
Pendant que les transferts records occultent les déficits vertigineux des grands clubs européens, l’Amérique du Nord redresse son football sur des bases saines. Retour sur la défunte NASL, cancer du soccer des années 1980.
Avant 1967, le football n’était qu’un épiphénomène en Amérique du Nord, essentiellement pratiqué par les immigrants. Aucune structure n’accompagnait son développement, écrasé par les mastodontes que sont le basketball et le baseball.
À partir de cette date, la discipline commence cependant à susciter un intérêt réel, bien qu’encore confidentiel. Deux ligues sont créées ; l’une bénéficie du soutien de la Fédération internationale de football association (Fifa), l’autre obtient un contrat exclusif de diffusion sur la chaîne de télévision CBS. Une situation aberrante, rapidement résolue par la fusion des deux entités sous le nom de North American Soccer League (NASL), en 1968.
La première saison de la NASL est un échec commercial retentissant. Malgré l’ajustement de certaines règles pour rendre le jeu plus "américain", le public et les annonceurs ne sont pas au rendez-vous et 12 des 17 équipes en lice font faillite.
La NASL entre alors dans une période de léthargie. Cinq années d’un championnat semi-professionnel qui ne laisse en rien imaginer qu’il sera très vite le théâtre de la folie des grandeurs de quelques magnats de la finance.
Pelé, Beckenbauer, Cruijff… Paillettes poussiéreuses à prix d’or
Au début des années 1970, la médiatisation naissante du football européen suscite l’intérêt du monde des affaires. De huit équipes en 1972, la NASL en compte 24 en 1978.
Ces nouvelles franchises, achetées sans véritable contrôle de viabilité par des pontes de la finance qui ne connaissent pas grand-chose au football, parient sur l’embauche de stars vieillissantes pour susciter l’intérêt du public.
Ainsi, en 1975, le roi Pelé rejoint le New York Cosmos, premier transfert prestigieux d'une longue série ; il est suivi par le Brésilien Eusebio (Rhode Island Oceaners) en 1975, le Britannique George Best (Los Angeles Aztecs) en 1976, l’Allemand Franz Beckenbauer (Cosmos) en 1977 et du Néerlandais Johan Cruijff (Aztecs) en 1979.
En quelques années, tout le gotha du football mondial de la décennie 1970 rejoint la NASL, suscitant un intérêt sans précédent du public. En six ans, l'affluence triple dans les stades pour atteindre une moyenne de 14 000 spectateurs par match en 1980.
Grandeur spéculative et déchéance abrupte
Médiatiquement aussi, la mayonnaise prend. CBS se laisse à nouveau séduire en 1975, puis TVS prend le relais en 1977 pour deux ans. ABC reprendra ensuite le flambeau jusqu'en 1980.
Mais même si le public est au rendez-vous, la spirale dans laquelle la NASL s'est lancée lui est fatale. Les clubs affichent un bilan financier catastrophique en raison des salaires exorbitants versés aux stars du championnat.
Spécialistes de la finance plus que du football, la majorité des propriétaires de franchises finissent par douter de la rentabilité du système et décident de se retirer.
Après avoir fonctionné en surrégime pendant 5 ans, la NASL est finalement rattrapée par la réalité financière et 17 franchises déposent le bilan en 1981. Trois ans plus tard, en 1984, le premier championnat majeur de l'histoire de l'Amérique du Nord fermera définitivement ses portes. Son seul mérite sera d’avoir, en quelques sortes, introduit le soccer auprès grand public.