Selon des résultats partiels, le chef de l'État rwandais sortant a obtenu près de 93 % des voix à la présidentielle de lundi. Une réélection sans surprise pour celui qui a remis le pays sur les rails. Parfois au détriment des droits humains.
"Cette victoire, c’est la victoire du Rwanda, c’est la victoire de tous les Rwandais, c’est la victoire du développement." Dans le stade Amahoro de Kigali, la capitale rwandaise, le président sortant Paul Kagame, assuré d’être réélu, a prononcé, mardi matin, sa première déclaration après une nuit de fête. "Toute la nuit, des célébrations et des danses ont eu lieu en présence de Paul Kagame, de sa famille et des membres du gouvernement", rapporte Stéphanie Braquehais, envoyée spéciale de FRANCE 24.
itLes résultats de la présidentielle du lundi 9 août ne portent, pour l’heure, que sur 11 des 30 circonscriptions du pays, mais ils ne laissent pas de doute sur la victoire de Paul Kagame et de son parti, le Front patriotique rwandais (FPR), qui rassembleraient près de 92,9% des voix.
Le Rwanda, "Singapour de l’Afrique" ?
Au terme de cette élection sans surprise, pour laquelle le président sortant n’avait pas de concurrent sérieux, le score le plus élevé obtenu parmi les autres candidats est celui du président de l’Assemblée nationale Jean-Damascène Ntawukuriryayo, du Parti social démocrate (PSD). Selon les résultats partiels de la commission électorale, il aurait récolté 4,9% des suffrages.
Arrivé à la tête du pays après le génocide auquel il a contribué à mettre un terme en juillet 1994, Paul Kagame a été désigné chef de l’État par le Parlement avant d’être élu une première fois au suffrage universel en 2003 avec 95 % des voix. L’homme fort de Kigali va donc entamer son second mandat électif de sept ans à la présidence de ce petit pays d’Afrique centrale, encore traumatisé par l’exécution des 800 000 Tutsis et Hutus modérés entre avril et juillet 1994.
Considéré comme l’artisan de la reconstruction du pays, dont il compte faire le "Singapour de l’Afrique", Paul Kagame doit une grande part de sa popularité à sa réussite économique. "Quand on arrive à Kigali, on peut voir une ville extrêmement propre, avec des routes bitumées, une ville fleurie dont beaucoup de Rwandais sont fiers, détaille Stéphanie Braquehais. La Banque mondiale a classé le Rwanda parmi les cinq premiers pays africains pour la facilité d’investissements."
Le "Bismarck des Grands Lacs"
itLe numéro un rwandais est toutefois critiqué par les défenseurs des droits de l’Homme pour son autoritarisme, qui lui a valu le surnom de "Bismarck des Grands Lacs". "Au Rwanda, si vous essayez de parler, soit vous avez de la chance et vous allez en prison, soit vous êtes malchanceux et vous êtes massacré", a déploré sur FRANCE 24 Paul Rusesabagina, l’homme qui a sauvé, en 1994, plus d’un millier de personnes réfugiées dans un hôtel qu’il gérait, et dont l’histoire a inspiré le film "Hôtel Rwanda".
Les trois candidats qui ont pu se présenter à l’élection étaient loin d’être de farouches opposants. Ils ont d’ailleurs tous déjà affirmé leur intention de travailler avec le président réélu. Une situation qui ne semble pas déranger la plupart des Rwandais que l’envoyée spéciale de FRANCE 24 Stéphanie Braquehais a interviewés : toujours marqués par le génocide, ils redoutent aujourd’hui encore les affrontements et les oppositions, explique-t-elle.
Pour nombre de Rwandais, l’important c’est que "la paix soit là". Ce qui frappe, poursuit-elle, "c’est le souci de beaucoup de continuer à vivre en paix, même si l’opposition doit être étouffée, car ils craignent que le pays ne sombre de nouveau dans les souffrances endurées il y a 16 ans."