement, à la violence, plusieurs centaines de ses membres ont été libérés, et le groupe a d'ailleurs dénoncé l'attentat de dimanche.
Principale force d'opposition au régime Moubarak, les Frères Musulmans qui prônent la prédication islamique et l'action politique non violente l'ont aussi dénoncé sans tarder.
Une seconde vague a été inaugurée entre 2004 et 2006, selon M. Choubaki, avec des attaques menées par des groupes moins structurés ou des cellules isolées, comme trois attentats très meurtriers dans le Sinaï et un attentat au Caire.
"Nous en sommes là, sur fond de frustration économique et sociale", dit M. Choubaki, pour qui les sites islamistes "peuvent ensemencer ce terreau fertile à la violence individuelle".
Pour Dhia Rachwan, le mode opératoire et le lieu choisi pour l'attentat de dimanche "le rapproche" de celui perpétré en 2005 au Caire par un kamikaze ayant activé prématurement sa bombe, tuant deux Français et un Américain.
"Il s'agissait d'une cellule familiale, je ne serai pas étonné qu'il y ait un lien entre ces attaques", dit-il, excluant tout rapport avec la guerre de Gaza et l'attitude de l'Egypte critiquée par les radicaux du monde arabe et l'Iran.
Ex-directeur du service de la sécurité de l'Etat, le général Fouad Allam n'exclut pas que l'attentat puisse "préluder à une nouvelle vague de terrorisme en Egypte" favorisée par la crise financière et le contexte régional.