Deux jours après l’interdiction par le ministère de l’Intérieur de tout rassemblement dans le centre de Dakar, l’opposition d’un côté et les partisans du président de l’autre ont décidé de descendre, malgré tout, dans la rue le samedi 23 juillet.
Depuis le 23 juin, date des violentes manifestations qui ont forcé le président Abdoulaye Wade à abandonner son projet de réforme électorale, le 23 du mois est considéré comme une date symbolique par l’opposition.
Ce samedi, elle est donc à nouveau descendue dans les rues de Dakar. L’objectif est de maintenir la pression sur le président sénégalais qui n’a jamais publiquement renoncé à se présenter pour un troisième mandat à la présidentielle de février 2012. Une candidature illégale d’un point de vue constitutionnel puisque la limite est établie à deux mandats.
Les manifestants, parmi lesquels de nombreux jeunes, emmenés par le Mouvement d’opposition des forces vives du 23 juin (M23), se sont rassemblés place de l'Obélisque, éloignée du centre-ville de Dakar, où ils n'ont pas obtenu l'autorisation de se retrouver comme ils l'avaient souhaité. Jeudi, le ministère de l’Intérieur a publié un arrêté interdisant tout rassemblement politique dans le centre de la capitale ainsi que sur les avenues principales pour des raisons de sécurité. Un "abus de pouvoir" selon le M23.
Mais dans la précipitation, la place de l’Obélisque, aussi connue sous le nom de place de la Nation, n’apparaît pas dans la liste des lieux interdits. "Nous avons donc pu trouver un accord avec les autorités pour manifester sur cette place qui s’avère finalement être une bonne opportunité pour nous puisqu’elle se situe dans un quartier populaire et centrale", se réjouit presque Benoît Sambo, le secrétaire national chargé des élections du parti d’opposition, Alliance pour la République, dirigé par l’ancien Premier ministre, Macky Sall.
Maintenir la pression sur le président
La journée promet d’être animée à Dakar car au même moment les partisans du Parti démocratique sénégalais (PDS) d’Abdoulaye Wade ont été autorisés à organiser une marche de soutien à la candidature de l’actuel président en 2012 sur la VDN (voie de dégagement nord), un des principaux axes de la ville, lui aussi écarté de la liste des lieux interdits. "Comme avant chaque meeting, les militants du PDS sillonnent la capitale à la recherche de sympathisants qui se déplaceront demain. Ce matin, ils distribuaient des T-shirt aux jeunes et des tissus aux femmes dans les banlieues. Ils sont particulièrement présents dans les écoles de lutte [sport très prisé des Sénégalais, ndlr] pour convaincre les jeunes de venir", raconte Benoît Sambo.
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Au sein de l’opposition, des divergences se dessinent déjà sur l’attitude à adopter pour ce samedi de mobilisation. Des jeunes de l’Alliance pour la démocratie ont appelé à barrer la route à tous les militants venus soutenir le président. "Ils considèrent l’atteinte au droit de manifester qui a frappé le mouvement comme inacceptable. Aujourd’hui, c’est aux leaders de l’opposition d’essayer de calmer les ardeurs des militants pour éviter les dérapages. Mais c’est un travail de longue haleine", affirme Ndoye Ibrahima, directeur de la communication et des relations publiques du Conseil économique et social du Sénégal. "Des deux côtés, il pourra y avoir des provocations car la situation est actuellement tendue."
Mais pour l’opposition, l’avenir du pays ne se décidera pas samedi. "Nous avons décidé de manifester tous les 23 du mois jusqu’au départ d’Abdoulaye Wade et c’est ce que nous faisons. Le signe que nous enverrons demain, c’est que jamais le peuple ne cédera face à l’ambition du président de briguer un troisième mandat", affirme Benoît Sambo. Et l’opposition est aujourd’hui forte de sa dernière victoire sur le ticket présidentiel. Ndoye Ibrahima n’imagine plus que les Sénégalais puissent laisser faire le président. "Quelque soit le scénario choisi par le pouvoir pour se représenter, ça ne passera pas."
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