
Alors que les tensions persistent au sujet d'une éventuelle inculpation du Hezbollah par le Tribunal spécial pour le Liban, Saad Hariri est à Téhéran pour une visite historique. Selon lui, l'Iran a un rôle à jouer dans la stabilisation du Liban.
"Que va donc faire Saad Hariri en Iran, en pleine crise gouvernementale ? Se jette-t-il dans la gueule du loup ou cherche-t-il à jouer la rivalité syro-iranienne sur la scène libanaise ?", s'interroge ce samedi le quotidien libanais "L'Orient le Jour", proche de la majorité gouvernementale.
Un mois après la visite du président iranien à Beyrouth, à la fin du mois d'octobre, le Premier ministre libanais a commencé sa première visite officielle en Iran. Au cours de ce voyage de trois jours, il rencontrera notamment, dimanche, le Guide suprême de la République islamique, Ali Khamenei, et le président Mahmoud Ahmadinejad.
Selon une source ministérielle libanaise citée par l’AFP, Téhéran devrait essayer de concilier les points de vue du Hezbollah, dont il est le principal allié, et du camp gouvernemental. Des accords bilatéraux, dont la teneur n'a pas été précisée, devraient également être signés.
La chaîne CBC ravive les craintes
Cette visite intervient alors que le pays est plongé dans un état de vives tensions, dans l'attente de la publication de l'acte d'accusation du Tribunal spécial pour le Liban (TSL) chargé de juger les assassins de l'ancien Premier ministre Rafic Hariri. En début de semaine, la diffusion d'un documentaire sur la chaîne canadienne CBC a ravivé la polémique. Après des mois d'enquête, les journalistes de CBC affirment que la police libanaise et les Nations unies ont réuni un grand nombre d'éléments qui prouvent que des membres du Hezbollah sont bien responsables de la mort de Rafic Hariri. CBC indique avoir pu examiner, notamment, des relevés d'appels téléphoniques qui corroborent ces faits.
Le procureur du TSL, le Canadien Daniel Bellemare, a critiqué la diffusion de ce documentaire susceptible, selon lui, de "mettre la vie de certaines personnes en danger". L'acte d'accusation du TSL est attendu d'ici à la fin de l'année, mais aucune date n'a encore été fixée. Si le Hezbollah était directement mis en cause, le Liban se trouverait dans une situation potentiellement explosive, même si de nombreux analystes minimisent le risque d'un nouveau cycle de violences.
À la veille de son départ pour Téhéran, le Premier ministre libanais a, lui, estimé que l'Iran, qui soutient et finance le Hezbollah, avait un rôle à jouer dans la stabilisation du pays. "Menacer la stabilité de n'importe quel pays de la région constitue une menace à la fois pour les intérêts des Arabes et de l'Iran, a déclaré Saad Hariri. Je considère donc que Téhéran est concerné par les efforts visant à assurer la stabilité de la région."
"Des répercussions positives"
"Je n'ai jamais accusé le Hezbollah" d'être responsable de la mort de mon père, a-t-il également déclaré vendredi à l'Agence nationale iranienne d'informations (IRNA).
De son côté, l'ambassadeur iranien au Liban, Ghadanfar Rokon Abadi, a annoncé que l'accueil réservé au Premier ministre libanais serait "triomphal". En octobre, le président iranien a effectué une visite à Beyrouth où il a été accueilli très chaleureusement par la communauté chiite. "Cette visite aura des répercussions très positives sur le Liban, que vous pourrez constater bientôt", a ajouté Ghadanfar Rokon Abadi.
Au cours des dernières années, Saad Hariri a tenté de maintenir de bonnes relations avec les traditionnels "ennemis" de sa coalition, et notamment avec la Syrie. Le Premier ministre libanais s'est rendu à plusieurs reprises à Damas, longtemps considéré comme le suspect numéro un du meurtre de Rafic Hariri. Le Liban et la Syrie affirment désormais avoir ouvert "une nouvelle page" dans leurs relations.
"Ma priorité, c'est de garder le Liban intact et uni", a confié cette semaine Saad Hariri au quotidien américain "The Washington Post".