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Au lendemain de l'alerte émise par Washington, invitant ses ressortissants en Europe à la vigilance, le Japon avertit également d'un risque d'attentat. Mais aucun document officiel ne vient confirmer que la menace se soit précisée ces jours derniers.
Il n'y a "rien de très tangible" dans les menaces d'attentats en Europe et "il faut être prudents" car une réaction exagérée ferait le jeu d'Al-Qaïda, a estimé lundi Richard Barrett, chef de l’équipe de surveillance des activités d’Al-Qaida et des talibans à l'ONU.
Les réseaux jihadistes, et celui créé par Oussama ben Laden en particulier, "ont tenté de monter depuis longtemps une série d'attaques simultanées en Europe", a-t-il dit à l'AFP. "Mais cette fois, autant que nous sachions, il n'y a rien de très tangible".
"Pour Al-Qaïda, il est très efficace de voir une histoire pareille faire le tour du monde", précise l'ancien chef du contre-terrorisme au MI6 (services de renseignements extérieurs britanniques). "Ils ont obtenu l'attention du monde entier, et c'est ce qu'ils cherchent. Leur but est de terroriser, pas de tuer. Ils ne sont pas stupides. Ils peuvent ainsi obtenir beaucoup avec pas grand chose".
Menace terroriste réelle ou pas ? Difficile de déchiffrer les raisons pour lesquelles les États-Unis ont mis en garde, dimanche, les Américains souhaitant voyager en France et en Allemagne. Les touristes sont appelés à être vigilants dans les lieux touristiques et dans les transports publics, qui présentent des "risques potentiels d'attentats terroristes". Le Japon a emboîté le pas à Washington, lundi, et émet également une alerte à l’intention de ses concitoyens désirant se rendre en Europe. De son côté, Londres informe simplement les Britanniques que, "tout comme d'autres grands pays européens, la France considère que le risque terroriste est élevé".
"Les informations actuelles laissent penser qu'Al-Qaïda et des organisations affiliées continuent de préparer des attentats terroristes", indique dans un communiqué le département d'État américain.
La chaîne américaine Fox News, citant un haut responsable occidental du renseignement, est plus précise. Elle publie une liste de lieux propices aux attaques terroristes : la tour Eiffel et la cathédrale Notre-Dame de Paris, l’établissement de luxe Hotel Adlon près de la porte de Brandebourg à Berlin, ainsi que la gare centrale berlinoise.
Cette liste a été communiquée par un "ressortissant germano-pakistanais interrogé à la base [militaire américaine] de Bagram, en Afghanistan", croit savoir Fox News, citant toujours un autre haut responsable du renseignement américain. La chaîne américaine parle d’un risque d’attentat "Mumbay style", c’est-à-dire sur le modèle des attaques de Bombay qui avaient fait 166 morts en 2008.
Documents récemment transmis à la France
Les États-Unis ne sont pas plus prolixes sur les raisons qui les ont poussés à émettre ces conseils de vigilance, une première pour l’Europe. Toutefois, le département d’État ne va pas jusqu’à déconseiller formellement les déplacements sur le Vieux Continent, comme il le préconise pour des voyages en Afghanistan, en Iran, en Irak, en Israël, au Liban, en Somalie ou en République démocratique du Congo (RDC).
Si cette mise en garde correspondait à un risque précis, davantage qu’à une présomption de risques d’attentat, les services de renseignements ne le divulgueraient pas. Le silence est de mise pour dénouer les situations les plus sensibles. Mais plusieurs événements sont à mettre en regard de cette décision.
Les Américains auraient transmis récemment à la France une série d’informations très classifiées, avance Le Parisien. "Ces renseignements évoquent une quinzaine de ressortissants européens, partis s’entraîner au djihad dans des camps militaires dans le nord du Pakistan. Certains d’entre eux seraient rentrés en Europe via la Turquie", révèle un spécialiste du renseignement, sous le sceau de l’anonymat. Une information démentie par l’AFP ce lundi : des sources au sein des services de renseignements français ont affirmé à l’agence de presse qu’ils ne possédaient "pas d'éléments nouveaux", depuis début septembre, quant à une menace d'attentats en France. "La menace est élevée depuis début septembre, mais les services ne disposent pas d'éléments nouveaux depuis cette date", ont déclaré ces personnes qui restent anonymes.
Autre élément pour comprendre ce sursaut de communication aux États-Unis sur un risque terroriste émanant du Pakistan : une offensive militaire à la frontière afghano-pakistanaise, qui a débuté par des tirs de missiles réguliers depuis début septembre, est imminente.
Interpellation d’un homme à Meudon
De leurs côtés, les autorités françaises n’ont pas souhaité surenchérir suite à la décision américaine. "Sans être alarmiste, la vigilance est de mise", a déclaré dimanche le premier ministre François Fillon. "Il ne faut pas inquiéter nos concitoyens, les mesures sont prises, entre autre dans le cadre du plan Vigipirate. Mais il ne faut pas non plus être dans le déni et donc il faut rester en alerte", a affirmé pour sa part le ministre de l’Intérieur Brice Hortefeux. Ce dernier avait révélé il y a deux semaines que la menace terroriste en France était "réelle", et que les services de renseignements évoquait "une menace imminente d'attentats".
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Ce lundi, la section antiterroriste de la brigade criminelle a interpellé une personne à Meudon, dans les Hauts-de-Seine. Ils agissaient dans le cadre de l'enquête sur une alerte à la bombe, qui s'était révélée sans fondement, à la gare Saint-Lazare à Paris, le 1er octobre. Il s'agit de la première interpellation dans les enquêtes sur les différentes alertes à la bombe ayant visé récemment plusieurs lieux de la capitale, dont la tour Eiffel. Toutes ces alertes se sont révélées sans fondement.
(crédit photo : Pascal Terjan)