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Les Vingt-Sept souhaitent contrôler davantage les investissements étrangers

Deux commissaires européens, dont le Français Michel Barnier, aimeraient que l’Europe se dote d’un outil de contrôle des investissements étrangers. Leur cible ? Principalement la Chine.

Le commissaire européen au Marché intérieur, le Français Michel Barnier, et son homologue à l’Industrie, l’Italien Antonio Tajani, remettraient-ils en cause le sacro-saint principe de liberté de circulation des capitaux qui préside au développement de l’économie européenne ? Selon le quotidien "Les Échos" de ce lundi, les deux hommes auraient en tout cas fait part au président de la Commission européenne, José Manuel Barroso, de leur crainte que l’augmentation des investissements étrangers dans l’Union européenne ne se traduise par un "pillage des technologie de pointe". Sans la nommer, Barnier et Tajani visent la Chine, dont les investissements en Europe ont progressé de 346 % depuis 2003, et ont atteint, en 2008, près de 3,5 milliards d'euros, selon "Le Figaro".

À l’heure actuelle, n’importe qui peut investir sur le sol européen. Et personne ne peut y trouver à redire, sauf dans quelques cas relevant de la "sécurité nationale". Résultat : l’UE est la première destination mondiale des investissements étrangers. "Dans 99 % des cas, c’est une bonne chose pour la croissance et l’emploi en Europe", souligne Adrien Van Den Hoven, directeur des relations internationales de Businesseurope, une organisation patronale européenne.

Fins politiques

Reste le 1 % qui commence sérieusement à inquiéter Bruxelles. "Il s’agit des investissements qui n’ont pas un but commercial", explique Adrien Van Den Hoven. Ils seraient motivés par des intérêts géopolitiques ou technologiques. Un incident récent a mis le feu aux poudres.

En novembre 2010, Xinmao, une société chinoise inconnue des autorités européennes, émet le souhait de racheter l’entreprise danoise Draka. La compagnie chinoise est prête à mettre 1 milliard d’euros sur la table pour battre les deux prétendants européens désireux d'acquérir le fabriquant de câbles industriels. Personne ne sait d’où Xinmao tire son argent et certains soupçonnent l’État chinois de l’utiliser dans le seul but de mettre la main sur les technologies détenues par Draka. Deux mois plus tard, Xinmao se retire de la course sous les pressions des institutions européennes.

Pour Bruxelles, il serait donc temps de prévenir plutôt que guérir. "Même si cela concerne un nombre limité d’investissements, il faut empêcher que les États utilisent leurs entreprises à des fins politiques", reconnaît Adrien Van Den Hoven.

Et la réciprocité ?

Les puissances émergentes, la Chine en tête, ne se montrent pas toutes aussi accueillantes que peut l'être l’UE à l’égard des capitaux étrangers. Ainsi est-il impossible pour des étrangers d’investir dans de larges pans de l’économie chinoise, et le gouvernement refuse qu’une entreprise étrangère contrôle une société chinoise. "Le principe de libre circulation des capitaux doit aujourd’hui aller de pair avec celui de réciprocité", préconise Adrien Van Den Hoven.

L’enjeu aujourd’hui serait donc de mieux contrôler ces investissements. "Certains pays, comme la France et l’Allemagne, ont isolé des secteurs dits de 'sécurité nationale', ce qui est difficilement transposable au niveau européen", indique Adrien Van Den Hoven. Il faudrait que les 27 États membres tombent d’accord sur les contours d’une sécurité commune européenne. Une tâche plus ardue que celle de Pékin qui, assis sur un magot de plus de 2 500 milliards de dollars de réserves de change, peut aisément dénouer les cordons de la bourse pour racheter des groupes européens comme le constructeur automobile Volvo (août 2010) ou la marque de luxe Cerruti (décembre 2010).

Pour l’instant, l’Europe dans son ensemble peut encore se targuer d’investir davantage en Chine (5 milliards d’euros en 2009) que l’inverse. Mais pour combien de temps encore ?