La cour d'appel a confirmé le non-lieu pour les deux policiers suspectés de "non assistance à personne en danger" lors de la mort des adolescents Zyed et Bouna par électrocution. Ce drame fut à l'origine des émeutes dans les banlieues en 2005.
AFP - Cinq ans et demi après le drame, la cour d'appel de Paris a prononcé un non-lieu mercredi en faveur des deux policiers initialement renvoyés devant un tribunal dans l'enquête sur la mort de deux adolescents à Clichy-sous-Bois à l'origine des émeutes de 2005.
Les deux policiers avaient été renvoyés en octobre par les juges d'instruction chargés de l'enquête devant le tribunal correctionnel pour "non assistance à personne en danger" mais le parquet de Bobigny avait fait appel de cette décision.
La cour d'appel de Paris a suivi les réquisitions du parquet général qui estimait que les deux policiers n'avaient pas eu connaissance de la réalité du danger.
Le 27 octobre 2005, Zyed Benna, 17 ans, et Bouna Traoré, 15 ans, étaient morts électrocutés dans un transformateur EDF où ils s'étaient réfugiés après une course-poursuite avec des policiers. Un troisième adolescent, Muhittin Altun, avait survécu.
Des violences urbaines avaient démarré le soir même à Clichy-sous-Bois et s'étaient étendues à l'ensemble des banlieues françaises. L'état d'urgence avait même été décrété le 9 novembre.
"Le dossier a toujours été vide", a dit l'avocat des policiers Me Daniel Merchat après la décision rendue à huis clos par la chambre de l'instruction.
"Au bout de 5 ans, la petite voix de la vérité judiciaire a fini par couvrir le tintamarre des leurres médiatiques", a déclaré l'avocat.
L'avocat des familles des deux jeunes s'est en revanche élevé contre cette décision et a annoncé un pourvoi en cassation.
"C'est une justice de peur qui a été rendue ce matin", a réagi Me Jean-Pierre Mignard sur France Inter. Mais "nous irons jusqu'au bout", a-t-il ajouté en accusant le parquet de n'être "pas indépendant" et "pas impartial".
Les policiers initialement mis en cause s'étaient vus reproché de n'avoir pas tenté de porter assistance aux adolescents entrés au péril de leur vie dans le transformateur.
Mais pour le parquet, les policiers ignoraient que les trois adolescents avaient pénétré dans ce transformateur. De même pour l'un des policiers qui, dans des échanges radiophoniques, "avait annoncé qu'il avait vu deux individus en train d'enjamber un grillage pour se diriger vers le site EDF".
Il avait également dit dans ces échanges: "En même temps, s'ils rentrent sur le site EDF, je ne donne pas cher de leur peau".
Claude Dilain, maire PS de Clichy-sous-Bois (Seine-Saint-Denis), a regretté la décision de la cour d'appel.
"Dès le premier jour, j'ai réclamé une enquête indépendante puis un débat contradictoire", a rappelé l'élu auprès de l'AFP.
"Il n'aura pas lieu et je le regrette, même pour les policiers", a-t-il poursuivi. "Leur non-responsabilité aurait peut-être été plus clairement mise en évidence après ce débat", a-t-il estimé.
Mohamed Mechmache, président du collectif d'associations AC-Le Feu, à Clichy-sous-Bois a lui aussi fait part de sa déception. "On travaille pour que la jeunesse croit en la justice, mais après une décision comme celle-là, c'est dur pour nous", a-t-il noté.