logo

Parmi les 271 œuvres retrouvées de Picasso, neuf papiers collés d’une grande rareté

Pas moins de 271 œuvres du peintre Pablo Picasso ont été retrouvées chez son ancien électricien. Parmi elles, neuf papiers collés exceptionnels. "Jamais Picasso ne s'en serait séparé", réagit l'ancien ami du peintre, Pierre Daix.

Stupéfaction dans le monde de l’art. Quelque 271 œuvres produites par l'un des plus grands peintres et sculpteurs du XXe siècle, Pablo Picasso, ont été dévoilées aux ayant-droit de l’artiste, révèle ce lundi le journal Libération. D’après les informations recueillies par le quotidien, l’authenticité des œuvres fait très peu de doutes. En revanche, les raisons pour lesquelles elles étaient entre les mains d'un dénommé Pierre Le Guennec, ancien électricien de Picasso, et de sa femme, restent mystérieuses. Et le mobile qui a poussé ce couple vivant sur la Côte d’Azur, et aujourd’hui septuagénaire, à demander à Claude Picasso, fils du peintre et administrateur de sa succession, l'authentification de leur "trésor", au compte-goutte depuis janvier 2010, reste trouble.

Parmi les raretés : neuf papiers collés datant de la période des années 1912 à 1914, quand, avec son ami Georges Bracque, Picasso découvre le bonheur de manipuler, découper et agencer des matériaux du quotidien (étiquettes de magasins, coupures de presse et papiers divers). Ces papiers collés sont reconnus par les historiens de l'art comme un moment-clé dans l'évolution artistique de Picasso. "Le papier collé que j’ai vu (et qui est le seul dévoilé à la presse, cf image en grand ci-dessous) est très beau", réagit l’écrivain Pierre Daix, ami de Picasso dans ses dernières années, et auteur d'un catalogue sur la période cubiste du peintre*, joint par France24.com. "Je suis formel : jamais il ne se serait séparé de papiers collés de cette période ancienne. Quand j’ai écrit en 1960 le catalogue du cubisme, et que je lui ai montré des papiers collés qu’il avait perdus de vu depuis 40 ans, Picasso était au bord des larmes."

{{ scope.counterText }}
{{ scope.legend }}
{{ scope.counterText }}
i

{{ scope.legend }}

© {{ scope.credits }}

Histoire mouvementée de la galerie Kahnweiler

L’histoire de ces neuf papiers collés vaut, à elle seule, le détour. Ils n’ont jamais été répertoriés. Comment ces neuf œuvres, dont la valeur est globalement estimée à 40 millions d’euros, selon Libération, ont-elles échappé à la vigilance aussi bien des historiens de l’art que des ayant-droit ? Pierre Daix exclut la thèse du don de l’artiste à son électricien. "Je ne connais, de mémoire, que deux cas où Picasso ait offert plusieurs œuvres, et à chaque fois, il s’agissait de femmes aimées : à l’une de ses maîtresses et à sa compagne Dora Maar".

L’histoire de ces papiers collés a été mouvementée. À l’époque de leur création, au début des années 1910, ils étaient vendus par la galerie Kahnweiler. "Cette galerie était allemande, et a été mise sous séquestre en tant que bien ennemi, en 1914", rappelle Pierre Daix. "Les œuvres ont été vendues à partir de 1921, faisant la joie des artistes et collectionneurs américains et européens. Très peu d'entre elles sont restées en France." Mais l'histoire des neufs papiers collés récemment retrouvés reste inexpliquée, ajoute Pierre Daix. 

Plainte au pénal

Le passé des 262 autres œuvres dévoilées (à voir ici) est tout aussi mystérieux. Selon l’inventaire publié dans Libération, il y a une aquarelle de la période bleue, des gouaches sur papier, des études de main peintes sur toile, une trentaine de lithographies et plus de 200 dessins…

Les six héritiers ont décidé de porter plainte pour recel, le 23 septembre dernier. La collection a été saisie au domicile des Le Guennec, et a été mise à l’abri, dans un local de l'Office central de lutte contre le trafic des biens culturels, à Nanterre.

D’après le journal Libération, l’électricien à la retraite plaide l’innocence. La rédaction de France24.com a tenté de le joindre à son domicile, mais est tombée sur une messagerie de téléphone saturée. L’homme risque la prison – la famille Picasso le poursuit en pénal, et non en civil -, sauf s’il parvient à prouver sa bonne foi, ou à faire jouer la prescription (d’une durée de trois ans normalement, mais les plaignants espèrent pouvoir contourner cette difficulté juridique). "Ce qui compte avant tout, c’est de récupérer un ensemble d’une importance historique pour l’histoire de l’art", commente dans Libération l’avocat des héritiers de Picasso, Jean-Jacques Neuer.

* Pierre Daix, Joan Rosselet. Picasso: The Cubist Years, 1907-1916. A Catalogue Raisonne of the Paintings and Related Works, Thames and Hudson, New York, 1979, 375 p.

Tags: Peinture,