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La Serbie aura encore beaucoup à faire pour rejoindre l'UE

La communauté internationale a salué l’arrestation de l'ancien chef de guerre Ratko Mladic, ce jeudi. Mais pour la Serbie, qui franchit un pas supplémentaire vers l’adhésion à l’Union européenne, il reste encore beaucoup à faire.

"L’arrestation de l'ancien chef de guerre Ratko Mladic, jeudi, a levé un grand obstacle sur le parcours de la Serbie vers l'Union européenne", a déclaré le commissaire européen chargé des négociations d'adhésion, Stefan Füle.

"C'est une très bonne nouvelle. C'est une décision très courageuse du président serbe. C'est une étape de plus vers l'intégration un jour prochain de la Serbie dans l'Union européenne", a noté en écho le président français Nicolas Sarkozy.

"C'est la preuve d'une grande maturité démocratique de la Serbie. Ce qui la rapproche de l'Europe et de l'Union européenne. Un processus que l'Italie a fortement encouragé et qui doit maintenant s'accélérer, sans réserve", a de son côté souligné le ministre italien des Affaires étrangères, Franco Frattini.

Bruxelles avait en effet imposé à Belgrade que les autorités serbes livrent au Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie (TPIY) les criminels de guerre inculpés pour crimes contre l’humanité commis pendant la guerre en ex-Yougoslavie de 1992 à 1995. 

L’arrestation de Mladic permet donc à la Serbie de favoriser son adhésion à l'Union européenne. Mais il faudra fournir d'autres efforts pour parvenir à intégrer les Vingt-Sept. En premier lieu, les autorités serbes vont devoir mettre la main sur le dernier des 161 criminels encore recherché par le TPIY : Goran Hadzic, 52 ans, ancien président de la République serbe autoproclamée de Krajina qui s'étendait sur environ un tiers du territoire de la Croatie durant la guerre. Accusé lui aussi de crimes de guerre et contre l'humanité, il est introuvable depuis 2004.

À cette époque, "il avait échappé in extremis aux enquêteurs de Carla Del Ponte, qui avait accusé les autorités serbes de l’avoir aidé dans sa fuite", rappelle Stéphanie Maupas, correspondante de FRANCE 24 à La Haye.

Qui a soutenu l'ancien chef militaire ?

Faire la lumière sur les complicités des criminels de guerre constitue un autre chantier de taille pour la Serbie. L’arrestation de Mladic "ne met pas fin à l'enquête sur la question de savoir qui l’a aidé pendant sa cavale. A-t-il bénéficié de l'aide de structures de l'État ?" , s’est interrogé le président Boris Tadic ce jeudi.

"Ça fait quelques années qu’il jouissait d’une véritable impunité. Il a pu vivre en toute tranquillité à Belgrade. Il était très protégé", souligne Morad Aït-Habbouche, grand reporter ayant couvert la guerre de Bosnie pour la chaîne FRANCE 24. En juin 2009, une télévision bosniaque avait diffusé des images amateur, qui, même si elles n’étaient ni datées ni localisées, étaient censées prouver qu’il menait une vie ordinaire.

En Serbie, aux yeux de toute une frange de la population, l'ancien chef de guerre est plutôt considéré comme un héros qu’un boucher sanguinaire. Et la nostalgie du passé prime sur la perspective d’une adhésion à l’Union européenne. Sur le panneau annonçant l'entrée de Lazarevo, ville où l’ex-chef de guerre s’était réfugié, un inconnu a collé un bout de papier sur lequel on pouvait lire "Ratko Mladic, héros".

Ces dernières années, certains nationalistes étaient  prêts à prendre les armes pour venger ceux qui sont tombés aux mains de la justice internationale. En 2003, l’ex-Premier ministre Zoran Đinđić avait ainsi payé de sa vie sa coopération avec le TPIY, vers lequel il avait autorisé le transfert de l’ex-président Slobodan Milosevic.

Pour Belgrade, l’obstacle le plus important vers l’Union européenne risque fort d’être de changer les mentalités.