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Un prix Nobel de la paix au menu des discussions entre Sarkozy et Hu Jintao ?

Si la venue du président Hu Jintao à Paris inaugure bel et bien une nouvelle lune de miel bilatérale, il s’agit aussi du premier voyage du chef d'État chinois à l'étranger depuis l’attribution du prix Nobel de la paix à Liu Xiaobo...

La visite d'État du président chinois Hu Jintao à Paris, pour trois jours, est avant tout une affaires de contrats économiques, l'Elysée ne s'en cache pas. L'entourage du président a même dévoilé que leur montant serait "de loin plus important que lors des précédentes visites des dirigeants européens à Pékin ou chinois à l'étranger". A titre de comparaison, la première visite de Nicolas Sarkozy à Pékin, fin 2007, s'était soldée par une moisson de 20 milliards d'euros.

Mais cette visite marque également le premier voyage officiel à l'étranger pour le chef d'État chinois depuis l'attribution du prix Nobel de la paix au dissident Liu Xiaobo. Alors, en parleront-ils ou pas ? Nicolas Sarkozy, en recevant son homologue chinois, osera-t-il évoquer le sort du prisonnier ? "Il sera certainement question de Liu Xiaobo", tranche Jean-Luc Domenach, spécialiste de la Chine au Centre d’études et de recherches internationales (CERI) à Sciences Po, interrogé sur France 24. "Nicolas Sarkozy en parlera, c’est sûr. Mais je ne suis pas certain qu’ils reconnaîtront qu’ils en auront parlé", poursuit le chercheur.

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Inquiétude des ONG et manifestation de RSF

La question est d’autant plus brûlante qu’il s'agit du premier voyage officiel du président chinois depuis l'attribution du prix Nobel, le 8 octobre. Des ONG, telles Human Rights Watch (HRW) et la Fédération internationale des ligues de droits de l'Homme, insistent sur la nécessité d'interpeller Pékin sur le sujet. Reporters sans frontières (RSF) a organisé une manifestation ce jeudi en faveur de Liu Xiaobo. Or, la pression des défenseurs des droits de l’homme, notamment de HRW, qui s’exerce cette semaine sur Paris n’a pas eu d’effet sur le secrétaire général des Nations unies. En effet, Ban Ki-moon, en visite à Pékin lundi, n’a finalement pas soulevé le cas du dissident emprisonné devant le président Hu.

Le dialogue franco-chinois n'a aucune limite, aucune frontière, aucun sujet tabou. Nous nous parlons de tous les sujets ensemble, en confiance, sans vouloir se donner des leçons, pour essayer de mieux comprendre les choses et de mieux progresser ensemble, dans un esprit constant de respect mutuel. C'est l'essence même de notre relation.

Nicolas Sarkozy, président français

À Paris, les entretiens bilatéraux dureront un temps inhabituellement long – d’environ sept heures, sur trois jours. Le dialogue franco-chinois "n'a aucune limite, aucune frontière, aucun sujet tabou", a assuré Nicolas Sarkozy jeudi soir, lors de son discours public. Le porte-parole du gouvernement, Luc Chatel, avait été plus mesuré, mercredi. Il avait déclaré que "le gouvernement et le président de la République considèrent que c'est avant tout par la coopération et par le dialogue que nous avancerons, que nous pourrons contribuer à faire progresser la Chine" dans le domaine des droits de l’homme.

Le principe d'ingérence selon Pékin

De son côté, le président Hu Jintao a posé ainsi les bases du dialogue diplomatique franco-chinois : "Nous respectons le droit de chaque peuple de choisir librement sa voie de développement et refusons de nous ingérer dans les affaires intérieures des autres pays ou de leur imposer notre volonté", a-t-il déclaré en préalable à sa visite d’Etat, dans une interview accordée à distance, et par écrit, au Figaro.

Depuis avril 2010, et la visite du président français à Pékin, les relations diplomatiques entre les deux pays se sont nettement dégelées, en comparaison avec l’année 2008. Le chef de l’Etat français avait alors dénoncé les violences policières au Tibet, rencontré le dalaï-lama et menacé de boycotter la cérémonie d’ouverture des jeux olympiques à Pékin. "Les Chinois n’aiment pas Nicolas Sarkozy, commente Jean-Luc Domenach. Ils apprécient les chefs d’Etat qui parlent peu et qui sont prévisibles… Cette fois, le président chinois est essentiellement venu demander qu’on lui fiche la paix."

Alors, en parleront-ils ou n’en parleront-ils pas ? "Il n'est pas prévu de conférence de presse", prévient l'Elysée, précisant que cela avait "été décidé d'un commun accord" entre Pékin et Paris. La seule prise de parole publique des chefs d'État a eu lieu ce jeudi soir, lors d’un dîner avec smokings et toasts... et sans possibilité de poser la question directement aux intéressés.

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