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La découverte d’un gel microbicide capable de réduire de plus de moitié les risques de transmission du VIH est porteuse d’espoir pour les femmes, notamment en Afrique, continent le plus touché par le sida.

La nouvelle fait beaucoup de bruit et beaucoup de bien. Sur une planète où plus de la moitié des cas d’infection au VIH sont féminins et où 70% des malades sont Africains, la découverte d’un gel microbicide qui permettrait de réduire de 54 % les infections par le VIH parmi les femmes qui l'utilisent régulièrement s'apparente à une révolution pour la femme africaine, souvent tributaire du bon vouloir des hommes en matière de sexualité.

"C’est la première fois dans l’histoire de la maladie que la population féminine pourra gérer sa protection dans sa vie intime, s’enthousiasme à Paris Jean-François Delfraissy, le directeur de l’Agence nationale pour la recherche sur le sida (ANRS). Maintenant les femmes pourront gérer leur propre destin. Imaginez ce que cela signifie pour les 1,3 million d’Africaines infectées chaque année… Oui, c’est peut-être le début d’une révolution."

"Utiliser un préservatif n’est pas un acte naturel"

Sur le terrain, la nouvelle suscite l'espoir. Jusqu’à aujourd’hui, seul le préservatif pouvait bloquer la transmission de la maladie. Mais en Afrique, imposer cette méthode de contraception à son partenaire n’est pas toujours facile. "Pour beaucoup d’hommes, utiliser un préservatif n’est pas un acte naturel. D'autant que la population est souvent sous la coupe de l’Eglise catholique qui proscrit son port", explique Théodore Assani, médecin au Congo et membre du Programme national de lutte contre le sida.

De plus, les femmes n’ont souvent pas le pouvoir de refuser un rapport non protégé. "Elles dépendent économiquement et socialement de leur partenaire, précise Eric Fleutelot, directeur général adjoint de Sidaction. Refuser un rapport, c’est côtoyer l’exclusion." Pour lui, il ne fait aucun doute que le gel sera accepté par la population. "Il protège de manière invisible, c’est un bénéfice pour les Africaines."

"Casser la courbe de l’épidémie en 30 ans"

Un bénéfice qui vient caresser un rêve un peu fou. "Si les femmes l’utilisent correctement, [dans les douze heures avant l’acte sexuel et dans les douze heures après ndlr] et si ce gel est utilisé en complément d’un partenaire régulier, d’un préservatif et du suivi d’une trithérapie, on pourrait casser la courbe de l’épidémie dans les 30 années à venir, explique Jean-François Delfraissy. L’Afrique est la clé de l’épidémie, elle en sera aussi le point final."

Un enthousiasme toutefois teinté de prudence. Pour le moment, le gel microbicide est encore à l’épreuve. Mais si tous les essais sont concluants, la mise en place du produit sera effective courant 2011. Restera alors le problème du coût. Aujourd’hui, une dose de ce gel revient à 15 cents. A raison de 8 rapports sexuels par mois en moyenne, et 96 par an, le total avoisinerait les 30 dollars, "beaucoup trop cher" pour la population africaine estime Jean-François Delfraissy.