Depuis le premier tour de la présidentielle, le 28 novembre, Haïti est engluée dans une crise politique. Malgré les soupçons de fraude, la proposition du Conseil électoral de recompter les votes a été écartée par les principaux candidats.
AFP - La crise ne semblait pas prête d'être dénouée vendredi en Haïti où les candidats arrivés en première et troisième positions lors du premier tour de la présidentielle ont refusé un nouveau comptage des votes, proposé par le Conseil électoral (CEP) face aux soupçons de fraude.
Michel Martelly, chanteur populaire arrivé juste derrière Jude Célestin, candidat du parti du président René Préval, Inite, (Unité) lors du premier tour, le 28 novembre dernier, et évincé donc du deuxième tour, s'est dit convaincu que les deux hommes avaient manipulé les résultats du scrutin.
"Nous avons un gros problème avec le recomptage des voix dans la mesure où pas moins de 3.000 procès-verbaux frauduleux ont été ajoutés. Ils n'auraient pas du être comptés", a déclaré M. Martelly au cours d'un entretien avec l'AFP.
"Cela a été fait sur instruction du président Préval pour que M. Célestin l'emporte. Il essaye d'installer son homme à la tête du pouvoir", a-t-il poursuivi.
"Je ne veux pas faire partie de ça", a déclaré M. Martelly. "Ils ont organisé la fraude et je suis convaincu qu'ils sont prêts a tout pour rester au pouvoir. C'est un piège", a-t-il dit.
Vendredi soir, la candidate arrivé en tête, Mme Mirlande Manigat a à son tour annoncé qu'elle ne voulait plus d'un nouveau comptage des voix, le CEP n'ayant indiqué "ni la date ni l’heure d’une éventuelle invitation des intéressés, ni surtout la procédure envisagée pour une telle opération".
Elle a toutefois indiqué dans un communiqué qu'elle "demeure ouverte à toute initiative pouvant favoriser un dénouement de la crise, pourvu que la solution soit empreinte de transparence et de légalité".
La publication mardi des résultats du premier tour avait soulevé la colère des partisans de Martelly et provoqué des manifestations pendant deux jours qui on fait plusieurs morts.
Le Conseil électoral avait annoncé jeudi qu'il allait "enclencher une procédure d'urgence et exceptionnelle de vérification" des résultats des trois candidats en tête .
Le processus de vérification devait initialement être assuré par une commission mixte composée du CEP, des candidats à la présidence concernés, d'observateurs nationaux et internationaux ainsi que des partenaires de la communauté internationale.
Les résultats définitifs du premier tour doivent être annoncés le 20 décembre et le deuxième tour doit être organisé le 16 janvier.
Le Conseil de sécurité de l'ONU a de nouveau exprimé vendredi "son inquiétude à propos des allégations de fraude" et a appelé tous les acteurs politiques et leurs partisans au calme.
Le patron de la puissante commission judiciaire du sénat américain a demandé vendredi le gel des aides américaines à Haïti et un moratoire sur l'attribution de visas aux responsables haïtiens, à défaut d'obtenir la garantie d'élections démocratiques en Haïti.
"Comme si Haïti ne faisait pas face à suffisamment de problèmes, maintenant, une fois encore, ceux qui sont au pouvoir essayent de corrompre la volonté du peuple", a déclaré le sénateur démocrate Patrick Leahy.
La figure de proue des ultra-conservateurs américains, Sarah Palin, a, elle, décidé de se rendre sur place ce week-end afin de se rendre compte des besoins du pays touché par une épidémie de choléra qui a fait 2.193 morts depuis la mi-octobre, selon un dernier bilan diffusé vendredi.
Seule touche positive dans le pays: le nombre de réfugiés vivant dans des camps depuis le séisme du 12 janvier, qui a dévasté une partie d'Haïti, a baissé d'un tiers ces derniers mois, a annoncé vendredi l'Organisation internationale pour les migrations (OIM), en passant de 1,5 à un million.