Le ministre de l'Économie allemande a revu à la hausse la croissance qui devrait atteindre 3,4 % en 2010. Un redressement économique qualifié de "miracle". Une analyse un peu simpliste de la situation selon deux experts interrogés par France 24.
La locomotive européenne repart et elle est à plein régime. Le ministère de l’Économie allemand a revu, jeudi, ses prévisions de croissance fortement à la hausse. En 2010, le PIB devrait grimper de 3,4 % alors qu’en avril dernier, Berlin tablait encore sur 1,4 % de croissance seulement.
Il y a un an, en pleine crise économique, plusieurs spécialistes prophétisaient la fin du modèle à l’Allemande. Ces jours-ci, le refrain est plutôt au retour du "miracle allemand". Un virage sémantique à 180° qui ne correspond pas forcément à la réalité.
"Il n’y a pas de miracle, l’Allemagne récolte aujourd’hui les fruits d’un travail de fond entrepris il y a cinq ans", affirme Isabelle Bourgeois, rédactrice en chef de Regards sur l'économie allemande, la revue du Centre d’information et de recherche sur l’Allemagne contemporaine. Le pays a, en effet, réformé en profondeur son économie. Ses plus célèbres mesures, baptisées 'Hartz IV' et adoptées en 2005, remettaient en partie en cause les règles d’allocation chômage en vigueur à l’époque.
Une pilule très amère qui avait été suivie par plusieurs semaines de manifestations en Allemagne. "Il y avait eu surtout un accord entre les syndicalistes, les entreprises et le pouvoir politique pour accepter de rendre l’économie allemande plus flexible", précise Isabelle Bourgeois. Un effort collectif qui, selon cette économiste, démontre aujourd’hui ses effets positifs. "En un an, il y a eu près de 300 000 créations d’emplois et quasiment pas de destructions de postes", note-t-elle.
Reflet de la reprise mondiale
Une explication structurelle qui ne convainc pas tout le monde. "Pour comprendre la forte croissance actuelle, il faut simplement se rappeler que l’Allemagne a été touchée plus durement que la plupart des autres pays européens", rappelle Stefan Kooths, économiste à l’Institut pour l’économie mondiale de Kiel. L’Allemagne ne ferait en fait que rattraper le retard pris durant la crise. "Notre PIB avait tout de même chuté de plus de 4 %", souligne Stefan Kooths.
Cette croissance, que les autres pays envient, souligne également la grande dépendance de l’Allemagne à ses exportations. "Les réformes entreprises ont permis d’amortir le choc social de la crise, mais la croissance allemande est encore et toujours le résultat du retour de la demande internationale", affirme Stefan Kooths.
Le "miracle allemand" ne serait alors que le reflet de la reprise mondiale. "C’est également son principal handicap, car si la tendance mondiale s’inverse, il n’y pas de raison pour que l’Allemagne ne plonge pas à nouveau", prévient Stefan Kooth. Surtout, cette fois-ci, il n’y a plus rien dans les caisses de l’État pour un nouveau plan de relance. "Ce 'miracle allemand' est un verre à moitié vide et pour l’instant il vaut mieux le voir à moitié plein", conclut Stefan Kooth.