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La crise fait les affaires du crime organisé

Investissements dans les secteurs légaux, mise en place de systèmes écrans... Dans son rapport bi-annuel sur la criminalité organisée, Europol démontre comment les organisations criminelles ont largement profité de la crise.

L’Europe en crise est un vaste chantier pour le crime organisé. L’office de police criminelle européen Europol démontre, dans son rapport bi-annuel publié mercredi, comment la criminalité organisée s’est adaptée et a même profité de la crise économique. "Malheureusement, aucun secteur du crime organisé n’a souffert pendant cette période, bien au contraire", confirme à France 24 Soren Petersen, porte-parole d’Europol.

La crise profite aux riches : un adage particulièrement vrai pour ces organisations criminelles. "Elles sont assises sur de grosses sommes d’argent et la situation économique européenne leur offrent un grand nombre d’opportunités", souligne Soren Petersen. Ces criminels investissent ainsi dans l’immobilier, effectuent de bonnes affaires en bourse ou rachètent à faibles coûts des sociétés fragilisées, décrit Europol au fil des 38 pages dudit rapport.

"Ces deux dernières années, le crime organisé a fortement diversifié ses activités notamment dans des secteurs légaux", peut-on lire. Ces organisations s’achètent une sorte de respectabilité sur le dos de la crise. Mais pas seulement puisque "dans certains cas, l’acquisition d’entreprises en difficulté permet de se doter d’un réseau neuf de sociétés écrans", estime Soren Petersen. Pour Europol, c’est l’un des principaux enseignements de cette crise.

Draguer les "cols blancs"

Mais le crime organisé a aussi su tirer profit du climat anxiogène dans lequel vit la population. "Lorsque vous risquez de perdre votre emploi et que quelqu’un vient vous proposer un travail très bien payé, même illégal, ils sont plus nombreux aujourd’hui qu’hier à franchir le pas", remarque Soren Petersen. La grande nouveauté est que les organisations criminelles réussissent, de plus en plus, à faire basculer dans l’illégalité des "cols blancs". Des spécialistes des marchés financiers ou des informaticiens sont devenus des cibles de recrutement de choix pour le crime organisé. Le rapport note même que ces criminels viennent débaucher des étudiants à la sortie de leurs études.

L’incertitude économique pousse également certains patrons d’entreprise à fermer les yeux et à laisser plus facilement entrer le loup dans la bergerie. "En proie à des difficultés économiques, des dirigeants d’entreprise sont tentés d'avoir recours à de la main-d’œuvre clandestine moins chère", a remarqué Europol. L'augmentation de 31% de la falsification de billets de banque, ces deux dernières années, s'explique notamment par un nombre croissant d'entreprises "légitimes" qui se laissent corrompre pour participer à la chaîne de production.

Enfin, le trafic de drogue a également prospéré pendant cette période. "Nul doute que des personnes fragilisées par la crise sont tombées dans la drogue", assure Soren Petersen. Ainsi, le prix de la cocaïne "n’a jamais été aussi fort en Europe du nord-ouest [une zone qui comprend, notamment, la France]", écrit le rapport. Les organisations criminelles - auparavant spécialisées dans un ou deux produits - ont aussi diversifié leur offre afin de pouvoir aussi bien fournir des drogues chères que celles bon marché (comme les drogues synthétiques) dans les pays où le niveau de vie a le plus chuté.

Crédit photo : zenboyde3/Flickr