Le séisme de janvier a détruit les commissariats et les prisons en Haïti, libérant des dizaines de détenus. Les gangs règnent en maître sur les camps de réfugiés et mettent en péril le scrutin présidentiel de dimanche. Reportage à Port-au-Prince.
Surpeuplés et sans électricité, les camps de réfugiés de la capitale haïtienne, Port-au-Prince, concentrent tous les dangers. En plein centre-ville, entre les taules du camp du Champ de mars, les gangs font régner la terreur. Une Haïtienne, Gisèle, raconte qu’elle a été attaquée et violée par des hommes masqués à l’intérieur même du camp.
"Quand ils se sont enfuis, je suis allée porter plainte au commissariat. Les policiers m’ont dit qu’ils ne pouvaient rien faire. Ils ont même dit que si je voulais qu’ils les pourchassent, il fallait que je leur donne 100 dollars pour payer l’essence de leur véhicule."
La police est quasi-absente des rues de Port-au-Prince. Détruits par le séisme, le commissariat central et les deux prisons de la capitale n’ont pas été reconstruits depuis. On estime que 5 000 prisonniers se sont échappés et n’ont jamais été retrouvés. Les seules forces de sécurité visibles dans la ville se trouvent autour du palais présidentiel, lui aussi en ruines.
"Ceux qui se sont évadés sèment la terreur dans les camps. Nous le constatons dans les plaintes que nous recevons. Il n’y a jamais eu autant de violence", assure Malya Villard, la fondatrice de l'association d’aide aux victimes Kofaviv.
Les 12 000 casques bleus de l’ONU présents dans le pays ne peuvent mener d’opérations dans les camps sans être accompagnés par la police haïtienne. Un casque bleu français reconnaît son impuissance : "Nous, on ne gère absolument rien. On ne s’infiltre pas, on ne se met pas dans le système national haïtien."
Le jour du scrutin, les soldats de l’ONU seront déployés autour des 1 500 bureaux de vote du pays. Mais plus que la violence politique, c’est la délinquance quotidienne qui terrorise les habitants.