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Complot iranien présumé : Obama décidé à en découdre avec Téhéran

Après la révélation mardi du projet d'attentat contre l'ambassadeur saoudien aux États-Unis, l’administration Obama demande à Téhéran de "rendre des comptes" et se livre à une véritable escalade diplomatique.

Alors que le Proche-Orient et le Moyen-Orient sont en pleine ébullition depuis le début de l’année, l’Iran n’était plus sous les feux de l'actualité. Mais voilà que la République islamique revient avec fracas sur le devant de la scène internationale. Les Etats-Unis l’accusent en effet sans ambages d’avoir comploté dans le but d’assassiner l’ambassadeur saoudien à Washington. Sans surprise, le régime iranien a vigoureusement dénoncé un "scénario fabriqué de toutes pièces afin de détourner l'attention de l'opinion publique américaine des problèmes internes des Etats-Unis".

Escalade diplomatique

Depuis la révélation de cette affaire mardi, on assiste à une escalade diplomatique du côté de l’administration américaine qui demande à Téhéran de "rendre des comptes", et ce au plus haut niveau. En effet,  le président Barack Obama en personne est monté au créneau jeudi soir. Lors d'une conférence de presse à la Maison Blanche, il s’est engagé "à mettre en œuvre les sanctions les plus sévères et à mobiliser la communauté internationale pour faire en sorte que l'Iran soit de plus en plus isolé et paie le prix de ce genre de comportement". Et de poursuivre: "Nous n'écartons aucune option en termes de manière de traiter avec l'Iran [...]."

De plus, les Etats-Unis, qui ont en outre lancé une "alerte mondiale" au terrorisme à la suite de cette affaire, vont demander à leurs alliés de "coopérer plus étroitement pour envoyer un message fort à l'Iran et l'isoler encore plus de la communauté internationale", a averti la secrétaire d'Etat Hillary Clinton. Depuis, les pays du Golfe, la France et la Grande-Bretagne se sont joints au concert de condamnations suite à la révélation du complot présumé.

Jeudi, une source haut placée au sein de la diplomatie américaine citée par l’AFP affirmait que les Etats-Unis avaient dépêché des "responsables de haut rang" à Pékin, à Ankara et à Moscou pour les informer du complot contre l’ambassadeur saoudien. Une activité internationale qui tend à resserrer un peu plus l’étau sur un régime déjà soumis à des sanctions de l'ONU et des pays occidentaux en réponse à son programme nucléaire.

Remettre le dossier nucléaire sur le devant de la scène

Pour Bernard Hourcade, directeur de recherche au CNRS et spécialiste de l'Iran,  cette affaire, qu’il qualifie de rocambolesque, est une opportunité qui permet de remettre sur le devant de la scène  le dossier nucléaire iranien. "Le nucléaire iranien constituait une priorité pour l’administration américaine, mais il a été supplanté par les bouleversements provoqués par le printemps arabe", note-t-il. L'enrichissement d'uranium est au cœur d'un conflit entre la République islamique, qui affirme que son programme nucléaire est exclusivement civil, et les Occidentaux qui craignent que Téhéran n'ait des visées militaires.

Plus encore, "le président Obama profite de cette occasion pour redorer son blason diplomatique après son échec à relancer le processus de paix israélo-palestinien et à donner des gages de fermeté en pointant du doigt l’Iran pour répondre aux surenchères du camp républicain qui demande à son administration d’en finir avec le régime iranien", développe Bernard Hourcade. A l’aube de la présidentielle, la Maison Blanche, encouragée à hausser le ton par certains cadres du Pentagone, ne veut pas risquer de perdre "des millions de voix à cause du dossier iranien", poursuit-il.

En outre, l’Arabie saoudite, principal allié arabe des Américains et pilier de l’islam sunnite, s’inquiète des conséquences de l’éventuelle acquisition de l’arme nucléaire par son voisin et rival chiite. "Les Saoudiens ne veulent pas se résoudre à vivre à l’ombre d’un Iran puissant et intouchable", souligne Bernard Hourcade. En effet, Ryad a demandé à son allié américain de hausser le ton dans le dossier du nucléaire iranien, au point de lui demander d'envisager l'usage de la force pour "couper la tête du serpent", selon des télégrammes diplomatiques américains dévoilés par WikiLeaks l'année dernière.

"Toutefois, conclut Bernard Hourcade, cette poussée de tensions ne risque pas de dépasser le stade des discours et des sanctions, car malgré les sous-entendus en provenance de Washington, on voit mal l’armée américaine bombarder de sitôt l’Iran".