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La justice française va statuer ce mercredi sur la demande d'extradition émise par Kigali d'Agathe Habyarimana, veuve de l'ex-président rwandais, qui fait l'objet d'un mandat d'arrêt international pour génocide et crimes contre l'Humanité.

AFP - Agathe Habyarimana, veuve de l'ancien président rwandais dont l'assassinat avait déclenché le génocide de 1994, comparaîtra mercredi devant la cour d'appel de Paris qui statuera sur la demande d'extradition émise par le Rwanda.

Agathe Kanziga, veuve Habyarimana, fait l'objet d'un mandat d'arrêt international émis en octobre 2009 par les autorités rwandaises pour "génocide" et "crimes contre l'humanité".

Elle avait été brièvement arrêtée et entendue par la justice française en mars 2010, quelques jours après une visite de Nicolas Sarkozy au Rwanda, la première d'un président français depuis le génocide.

Devant la chambre de l'instruction de la cour d'appel, l'ancienne première dame et son avocat, Me Philippe Meilhac, devraient invoquer l'absence de garanties de procès équitable au Rwanda pour s'opposer à l'extradition.

"Il y a un risque de persécution avéré pour ma cliente en cas de retour", a assuré à l'AFP Me Meilhac. "La demande d'extradition a été introduite à des fins politiques. Elle a été activée à la faveur de la reprise des relations diplomatiques entre la France et le Rwanda", a-t-il déploré.

Mme Habyarimana, 69 ans, est souvent présentée comme l'une des têtes pensantes de l'"akazu", le premier cercle du pouvoir hutu qui a planifié et mis en oeuvre le génocide rwandais, déclenché par l'attentat du 6 avril 1994 contre l'avion transportant son époux.

Environ 800.000 Tutsis et Hutus modérés ont été tués au cours de ce génocide, selon l'Organisation des Nations unies. L'ancienne première dame, qui avait été évacuée par des militaires français quelques jours après l'attentat, nie toute responsabilité dans les massacres.

"Les accusations contenues dans le mandat d'arrêt sont extrêmement floues, notamment en qui concerne les dates", a dit Me Meilhac. "Ma cliente veut bien répondre de ce dont on l'accuse, mais dans le cadre d'un débat équilibré", a-t-il ajouté.

De source judiciaire, le parquet général devrait s'opposer à l'extradition, arguant du fait que les peines encourues par Mme Habyarimana dans le droit rwandais ont été déterminées par une loi postérieure aux faits qui lui sont reprochés.

Plusieurs demandes d'extradition de personnes soupçonnées d'avoir participé au génocide ont été rejetées ces dernières années par la justice française, au motif de l'absence de garantie d'un procès équitable.

Outre le mandat d'arrêt rwandais, Mme Habyarimana fait l'objet depuis 2008 d'une enquête à Paris pour "complicité de génocide", à la suite d'une plainte d'une association française, le Collectif des parties civiles pour le Rwanda (CPCR). Elle a été placée sous contrôle judiciaire.

Résidant chez un de ses fils, dans l'Essonne, Mme Habyarimana s'est vu notifier en mai un refus de séjour en France, où elle réside depuis plus d'une décennie, après un avis défavorable émis par la commission du titre de séjour. Elle se trouve sur le territoire français sans statut légal.

En octobre 2009, le Conseil d'Etat lui avait refusé une demande d'asile présentée cinq ans plus tôt, arguant qu'il y avait des "raisons sérieuses de penser" qu'elle était impliquée "en tant qu'instigatrice ou complice" dans le génocide rwandais.

A l'issue de l'audience de mercredi, la chambre de l'instruction de la cour d'appel devrait mettre sa décision en délibéré. En raison des vacances judiciaires, cette décision pourrait n'intervenir qu'en septembre.