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Alors que le Parlement français va se pencher ce mardi sur l'engagement de Paris dans la crise libyenne, sur le terrain, l'insurrection a enregistré plusieurs succès dans la région du Djebel Nefoussa, dans le nord-ouest du pays.

Des montagnes ocres du Djebel Nefoussa, les rebelles de la région connaissent le moindre ravin et piton rocheux, maîtrisent les crevasses et les planques. Ils sont sur leurs terres et rien ne leur échappe. Perchés sur les plateaux poussiéreux du nord-ouest de la Libye, à quelques dizaines de kilomètres de la frontière tunisienne, les insurgés scrutent le moindre mouvement des fidèles de Mouammar Kadhafi retranchés dans la vallée.

Les deux camps jouent à la guerre des nerfs dans cette région restée depuis le début de l’insurrection, à la mi-février, la place forte de la rébellion. Malgré une résistance vigoureuse des forces restées loyales au "Guide" libyen qui pilonnent régulièrement les villages du Djebel Nefoussa, les insurgés n’ont cessé de déplacer le front ouest vers leur objectif : Tripoli, plus au nord. Village par village, vallée par vallée, ils grignotent les kilomètres en direction de la capitale.

Marquer des points

"Depuis deux semaines, les rebelles du Sud-Ouest ne cessent d’avancer et si la résistance pro-Kadhafi est toujours assez forte, le Djebel Nefoussa est le seul front où les rebelles marquent des points", explique David Thomson, envoyé spécial de FRANCE 24 dans la région.

Après le parachutage, début juin, d’armes françaises et grâce à l’aide aérienne de l’Otan, les rebelles ont repris, le 6 juillet, la ville fantôme de Goualich, à une cinquantaine de kilomètres de Tripoli. Une bataille qui s’est arrêtée après cinq heures de tirs d’artillerie. Les troupes de Kadhafi ont déguerpi sans faire de blessés.

Galvanisés par cette victoire, les insurgés se préparent désormais à la difficile bataille d’Al-Assabaa, dernier poste avant Gharyane, verrou stratégique menant à Tripoli. Mais cette bataille risque d’être plus longue que les autres. Al-Assabaa, ville garnison acquise au régime qui compte des grandes familles proches de Mouammar Kadhafi, est entourée de toutes parts par l’armée. Depuis la prise de Goualich, les forces de Kadhafi ont durci leurs positions.

"Peur des bombes de Kadhafi"

Les rebelles ne sont donc pas encore aux portes de la capitale. Chaque kilomètre gagné peut être perdu et leur progression reste lente malgré l’aide de l’Otan. La plupart des zones contrôlées par l’insurrection sont toujours sous la menace des tirs de missiles des forces loyales à Mouammar Kadhafi.

"Dans les régions de montagnes, chaque village est une bataille. Il reste plusieurs de ces hameaux à conquérir avant de s’attaquer à Ghrayane et les positions des rebelles restent encore fragiles", poursuit David Thomson.

À Nalut, à 70 kilomètres de la frontière tunisienne, les attaques de roquettes ont fait fuir la plupart des familles vers la Tunisie. "On a été attaqués peu après deux heures du matin, raconte au micro David Thomson un habitant de la ville au milieu des décombres de sa maison. Chez lui au moment où l’armée a frappé sa demeure, l’homme avoue avoir eu "très peur des bombes de Kadhafi".

Anciens boulangers, maçons ou instituteurs, les rebelles sont par ailleurs toujours aussi inexpérimentés. Avant le début de la guerre, la plupart n’avait jamais tenu une arme entre les mains. Et, face à eux, une armée de métier.

"Nous avons vu un insurgé tirer une rafale de kalach’ par mégarde au milieu de ses camarades car il avait oublié d’enclencher le cran de sécurité", témoigne l’envoyé spécial de FRANCE 24.

Coup de pouce de la France

Les rebelles sont toutefois mieux organisés qu’au début de l’insurrection. Ils travaillent désormais sous un commandement militaire unifié, ont mis en place des sessions de combat (3 jours de front suivis de 6 jours de repos) et prévoient leurs offensives en concertation avec le commandement de l’Otan.

Ils sont également mieux équipés grâce aux prises sur l’ennemi et aux armes de la coalition tombées directement du ciel… Sur le front, tout le monde le reconnaît : sans l’aide de l’Alliance atlantique, qui a notamment bombardé ces derniers jours aux alentours d’Al-Assabaa, il n’y a pas d’avancée possible.

Et alors qu’ils préparent à une nouvelle offensive pour arracher les derniers verrous avant la capitale, les rebelles de la montagne comptent sur le coup de pouce de la France dont le Parlement doit autoriser, ce mardi, la poursuite de la participation à l’opération militaire en Libye.