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Le spectre d'un nouveau giga-scandale hante Wall Street

Son nom : le "foreclosure-gate". Les accusés : les grandes banques. Les victimes : tous les Américains qui ont perdu leur maison depuis le début de la crise. Le scandale des expropriations abusives n'en finit pas de grossir.

Un nouveau scandale digne de celui des subprimes ou un épiphénomène comme le soutiennent les banques ? En révélant, dimanche, que certaines de ses procédures d’expropriation étaient entachées d’erreur, Bank of America a mis de l’huile sur le feu d’une polémique qui n’en finit pas de grossir aux États-Unis.

Depuis plus d’un an, les banques américaines auraient été plus que légères avec les procédures d’expropriation. Des dizaines de milliers de personnes auraient été expulsées de leur maison sur la foi de documents maintenant remis en cause.

Dans le box des accusés : les plus grands noms de Wall Street tels que JPMorgan, Bank of America ou encore Wells Fargo. Du côté des victimes : le simple contribuable américain criblé de dettes. Un nouveau scandale potentiellement dévastateur en termes d’image pour le monde de la finance américain. Ces derniers jours, les banques impliquées répètent qu’il ne s’agit que de simples erreurs techniques sans conséquences sur la validité de l’expropriation.

"Foreclosure-gate"

Le Président des États-Unis ne s’y est d’ailleurs pas trompé. Il a expliqué lors d’un discours, samedi, que sa réforme de la finance devait justement prévenir ce genre de scandale. Le président de la Réserve fédérale, Ben Bernanke, a confirmé lundi qu’une enquête fédérale allait chercher à établir si les spécialistes de l’hypothèque n’avaient pas contourné la réglementation pour accélérer les expropriations.

En un peu plus de deux semaines, ce qu’on commence à appeler le "foreclosure-gate" (scandale des expropriations) a pris le monde de la finance de court. Tout commence fin septembre, lorsqu’un employé d’une société d’hypothèques a révélé qu’il signait plus de 10 000 documents d’expropriations, notamment pour JPMorgan, par mois sans vraiment pouvoir prendre connaissance des dossiers. Impossible dans ces conditions de juger du bien-fondé de ces décisions qui ont privé des dizaines de milliers d’Américains de leur toit depuis le début de la crise économique.

Dès lors, la chasse aux "erreurs" de ces fameux documents est ouverte. Des enquêtes sont menées dans les 50 États et les médias n’en ratent pas une miette. L’un des derniers exemples en date concerne la ville de New York où plus de 4 000 procédures ont dû être mises entre parenthèses à cause d’un doute sur l’authenticité des documents. Le respecté blog économique Naked Capitalism souligne qu’on peut en conclure que probablement plus de 100 000 procédures en cours seraient illégales.

L'épée de Damoclès

Jusqu’à présent ces défauts légaux dans les ordres d’expropriations vont d’un nom mal orthographié à des documents inventés de toutes pièces. "Les conséquences pour l’économie américaine pourraient être catastrophiques", juge Christine Rifflart, spécialiste des États-Unis à l’Office français des conjonctures économiques.

"Les expropriations ne font pas seulement baisser la valeur du bien mais du quartier tout entier", rappelle cette économiste. En clair, ces "erreurs" ou "fraudes" des sociétés d’hypothèques ont contribué à plomber le marché immobilier américain pour longtemps. "Voilà probablement l’une des raisons pour lesquelles l’immobilier américain est toujours à la peine alors que l’activité économique reprend par ailleurs ", juge Christine Rifflart.

Et puis, il y a l’épée de Damoclès judiciaire au-dessus de la tête des banques impliquées dans ce nouveau scandale. Le FBI enquête ainsi sur l’opportunité d’ouvrir des poursuites pénales et les grands cabinets d’avocats s’attendent à une pluie d’actions en justice contre les banques qui pourraient, selon ces mêmes avocats, coûter jusqu’à 700 milliards de dollars aux banques.